Le retour bien-pensant de la prêtresse du punk

| ven, 08. juin. 2012
Huit ans après Trampin’, Patti Smith vient de sortir Banga, l’album le plus assagi de sa carrière. Le plus conformiste, aussi, à l’exception du chef-d’œuvre Constantine’s dream. Cet été au For Noise de Pully.

Après le succès de son exposition de photographies à Paris, Patti Smith revient au rock, ses premières amours.

Aujourd’hui âgée de 65 ans, Patti Smith bénéficie d’une aura artistique que peu de chanteuses peuvent lui contester. Seule peut-être Janis Joplin, si elle avait survé-cu aux excès d’alcool et de drogues, aurait atteint ce degré de magnétisme. Ou peut-être Joan Baez, si elle avait lâché un jour sa guitare en bandoulière.
Avec son look de rockeuse mal dégrossie, la New-Yorkaise sort cette semaine Banga, onzième album d’une discographie parcimonieuse, enregistré après Twelve (2007), un disque où elle reprenait à son compte le panthéon du rock, notamment Hendrix, les Stones, les Beatles, Stevie Wonder, R.E.M ou Nirvana.
Grande prêtresse du punk new-yorkais au milieu des années septante, Patti Smith passe aujourd’hui pour l’intellectuelle du rock américain, la lettrée d’une bande d’analphabètes, celle qui sait que Baudelaire n’est pas le quaterback des Giants. D’ailleurs, ne se permet-elle pas de citer tour à tour Andreï Tarkovsky, Mikhaïl Boulgakov, Maria Schneider ou Piero della Francesca dans son dernier disque, comme s’ils étaient tous des amis proches.
Des amis, il en est toutefois question: la chanson Nine a été composée pour l’anniversaire de Johnny Depp, que Patti Smith considère comme un frère. Très fin guitariste au demeurant, le comédien rend la pareille en jouant un solo sur ce titre.
Dans le cas de Maria Schneider (qui tenait le rôle de Jeanne dans Le dernier tango à Paris, de Bertolucci en 1972), l’amitié date de la première tournée de Patti Smith, à l’époque de l’album Horses. «Cette chanson n’est pas que sur Maria, c’est aussi l’hymne d’une époque. Nous étions intoxiquées par notre jeunesse», raconte la chanteuse dans une interview donnée à L’Express.

Le sang en vin
De telles références, Banga en est pétri. Aussi, Patti Smith dédie-t-elle This is the girl à Amy Winehouse, la chanteuse décédée l’an dernier, qu’elle n’a cependant pas connue: «This is the blood that turned to wine (C’est le sang qui tourna en vin).» Une ballade dont les chœurs remontent aux années 1960, mais qu’elle a achevée en pensant à la rebelle.
De pied en cap, cet album tient au concept de la référence lointaine. Aussi, le titre Banga provient du roman Le maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov, dans lequel le chien Banga tient un grand rôle.
Après avoir exposé ses photographies à la Fondation Cartier, en 2008, à Paris, Patti Smith a également connu un énorme succès avec son livre Just kids, qui raconte son amitié de jeunesse avec le photographe Robert Mapplethorpe. Du coup, il semblait que, ces dernières années, la musique était devenue une préoccupation secondaire pour l’Américaine. L’écoute des dix premiers titres de cet album très bien-pensant avait laissé un goût amer et on pensait fortement à l’escroquerie.
Par chance, ce disque est sauvé par ses deux dernières plages. Une reprise au piano d’After the gold rush, l’une des plus belles chansons de Neil Young. Et, surtout, Constantine’s dream, une pièce montée de dix minutes, partagées entre la voix charnelle et envoûtante de la chanteuse et les guitares acer-bes de Lenny Kaye. Sans con-teste l’une des compositions les plus fortes que Patti Smith ait jamais écrites.


Patti Smith, Banga, Sony. Pully, For Noise, le 25 août 2012. Infos: www.fornoise.com

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