Du chocolat d’antan dans la cité comtale

| sam, 19. avr. 2014
Richard Uldry a ouvert sa chocolaterie. Le Vuadensois élabore lui-même son chocolat. En misant sur le haut de gamme et la fabrication à l’ancienne, il entend séduire la clientèle régionale.

PAR JONATHAN DONZALLAZ

Depuis quelques semaines, les gourmands ont un nouveau lieu de pèlerinage: la Chocolaterie de Gruyères, nouvelle enseigne inaugurée par le Vuadensois Richard Uldry, le 1er mars dernier. Situé à l’entrée du bourg médiéval, le commerce attire déjà les premiers curieux par ses effluves chocolatés. Pour le plus grand bonheur du maître des lieux, ravi de concrétiser «un vieux rêve».
Particularité de cette échop-pe: le chocolat présenté sur les rayons est fabriqué par le patron lui-même, jeune quadragénaire. Il faut dire que la passion du chocolat anime ce Glânois d’origine depuis les débuts de son apprentissage, effectué à la boulangerie Dubey-Grandjean, à Romont. «Le projet concret d’une boutique est lui-même vieux d’environ neuf ans», explique ce père de trois enfants. «Bien avant la création de la Maison Cailler à Broc», s’empresse-t-il d’ajouter.
Cailler, le mot est lâché. Car si le problème n’est sans doute pas de faire manger du chocolat aux locaux ou aux touristes, encore faut-il les détourner des grandes marques qui monopolisent le marché. Pour ce faire, l’artisan mise sur diverses niches spécifiques: fabrication à l’ancienne, chocolat haut de gamme, produits sans gluten ou sans lécithine de soja.
En parallèle, l’ancien employé de la Migros a également lancé une meringue chocolatée qui a déjà ses adeptes, et propose encore des bricelets et des chocolats chauds maison. Autant d’articles qui ont un prix, la philosophie de la maison étant de miser sur la qualité des produits. Le patron ne s’en cache pas. «On vient ici pour se faire plaisir, je comprends très bien qu’on ne se ravitaille pas chez moi pour tout le mois!» s’exclame-t-il.
Quand bien même il assure ne pas être en concurrence directe avec les géants de la branche, le commerçant avoue tout de même partir dans l’inconnu. Rares en effet sont les boulangers-pâtissiers à s’être lancés à leur compte en ne misant quasiment que sur le chocolat. Dans le domaine, le Gruérien Fabrice Spicher a compté parmi les précurseurs, avec son entreprise Cacahualt Design, installée depuis 2005 déjà à Vuadens.


Conche sur mesure
Outre une certaine appréhension, Richard Uldry a aussi dû affronter quelques défis techniques de taille pour pouvoir réaliser son chocolat à l’ancien-ne. «Une des idées de base du projet était de se rapprocher du chocolat tel que le fabriquait Rodolphe Lindt à la fin du XIXe siècle», rappelle-t-il. C’est à ce grand nom du chocolat suisse que l’on doit l’invention du conchage, un procédé spécifique d’affinage.
A l’heure de la production de masse, trouver une machine adaptée à une fabrication artisanale n’a pas été chose facile. C’est finalement l’entreprise Zum Wald, dans le Simmental, qui a pu réaliser – sur mesure – la modeste conche visible à l’entrée du magasin, qui brasse inlassablement ses 11 kilos de masse chocolatée. Contre 300 kilos de capacité pour les plus petites machines industrielles.


Atelier pédagogique
Après avoir résolu un à un les différents problèmes, Richard Uldry a eu la chance de dénicher «tout à fait par hasard» un local libre à l’entrée de Gruyères. Un emplacement de choix où le commerçant se sent très bien accueilli, même si d’un point de vue comptable, les débuts se font en douceur. «Il faudra que le chiffre d’affaires double par rapport au premier mois pour faire tourner la boutique», avoue-t-il.
Si la clientèle répond présent, l’artisan espère bien faire son nid dans la cité comtale. Jamais à court d’idées, il envisage même la mise sur pied, dès cet été si possible, d’un espace où les visiteurs pourront découvrir la fabrication du chocolat et participer à divers ateliers.
Un projet pédagogique cher au maître chocolatier, qui enseigne déjà à temps partiel à Genève auprès des apprentis boulangers-pâtissiers. «J’ai vraiment à cœur de transmettre ma passion», confirme Richard Uldry, certainement moins excentrique que Willy Wonka, mais animé de la même flamme que le héros de Roald Dahl.

 

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L’art délicat du lapin de Pâques
La gestation du lapin de Pâques (Lepus paschalis) est sans doute l’une des plus complexes du règne animal. A force de côtoyer chaque printemps ce curieux mammifère, Richard Uldry en est cependant devenu l’un des spécialistes les plus compétents. Il est donc tout indiqué pour nous révéler les détails de sa fabrication.
Première étape du processus, la sélection de la matière première. «Les fèves avec lesquelles je travaille proviennent principalement d’Amérique centrale, le berceau historique du cacaoyer», souligne l’artisan. Chaque provenance a ses propres caractéristiques gustatives, avec lesquelles il faut composer au mieux. Richard Uldry s’est d’ailleurs envolé jeudi pour São Tomé, afin de parfaire sa connaissance du cacao au contact des cultivateurs locaux.
En général, le Vuadensois n’intervient cependant pas directement dans cette première phase. Les fèves, contrôlées par des experts à leur entrée en Suisse, arrivent en effet déjà torréfiées à Gruyères, sous forme de granulés. Elles sont alors mixées, puis broyées à plusieurs reprises sous des rouleaux en granit. La masse obtenue est ensuite versée dans la conche, qui affine le chocolat pendant 48 à 72 heures, à une température de 80 degrés.
Enfin, le chocolat est tempéré en vue de sa mise en plaque ou en moule. «Cette étape se joue au dixième de degré près! Le risque est que le beurre de cacao ressorte en surface, donnant un aspect grisâtre au chocolat». Une teinte poivre et sel peu recherchée par nos fringants lapins. JD

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