Trouver une solution aux listes d’attente pour les traitements

| sam, 12. jui. 2014
La Glâne a connu et connaît encore des problèmes de prise en charge des enfants. Pour rendre plus attractifs les postes de logopédiste, des locaux adaptés seront créés.

PAR SOPHIE MURITH

Si la pénurie de logopédistes se normalise en Glâne, «le système reste fragile», de l’aveu même du directeur du Service auxiliaire scolaire (SAS) du district, Jean-Luc Gross. «Nous avons presque complété toute notre dotation et obtenu un poste supplémentaire en 2013. Sauf nouvelle défection, les listes d’attente vont se résorber, mais il y a deux mois, il nous manquait la moitié de notre effectif pour la rentrée.»
Un congé maladie, impossible à remplacer en 2013 – faute de candidat – a eu des répercussions importantes sur les listes d’attente pour la prise en charge des élèves glânois détectés (lire ci-dessous). Avant même les nouveaux signalements qui ne manqueront pas d’arriver avec la rentrée et les classes supplémentaires créées, il faut, par exemple, attendre neuf mois pour un traitement à Romont, une zone particulièrement engorgée. Egalement responsable de la prise en charge pour la Veveyse, Jean-Luc Gross assure que les problèmes pour recruter des spécialistes n’y sont pas aussi importants qu’en Glâne.
La raison principale de ses soucis? Le manque d’attractivité du poste. «Nous avons une mauvaise réputation», avoue Jean-Luc Gross. Les logopédistes visitent à ce jour plus de 25 communes glânoises. Les locaux mis à disposition sont souvent inadaptés: container, salle des maîtres, dans certains cas.
Dans un marché très tendu, où les salaires sont quasiment similaires dans tous les cantons, la qualité de vie professionnelle devient un critère de choix prépondérant. «Je mets des annonces dans toute l’Europe francophone. Les candidats ont souvent plusieurs postes à choix. Nous sommes en concurrence avec des villes comme Vevey ou Neuchâtel. Si nous ne changeons rien, nous allons droit dans le mur.»


Mettre fin à l’itinérance
Pour résoudre ces problèmes d’itinérance et d’attractivité, le préfet de la Glâne, Willy Schorderet, appelle de ses vœux la création de quelques locaux fixes. Il se dit prêt à convaincre les communes de mettre à disposition des endroits appropriés à ces permanences.
Bémol à cette proposition: cela sera dès lors aux enfants de se déplacer. Un argument botté en touche par le préfet. «Le temps que les logopédistes passent sur les routes, elles ne le passent pas à traiter des enfants. Le temps à disposition sera plus important.»
Pour Jean-Luc Gross, les déplacements imposés aux enfants ne sont pas insurmontables. «Les distances ne sont pas très importantes. En plus, effectuer ces trajets permettra une plus grande implication des parents dans les thérapies. Cela marche d’ailleurs très bien avec la psychomotricité.»
Quant aux coûts de location, dont il faudra déduire les frais actuels de déplacement, ils pourraient être pris en charge par le pot commun auquel cotisent les communes glânoises pour financer le SAS, envisage Willy Schorderet.
Mais pour Jean-Luc Gross et ses collègues, il est aussi nécessaire de former plus de logopédistes pour réduire la pénurie. Actuellement, seules les Universités de Genève et de Neuchâtel dispensent le cursus. Après un bachelor de trois ans, les 25 meilleurs étudiants sont acceptés en master, les autres sont laissés sur le carreau. «Cela décourage certains de se lancer dans cette profession. Même s’il existe des débouchés en psychologie.»
Chaque année, un maximum de 50 logopédistes entrent ainsi sur le marché suisse romand «Trop peu, estime Jean-Luc Gross. Cette profession est presque exclusivement féminine, ce qui implique souvent des absences lors des congés maternité ou des temps partiels.»
Dans un courrier envoyé au conseiller d’Etat Jean-Pierre Siggen, la Conférence fribourgeoise des directeurs et responsables des Services auxiliaires scolaires du canton de Fribourg a demandé la création d’une filière de formation francophone au sein du Département de pédagogie curative et spécialisée de l’Université de Fribourg. Un cursus en allemand y est déjà dispensé.


Réorganisation générale
«Ce n’est pas une bonne idée, estime Fouzia Rossier, cheffe du Service de l’enseignement spécialisé et des mesures d’aide, qui estime faible le temps d’attente dans le reste du canton. Il n’y a déjà pas suffisamment de places de stage pour les filières neuchâteloises et genevoises.» Pour la responsable, démissionnaire, davantage de personnes formées ne répondent pas au problème de fond. «L’organisation doit être revue. La logopédiste est une thérapeute. Elle ne doit pas faire de soutien scolaire ou intervenir lors de difficultés à l’apprentissage du français.»  Selon elle, les habitudes devront donc changer pour créer davantage de disponibilité aux traitements spécifiques. Et cela prendra du temps. «Il faudra au moins compter une génération.»
Fouzia Rossier émet une autre piste. «Actuellement, il existe une grande liberté dans les taux d’occupation. Après sondage dans les institutions du canton, nous avons remarqué que certaines logopédistes sont employées parfois à 15%. Comme pour les enseignants, il ne faudrait pas descendre au-dessous de 40% pour ne pas gaspiller la formation de ces spécialistes.»

 

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Histoire de mettre fin au moratoire
Le préfet de la Glâne s’est fendu, en mai, d’un courrier au conseiller d’Etat Jean-Pierre Siggen pour lui faire part des difficultés que rencontraient les petits Glânois à être pris en charge pour des traitements de logopédie. Dans sa réponse datée du 22 juin, Jean-Pierre Siggen admet que la situation à laquelle le Service auxiliaire scolaire de la région est confronté «est connue depuis plusieurs mois» par ses services. «Si la situation devait se péjorer gravement pour une raison ou une autre, nous tâcherions de trouver des solutions avec le directeur du Service auxiliaire scolaire.»
Pas satisfait de la réponse obtenue, Willy Schorderet compte bien lui réécrire, voire intervenir au Grand Conseil par le biais des députés glânois, pour demander, notamment, de mettre fin au moratoire sur l’ouverture des cabinets privés de logopédie. Une limitation entrée en vigueur en juin 2013 (La Gruyère du 5 novembre 2013) afin de juguler les dépenses de l’Etat en cette période d’économies. Jusque-là, les logopédistes indépendantes absorbaient une partie des listes d’attente. «Les délais sont trop longs, alors qu’une prise en charge rapide permet un traitement plus rapide, s’insurge Willy Schorderet. Ces délais aggravent souvent les cas. C’est inquiétant.»


Traitements interrompus
A l’automne 2013, le préfet avait reçu des plaintes officielles des communes du district dont Torny, Villorsonnens et Châtonnaye. Ces dernières n’étaient plus desservies, faute de logopédistes disponibles. «L’inertie du système est immense, il est très compliqué de déployer les logopédistes dans une autre région en cas d’absence d’une thérapeute, explique Jean-Luc Gross, directeur du Service auxiliaire scolaire de la Glâne.
«Les traitements des élèves ont été interrompus, explique Jacques Maradan, conseiller communal responsable des écoles, à Châtonnaye. Nous avons défendu nos intérêts en intervenant auprès du préfet pour qu’il agisse comme bras de levier auprès du canton.» Pour protester, la deuxième facture 2013 n’a pas été payée dans les temps par Châtonnaye. «Nous avons refusé de la régler tant que la situation ne s’était pas améliorée.» Devant le manque d’arguments juridiques à sa disposition pour justifier un non-paiement, la commune s’est finalement acquittée du montant au début 2014. SM


 

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