A Bulle, La Tuile remplit son rôle et cherche à le renforcer

| jeu, 20. sep. 2012
Le centre d’accueil, basé à Fribourg, tire un bon bilan de son antenne en Gruyère. La Tuile cherche à s’étendre en partenariat avec la commune de Bulle. L’appartement est bien vu des acteurs sociaux et de la population.

PAR YANN GUERCHANIK


«Tout ce qu’on avait prévu s’est réalisé.» Le directeur de La Tuile Eric Mullener a vu son plan se dérouler sans accroc. En avril 2011, le centre d’accueil de nuit basé à Fribourg ouvrait un appartement au centre-ville de Bulle. Un mois plus tard, les quatre chambres avaient trouvé preneur. «Six personnes ont eu recours à cette offre de logement accompagné. Deux en sont sorties et ont retrouvé une situation stable et deux autres sont sur le point de le faire.»
Et le centre d’accueil ne s’est pas trompé de public cible: les utilisateurs sont gruériens. En 2010, La Tuile avait enregistré à Fribourg 400 nuitées de personnes provenant de la Gruyère. Une donnée qui montrait bien que le district génère également son lot d’exclus. L’appartement bullois a fourni un toit à quatre hommes et deux femmes, âgés de 30 à 60 ans. Tous ont été encadrés par des professionnels de la région, qu’il s’agisse du service social ou celui des tutelles et curatelles.
Les objectifs sont donc atteints: éviter que les gens d’ici  demeurent à Fribourg. «Quitter sa région pour une personne sans logis et dans une situation précaire, c’est une rupture supplémentaire», relève Eric Mullener. Du point de vue institutionnel, c’est aussi un moyen de soulager la structure fribourgeoise. De fait, trois utilisateurs ont pu être accueillis dans l’appartement bullois sans même passer par cette dernière.


Rompre le cercle vicieux
L’appartement bullois a permis à certains de reconstituer leur domiciliation légale et ainsi retrouver le droit à l’aide sociale, mais également à des prestations de type conseil et accompagnement. Cette solution de logement accompagné permet en effet de rompre un cercle vicieux: pas d’aide sociale sans domicile, pas de domicile sans aide sociale.
Pour rappel, l’appartement de Bulle fonctionne selon le modèle de celui qui a fait ses preuves à Fribourg, en parallèle à la structure d’accueil de nuit: «C’est une offre complémentaire à l’hébergement d’urgence, qui propose une solution transitoire pour des personnes suffisamment autonomes et motivées à retrouver une stabilité», définit Eric Mullener.
Et le directeur de relever: «On dit de nos clients qu’ils sont trop ou trop peu atteints: trop atteints pour être complètement seuls en appartement et pas assez pour être placés en institution. Dans l’urgence, puis dans le transitoire, nous leur rendons le temps un peu plus élastique pour qu’ils se reconstruisent.» Ainsi, ce Gruérien qui, après une longue période d’hospitalisation, n’avait plus accès au chalet d’alpage dans lequel il avait élu domicile. Accueilli dans l’appartement bullois, il a trouvé le temps et l’aide nécessaires pour s’en sortir.
«La reconstruction s’opère brique après brique, explique Eric Mullener. Certains ont juste besoin d’une mise à niveau administrative et d’une reconstitution de domicile, d’autres doivent régler des problèmes de consommation (drogue, alcool) ou des problèmes psychiques.»  Il y a des petites histoires banales et des histoires inconcevables, violentes et sinistres.


Une liste d’attente à Bulle
La solution bulloise permet également de rééquilibrer la solidarité interrégionale et ainsi réduire les migrations vers Fribourg. Le centre d’accueil ne cache d’ailleurs pas sa volonté de s’implanter plus encore dans la région bulloise. «On remplirait quatre chambres supplémentaires sans problème, des personnes sont sur liste d’attente», indique Eric Mullener.
Et le directeur d’ajouter: «On a encore des clients à La Tuile qui viennent de la Gruyère. Bénéficiant de l’aide d’urgence, soit 8 francs par jour, ils n’ont même pas de quoi se payer le bus pour rentrer chez eux.»
Mais le centre ne cherche plus aujourd’hui à acquérir un objet immobilier, il peine même à en louer un: «Le marché bullois est très difficile si bien qu’on envisage plutôt des partenariats avec les autorités communales. L’idée serait qu’on nous mette à disposition des biens que nous pourrions gérer au service de la société.»
Du côté de la commune, on prête attention: «On leur est reconnaissants d’avoir mis en place cette structure qui s’est très vite remplie, relève la conseillère Josiane Romanens en charge des affaires sociales. Quant à fournir des locaux, on aimerait bien, mais on a actuellement beaucoup de demandes de la part des associations ou des sociétés. On travaille actuellement à faire une sorte de photographie des revendications et des besoins.»
Un groupe de travail va par ailleurs plancher sur l’affectation future de l’Institution Sainte-Croix. La récente acquisition communale, vouée en partie au social, est une piste envisagée.

 

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Un accueil favorable
«Ça va être le robinet des pauvres, ils vont nous envoyer des nouveaux cas.» Le directeur de La Tuile Eric Mullener connaît bien les préjugés qui peuvent sévir. Privilégiant le contact et la négociation avec les partenaires régionaux, le centre d’accueil fribourgeois est parvenu à ouvrir une antenne à Bulle dans des conditions favorables. La collaboration a très vite été lancée avec le Conseil communal, le Service social de la Gruyère, les hôpitaux de Riaz et Marsens, les services de soins à domicile ou encore la police de proximité.
Responsable du service social gruérien, André Sallin en témoigne: «Ensemble, on a pu mieux définir les catégories d’utilisateurs par exemple. C’est clairement une prestation supplémentaire et si on disposait de davantage de places de ce genre, on les utiliserait assurément.» L’accueil des citoyens a même surpris Eric Mullener: «Ce n’était pas un but recherché, mais on a eu davantage de donations provenant de la Gruyère et des personnes de la région sont devenues membres.»
Le directeur a particulièrement été touché par le geste spontané de la société de jeunesse qui a organisé la 28e Rencontre des jeunesses à Epagny: «Ils nous ont adressé un don libellé “pour aider La Tuile à étendre son offre en Gruyère”, c’est un symbole fort.» YG

 

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