Dernière saison théâtrale pour La Gare aux sorcières

| jeu, 21. aoû. 2014
Encore une saison pour la Catillon. Après quoi, elle tirera le rideau sur quatorze années de programmation théâtrale. Explications.

PAR YANN GUERCHANIK

Quatorze ans de vue plongeante sur le drame et la comédie, de vertige pour un vers ou une tirade, de cordée entre spectateurs et comédiens. Depuis 2001, on pouvait monter à Moléson pour aller au théâtre. Encore une saison et ce sera la fin. En présentant la programmation 2014-2015, la Catillon annonce qu’elle tire le rideau sur sa saison culturelle. Avec des trémolos dans la voix.
«C’est la dernière… souffle Monique Marmy. La salle existera toujours et nous continuerons d’y présenter les productions de la Catillon. Mais on ne programmera plus de spectacles professionnels.» La décision a germé ce printemps.
«C’est d’abord très compliqué d’avoir une saison coupée en deux, explique Vincent Brodard, également membre du comité de programmation. Nous partageons la salle avec le Centre touristique Gruyères-Moléson-Vudalla (GMV) qui l’utilise du début décembre jusqu’à la fin mars. Sachant que juin est un mois difficile et que la saison s’interrompt en juillet-août, il a toujours été difficile de compter sur la disponibilité des troupes.»
Faire venir les compagnies est une chose, faire venir le public en est une autre: «Il faut les faire monter, les gens!» Catherine Scyboz rappelle volontiers «qu’au moindre flocon de neige, beaucoup téléphonent pour demander si la soirée aura lieu». Les premières années, La Gare aux sorcières a connu une fréquentation qui allait crescendo. Depuis, le nombre de spectateurs est stable… mais la salle est rarement pleine.


De guerre lasse
«En moyenne, 60% des 120 places sont prises, relève Brigitte Rime. Les bons soirs représentent 80 à 100 spectateurs, les mauvais une trentaine.» Résultat des courses: les budgets – autour des 30000 francs – sont rarement équilibrés. «Chaque année, il faut puiser un peu dans la caisse de la Catillon», se dé-sole l’équipe de programmation. Avec ses spectacles comme Jehan l’éclopé ou Lysistrata, la société s’est constitué un pécule appréciable pour boucler les fins de saisons difficiles.
«C’est dommage, soupire Vincent Brodard. D’autant qu’on n’est jamais tombés dans la facilité. On a toujours proposé des spectacles de qualité et l’on regrette vraiment de ne pas être parvenus à attirer plus de monde.» Rappelons que la Catillon regroupe 50 membres, qui se déplacent comme un seul homme pour «les spectacles maison», mais qu’ils se font plus rares le reste du temps.
L’équipe s’est résolue de guerre lasse. «Cela devenait très complexe d’intégrer le spectacle de la Catillon et celui des enfants dans une saison si courte, résume Vincent Brodard. Et tout cela, pour une salle dégarnie…» Assez pour rendre les comités plutôt pénibles. Surtout que la troupe connaît désormais des répétitions moins confortables. Ces dernières ont traditionnellement lieu durant la pause hivernale. Or, depuis deux ans, le bar «après-ski» investit une bonne partie des locaux.


Avenir incertain
«Avec les GMV, nous avons une convention contractuelle jusqu’en 2016», stipule Vincent Brodard. Après, c’est l’inconnu. Les temps semblent éloignés où le rêve battait son plein. C’était en 2007: une cinquantaine de bénévoles retroussaient les manches pour installer un foyer digne de ce nom, avec des loges et des toilettes. Pour accueillir aux mieux les compagnies et les spectateurs au Moléson.


Rien n’est arrêté
Du côté des GMV, Antoine Micheloud assure qu’il aura à cœur de «respecter un partenariat bâti depuis des années avec la Catillon». Le directeur confie toutefois que différentes réflexions ont été menées sur l’affectation de l’endroit. «Ceci, dans le cadre d’un nouveau plan d’aménagement que nous allons dévoiler en septembre. Mais rien n’est arrêté pour le moment.» En attendant, le rideau n’est pas encore tombé sur La Gare aux sorcières: il reste une saison de théâtre à vivre.

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Pour finir sur une note légère


Une dernière saison joyeuse, colorée, «plutôt décontractée», selon le comité de programmation de La Gare aux sorcières. Quitte à pleurer sur son sort, autant le faire en rigolant, affirme le titre du spectacle consacré à Fréhel…
Au total, six compagnies professionnelles figurent au programme 2014-2015 de la salle de Moléson, venues de Suisse, de France et de Belgique. Ouverture le 20 septembre, avec un «café complet-spectacle»: une collation sera en effet servie durant Foyer moderne, une pièce burlesque découverte à Nuithonie lors d’un midi-théâtre. Ambiance années 1960: les spectateurs se retrouvent à une conférence sur l’éducation familiale d’une certaine Madeleine Cuisset. Le texte est tiré d’un vrai Guide pratique d’éducation familiale, édité en 1965.
Le 18 octobre, la Compagnie du Sans-Souci (Paris) proposera Album de famille. «Mon coup de cœur du Festival d’Avignon l’année passée», relève Monique Marmy, l’une des programmatrices. Quatre comédiens-musiciens-chanteurs évoquent l’histoire d’une famille, de la conception du bébé à la mort. Un spectacle tout public que Monique Marmy qualifie de «drôle, pétillant, émouvant…»
Trois ans après Le cheval qui murmurait à l’oreille des Zindésirables, le duo belge formé de Marc Andreini et Jean-Yves Girin sera de retour à Moléson le 29 novembre. Les Zindésirables, «maîtres de l’absurde visuel» (dixit le programme officiel), proposeront cette fois-ci Effets indésirables. Personne du comité ne l’a vu, mais, «connaissant la troupe, nous savons que ce sera drôle et de qualité», souligne Catherine Scyboz, également programmatrice.


Un conte, Fréhel et un clown
Au printemps, la compagnie neuchâteloise De Facto interprétera Jérémy Fisher (le 9 mai). Ce conte moderne de Mohamed Rouabhi, publié en 2007, suit la trajectoire d’un enfant qui se transforme peu à peu en poisson. «C’est une histoire sur la différence, avec une mise en scène vraiment chouette», résume Catherine Scyboz.
La chanteuse Bonbon fera revivre la grande Fréhel, le 6 juin, avec Quitte à pleurer sur son sort, autant le faire en rigolant. Le spectacle, multirécompensé, raconte l’histoire de la chanteuse de Tel qu’il est et de La java bleue, disparue en 1951. Accompagné d’un accordéoniste, Bonbon est «presque une caricature de Fréhel, avec la même gouaille», selon Monique Marmy.
Cette ultime saison s’achèvera le 20 juin avec Tout un monde, un monologue clownesque de et par Hélène Ventoura. Cette ancienne élève de l’école de cirque Annie Fratellini est partie de l’histoire de Cendrillon qu’elle laisse légèrement déraper. EB

www.lagareauxsorcieres.ch




 

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