Georges Maillard, la mémoire vivante du ski aux Paccots

| jeu, 16. Jan. 2014
Georges Maillard est le plus ancien employé de la station veveysanne. Le Châtelois «donne les cannes» depuis soixante-deux ans. Samedi, la station fête officiellement ses 75 ans.

PAR ANGELIQUE RIME


«Ah! Monsieur Maillard est de nouveau là!» Cette phrase, Geor-ges Maillard l’entend chaque jour à l’heure de l’ouverture du domaine skiable des Paccots, lui qui y est présent depuis soixante-deux ans. Le Châtelois de 83 ans est le plus ancien employé de la station, qui fête officiellement samedi son 75e anniversaire (lire encadré). «Mon frère faisait partie du ski-club et il connaissait bien les chefs du monte-pente de Corbetta. C’est comme ça que j’ai pu commencer. Je gagnais environ vingt francs par jour», se rappelle l’agriculteur.
Son premier mandat: contrôler les billets. «En fait, je faisais un peu tout, on aidait comme on pouvait.» Au fil du temps, le Veveysan prend du galon et devient responsable d’une équipe d’ouvriers de la station. Il y travaille à l’année et gère notamment le montage des installations à l’automne et leur démontage au printemps.


Pylônes en bois
En plus de soixante ans de boîte, autant dire que l’esprit du Veveysan regorge de souvenirs. Au moment de les évoquer, Georges Maillard ne sait pas vraiment par où commencer. Il se lance, les yeux légèrement brillants. «Les téléskis étaient loin de ressembler à ceux d’aujourd’hui! Les pylônes étaient en bois. Avec le temps, ils ont pourri et l’alignement des câbles n’était plus assuré. Si bien que le téléski déraillait jusqu’à dix fois par dimanche! Dans les années soixan-te, on les a remplacés par des poteaux en fer.»
Et cet amoureux de la montagne – il mentionne avec fierté qu’on voit le Mont-Blanc depuis sa ferme située au-dessus du lac de Lussy – enchaîne sur le système qui permettait aux skieurs de remonter la pente. Un terrible «aguillage» selon lui. «Ils enfilaient une ceinture avec une poignée en bois dans laquelle on les aidait à passer une corde. Puis nous devions redescendre le matériel. C’est d’ailleurs en ramenant cet équipement que j’ai appris à skier. Avec des skis en douves de tonneaux, sur lesquels on clouait nos chaussures!»
En écoutant Georges Maillard, on fait un saut dans un autre temps. Celui où les employés de la station montaient à pied jusqu’aux Paccots, «une heure et demie avec les skis sur l’épaule» et où des trains remplis d’amateurs de glisse arrivaient en gare de Châtel-Saint-Denis. «Avec dix wagons, pleins à craquer.»


Retraite à 85 ans
Depuis maintenant quarante ans, Georges Maillard est en poste au Pralet, la piste noire de la station. L’horaire est toujours le même: de 9 h à 16 h 30. «Le week-end, nous sommes trois, mais la semaine, je suis seul en bas de la remontée et un collègue est posté en haut.» Un ami plutôt qu’un collègue, malheureusement accidenté cette année. «Nous avons notre petit rituel. Chaque matin, on boit un café giclé avant l’ouverture des installations.»
Car, pendant la journée, les pauses ne sont pas légion. «La saison dernière, sur 95 jours de travail, je n’ai eu le temps de dîner que deux fois», raconte Georges Maillard. L’activité qui l’occupe la plus grande partie de sa journée? «Donner les cannes. J’aime voir quand les gens ont du plaisir, surtout les enfants. Je les pousse dans le dos pour qu’ils attrapent plus aisément l’assiette. C’est d’ailleurs ce qui m’encourage à continuer.» Pour combien de temps encore? «Si ma santé me le permet, je pense travailler jusqu’à 85 ans. Après, j’aimerais consacrer plus de temps à mes deux fils ainsi qu’à mon épouse. Elle le mérite.»

 

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«Sans tapage ni snobisme»
«Le slogan de l’Exposition nationale de 1964 était “Croire et créer”. Aux Paccots, des visionnaires avaient appliqué cette formule vingt-cinq ans auparavant.» Ancien directeur et actuel président de l’école de ski des Paccots, Raoul Colliard salue l’initiative d’une poignée de Veveysans emmenés par Paul Pauli. En 1938, ils ont fondé l’école de ski et investi 55000 francs pour construire le premier monte-pente de la station: celui de Corbetta. Suivra, cinq ans plus tard, le téléski du Pralet et, en 1958, Borbuintze, puis la Cierne, les Vérollys, la Cagne et enfin les Joncs. «Lorsqu’il n’y avait qu’un monte-pente, les skieurs devaient être patients. Ils attendaient, encolonnés, du départ de Corbetta jusqu’à l’actuel hôtel de la Dent-de-Lys!» a raconté Renée Genoud, présidente du conseil d’administration de la société Monte-Pente de Corbetta SA, mardi en conférence de presse.  
Dès le début, les amateurs de glisse venaient majoritairement de la Riviera. Une clientèle pas forcément huppée, commente Raoul Colliard, s’appuyant sur une phrase tirée du libretto édité pour le 25e anniversaire: «Le but est de créer une station sans tapage et sans snobisme.» En septante-cinq ans, quelques skieurs de marque ont pourtant dévalé les pistes des Paccots. «Guy Lux, Daniel Balavoine, Charlotte Gainsbourg, le gouverneur d’Australie-Occidentale et de nombreuses princesses arabes, qui dévalisaient les magasins de sport locaux», énumère Raoul Colliard.  
Appréciée par les célébrités pour sa discrétion, la station l’est aussi pour son côté familial. «C’est notre plus grand atout et nous devons veiller à le conserver», déclare Yves Büchler, directeur de l’Ecole suisse de ski des Paccots, le centre d’enseignement le plus important du canton avec quelque 40000 heures de cours données chaque saison, en grande partie à des enfants. En effet, depuis une quinzaine d’années, le public de la station a considérablement rajeuni. «Une évolution non sans incidence sur les rentrées financières», relève Renée Genoud. Président de l’office du tourisme régional, Michel Maillard ne serait d’ailleurs pas contre l’aménagement d’une piste pour les skieurs plus chevronnés. Quant au projet de liaison avec Moléson et Rathvel, il reste de la musique d’avenir.


Journée officielle des 75 ans  
Car pour l’heure, la station est à la fête, puisqu’elle célébrera officiellement samedi ses 75 ans. «Une course d’estafettes est prévue sur la piste des Joncs. Nous allons également organiser un slalom parallèle à la Cagne et un gymkhana aux Vérollys», explique Yves Büchler. L’accès au jardin de neige sera en outre gratuit. La manifestation pourrait toutefois être déplacée au 8 mars si les conditions d’enneigement ne permettent pas sa tenue. Des informations seront disponibles sur www.esslespaccots.ch. AR

Commentaires

Pourquoi passer sous silence le (DODGE )chainé aux 4 roues a Bouby Yeny et sa luge qui assurait le transport entre la gare de Châtel et la station?

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