Planter des arbres pour recréer des paysages perdus

| mar, 10. juin. 2014
De 15 millions d’arbres à haute-tige en Suisse en 1950, on est passé à 2,3 mio aujourd’hui. Pro Natura Fribourg conduit un grand projet de plantation. De son côté, le Parc naturel régional poursuit son action: même but, mais modalités différentes.

PAR JEAN GODEL

En un demi-siècle, les vergers à haute-tige de Suisse ont perdu 80% de leur substance, passant de 15 millions d’arbres en 1950 à 3 mio en 1991. Entre 1994 et 2004, 75000 arbres disparaissaient chaque année. Aujourd’hui, on n’en compte plus que 2,3 mio. Pour contrer cette tendance, il n’y a pas d’autre solution que de replanter.
L’an dernier, Pro Natura Fribourg a lancé un ambitieux projet de plantations d’arbres fruitiers à haute-tige en Singine et dans le Haut-Lac. Une idée qui a germé chez des agriculteurs membres des réseaux écologiques de la zone et que Pro Natura, vu l’engouement des participants, a reprise au vol pour en conduire la concrétisation.
Démarrée au printemps 2013, l’action a abouti à la plantation de 1011 arbres. Forte de ce succès, l’association a décidé d’élargir son offre à tout le canton et recherche donc des propriétaires de terrain et des agriculteurs intéressés à réhabiliter d’anciens vergers ou à en créer de nouveaux. L’objectif pour le Fribourg francophone a été fixé à 2000 arbres.


Contrat de vingt ans
Le principe: des jeunes plants sont fournis pour un prix modique (entre 20 et 30 francs la pièce, selon le résultat de la recherche de fonds en cours) et un contrat est signé entre Pro Natura et les propriétaires, contrat qui règle pour les vingt premières années l’entretien et la conservation des arbres. Pour ceux qui le souhaiteraient, des cours de plantation et de taille seront organisés en collaboration avec l’Institut agricole de Grangeneuve.
Un certain nombre de règles sont fixées. Les arbres (dix au minimum par contrat) doivent être plantés hors zone à bâtir. Dès vingt arbres, la plantation doit être constituée d’au moins trois variétés de fruitiers. Des distances minimales entre les arbres et en lisière de forêt sont aussi prévues.
L’agriculteur (ou le propriétaire) établit la liste des variétés à planter avec l’aide du biologiste responsable du projet, de même que l’emplacement de la plantation. Pro Natura fournira avant tout des variétés locales d’arbres fruitiers, si possible des espèces rares soutenues par Pro Specie Rara.
«L’idée est de recréer des paysages perdus, mais aussi des habitats pour de nombreuses espèces animales ou végétales», résume Yolande Peisl-Gaillet, chargée d’affaires chez Pro Natura Fribourg. Ces vergers, allées et autres arbres isolés qui, autrefois, constituaient l’identité paysagère de nos campagnes, ont aujourd’hui, au pire, disparu, au mieux sont très lacunaires. Il s’agit donc de «compléter l’existant et de recréer l’inexistant», écrivait Pro Natura l’an dernier, au moment de lancer son projet en Singine.


Paiements directs en vue
De nombreux insectes et invertébrés trouvent aussi des conditions idéales dans de tels habitats. Une microfaune qui forme une source alimentaire précieuse pour d’autres espèces. Jusqu’à la couronne des arbres qui offrent un refuge et des lieux de nidification appréciés par différentes espèces d’oiseaux.
Ainsi devrait-on bientôt voir dans ces vergers chardonnerets élégants, grimpereaux des jardins, rouges-queues à front blanc et autres torcols fourmiliers, espère Pro Natura. Pareille biodiversité pourrait même être renforcée si la prairie sous le verger est exploitée de façon extensive et si une jachère ou une haie se trouvent dans les parages.
Enfin, les agriculteurs qui participent à ce projet pourront inscrire leur plantation d’arbres comme élément d’un réseau écologique existant, de même que comme contribution à la qualité écologique de leur domaine. Ce qui leur donne droit à des paiements directs de la Confédération. «Leur travail en faveur de la biodiversité est ainsi dédommagé», écrit Pro Natura. A ce jour, des promesses de plantation de plus de 500 arbres ont été enregistrées. Les inscriptions sont ouvertes au moins jusqu’en septembre prochain.


Info sur www.pronatura-fr.ch

 

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Le projet du PNR a déjà cinq ans

De son côté, le Parc naturel régional (PNR) Gruyère Pays-d’Enhaut poursuit son projet vergers à haute-tige, débuté en 2008, et qui s’adresse à toute personne disposant d’une parcelle adaptée à la plantation d’un tel arbre. Ceci, bien sûr, sur le seul périmètre du Parc. Son principe en est toutefois différent. Le Parc propose un forfait comprenant la fourniture de l’arbre et sa taille pendant cinq ans. Le forfait s’élève à 160 francs par arbre, le solde étant pris en charge par le PNR. Là aussi, un contrat est signé par lequel le propriétaire s’engage à soigner correctement le jeune plant pendant cette durée. Le Parc, lui, mandate des professionnels pour l’entretien des plants. Des cours de taille sont également offerts.
«Nous ne fournissons que des variétés anciennes inventoriées par le Parc sur son territoire et obtenus par des greffons prélevés sur des arbres existants», précise Patrick Rudaz, coordinateur du PNR. Actuellement, plus de cent variétés ont été identifiées. Chacune possède sa description. Le Parc met aussi à disposition des fiches techniques pour la plantation et l’entretien des arbres.
A la fin 2013, 311 arbres avaient été plantés, dont 65 rien que l’an dernier. L’idée, ajoute Patrick Rudaz, est aussi qu’après trois à cinq ans, une valorisation des fruits obtenus puisse intervenir. «Nous travaillons sur ce projet, il y a déjà quelques pistes qui se dessinent.» Une valorisation à laquelle, idéalement, les participants au projet de Pro Natura devront aussi prendre part. JnG


Infos sur www.gruyerepaysdenhaut.ch

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