«Bulle, victime de son succès et de l’euphorie économique»

| jeu, 13. nov. 2014
Les autorités répondent aux critiques de la nouvelle association de citoyens. Un concept paysager est à l’étude depuis un an. Une nouvelle étude sur le trafic sera proposée au Conseil général en décembre.

PAR SOPHIE ROULIN

Les Bullois ne reconnaissent plus leur ville. Plus de 150 d’entre eux étaient réunis lundi soir pour soutenir la création d’une association visant la défense des espaces verts. Reproches et critiques se font entendre. Avec en ligne de mire les autorités, qui auraient une «attitude passive», un «manque de vision», voire un «non-respect des plans directeurs». Autant d’accusations qui ne pouvaient rester sans réponse de la part des concernés.

En chantier, partout
Entre les différents projets immobiliers (notre édition de mardi), les mesures d’accompagnement de la H189 qui ne sont pas terminées et la mise en place du chauffage à distance, des chantiers occupent tous les secteurs de Bulle. «Ça donne une impression de chaos», admet Yves Grandjean. Mais le conseiller communal en charge de l’aménagement réfute l’accusation de passivité des autorités.
«Nous avons été l’une des premières villes dotées d’un Plan d’aménagement local (PAL) compatible avec la nouvelle Loi fédérale sur l’aménagement (LAT). Les autorités sont là pour planifier le développement», souligne Yves Grandjean. «Ce n’est pas un but en soi que de voir la ville passer à 35000 habitants.» Et, comme la commune n’est pas propriétaire des terrains en zone à bâtir, ce sont des propriétaires privés qui décident de leur valorisation et du calendrier.

La vitesse du développement
«Le détonateur a été le classement de Bulle en tête des cités romandes où il fait bon vivre, en 2004, note Yves Grandjean. Depuis, tout va très vite. Bulle a été un peu victime de son succès.» La croissance de la ville n’a plus connu de ralentissement, soutenue encore par l’euphorie économique ambiante. «La vitesse est un facteur que l’on ne maîtrise pas, reconnaît également Yves Menoud, syndic. Au lieu de prendre quinze ans, comme escompté dans la planification, on voit qu’en cinq ans, beaucoup de zones se développent. Empêcher les gens de construire quand un terrain est en zone serait une atteinte à la liberté.»
Les conseillers communaux se rappellent aussi d’un temps, à la fin des années 1980, où la ville devait investir elle-même dans des immeubles pour que les choses bougent. Bulle n’a pas toujours été aussi attractive qu’aujourd’hui.

Les MEP
Depuis deux ans, les mandats d’étude parallèle (MEP) sont devenus l’un des leviers d’action importants pour les autorités. «Ils permettent une approche globale d’un quartier, souligne Yves Grandjean. On peut tenir compte des contraintes imposées par les lieux, mais aussi avoir des discussions poussées autour d’une certaine culture du bâti.» Ce processus fait en effet appel à des professionnels qui réfléchissent séparément, puis ensemble, avec le promoteur et la commune, aux solutions à apporter à un projet. «On a un collège de gens compétents qui aboutissent à une conclusion équilibrée, à un consensus», note Jean Hohl, chef du département technique.

Espaces verts
Conscient que les espaces verts et leur développement sont essentiels pour la qualité de vie des habitants, la ville y travaille. «Un concept paysager est à l’étude, mais il est encore trop tôt pour le rendre public, révèle Yves Grandjean. Des propriétaires privés sont concernés et tous n’ont pas encore été contactés.» Les parcs existants seront réhabilités et des plantations sont prévues.
«Le souhait est d’avoir des présences vertes dans tous les quartiers qui puissent ensuite être reliées par des axes de mobilité douce», indique Eric Pichonnaz, architecte de ville. Il faudra du temps pour que les choses se mettent en place et que la végétation grandisse. «Regardez le tilleul, glisse Yves Grandjean. Aujourd’hui, il est magnifique, mais il a fallu dix ans pour qu’il retrouve son envergure.» Et de rappeler la prise de tête et de becs qu’avait suscité le remplacement du vieil arbre.

Places de travail
Autre axe sur lequel les autorités mettent beaucoup d’énergie: la recherche de terrains pour de nouvelles zones industrielles. «On s’est battu pour trouver une solution le long de l’autoroute, argumente le syndic. Elle est à bout touchant. On se bat aussi pour débloquer la zone de Planchy Sud.» A la clé, des implantations ou des agrandissements d’entreprises et la création d’emplois. «Même si la croissance n’est pas celle que connaît l’immobilier, l’économie se développe à Bulle, au moins aussi vite que dans la moyenne suisse.»

 

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La charge de trafic inquiète
Un crédit d’étude concernant les charges de trafic sera en principe demandé lors de la séance des budgets du Conseil général, en décembre. «Sur certains axes, on est quasiment aux mêmes charges qu’avant l’ouverture de la H189, indique le conseiller communal Yves Grandjean. Selon les études préalables, on aurait dû retrouver ces chiffres dans dix ans.» De quoi inquiéter les autorités.
«Les enjeux de la mobilité sont cruciaux, note Eric Pichonnaz, architecte de ville. Ils demandent des adaptations de chacun et sont perçus comme des contraintes.» Les gens changent en effet difficilement leurs habitudes. «Durant les travaux à la rue de Gruyères, les charges de trafic n’ont pas bougé, souligne Yves Grandjean. Malgré la déviation par la rue du Vieux-Pont et les complications que cela impliquait.»
Le point noir se situe entre le giratoire de la Migros et celui de l’arsenal. «Pour l’instant, la surcharge est ponctuelle, ajoute Yves Grandjean. Mais si le trafic augmente encore, on aura un problème.» D’autant que le projet du plateau de la gare, avec ses 2000 habitants et ses 600 emplois potentiels, ne va pas arranger les choses. SR

 

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L’association citoyenne a fait mouche lundi soir
Entre 150 et 200 Bullois étaient réunis lundi soir au Cheval Blanc. L’Association pour la défense d’espaces verts dans la commune de Bulle (ADEV) s’est constituée devant un public excédé par le «bétonnage de la ville». Désignés coprésidents ce soir-là, Patrice Morand et Nicolas Pasquier se sont dits émus devant «tant de soutien». Accompagnés de Gérald Gobet et Eric Barras, les quatre fondateurs de l’ADEV ont largement exposé leurs objectifs (La Gruyère de lundi): la sauvegarde des espaces non construits réservés aux activités de détente et des espaces paysagers à l’intérieur ou à proximité de la ville. Ils ont également fait connaître leur opposition à la construction de trois immeubles sur le terrain de l’ancienne entreprise Bultech, en face du stade.
Conquis, le public a pu s’exprimer à son tour, pointant du doigt les promoteurs et le Conseil communal (lire les réactions ci-contre). Tandis que certains appelaient à manifester sur les lieux de construction ou à étendre le vent de révolte à toute la Gruyère, d’autres évoquaient des résolutions plus spécifiques. Au nom du Groupe de réflexion citoyen, Jacky Brandt a notamment rappelé son souhait de voir le Conseil communal se professionnaliser, regrettant qu’il faille attendre la législature 2021 pour cela. Quant aux membres de l’ADEV, ils ont délimité leur action. Celle-ci consiste avant tout en une pétition lancée à l’occasion de l’assemblée. Reprenant les principaux objectifs de l’association, elle devrait circuler jusqu’à la fin de l’année. Lundi soir, tout le monde espérait qu’elle se gonfle de paraphes, de manière à représenter «une pression populaire incontournable». YG

 

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