La qualité sans concession

| mar, 09. déc. 2014
No1 en Suisse depuis peu, le gruyère veut poursuivre sur sa lancée. Pour assurer la qualité de son produit, l’Interprofession serre la vis dans le contrôle du lait. Interview de son directeur, Philippe Bardet.

PAR JEROME GACHET

Les temps sont durs, même pour les fromages. Et pourtant, le gruyère AOP continue à tirer son épingle du jeu. Pour renforcer sa position, la filière met en place un nouveau système plus contraignant de paiement du lait dès le 1er janvier. Quelques dents risquent de grincer… Directeur de l’Interprofession du gruyère (IPG), Philippe Bardet explique les tenants et aboutissants de ce changement.

En quoi consiste ce nouveau schéma de paiement du lait?
Le cahier des charges, qui date de la création de l’Interprofession du gruyère en 2001, n’est pas modifié. C’est la manière d’appliquer le schéma qui change. Comme toujours au sein de l’IPG, il a été accepté par tous les partenaires (affineurs, fromagers et producteurs). Jusque-là, nous ne pouvions jouer que sur une différence de deux centimes, ce qui ne s’avère pas assez incitatif.

Vous pourrez payer jusqu’à 48 centimes de moins par litre, qui se situe actuellement autour de 85 centimes. C’est énorme!
Oui, c’est vrai, mais c’est une déduction maximale théorique. Cette sanction ne sera jamais appliquée.

Pourquoi en êtes-vous si sûr?
Ce nouveau système est mis en place pour régler les problèmes de qualité récurrents. Un paysan qui n’a jamais connu de difficultés ne verra pas de différence. En revanche, celui qui rencontre régulièrement de gros problèmes va avoir peur parce qu’il aura ces 48 centimes dans la tête. Le but sera d’instaurer un dialogue entre le producteur et la fromagerie, chargée de faire appliquer le système. Le but sera de l’aider à résoudre son problème, par exemple au niveau de son système de traite. Tout sera fait pour éviter cette pénalité de 48 centimes. Dans les faits, la sanction, progressive, devrait atteindre 12 centimes par litre au maximum.


Pour en arriver là, vous avez dû rencontrer des problèmes, non?
Il y a deux ans, nous avons effectivement connu quelques soucis. Les consommateurs n’ont rien aperçu, que ce soit au niveau de l’hygiène ou de la qualité. Si problème il y a, il est détecté en amont et le fromage n’apparaît pas sur le marché. Il est destiné à d’autres usages comme l’affourage des cochons ou est éliminé, dans moins de 1% des cas. En l’occurrence, certains fromages ne s’affinaient plus normalement après quelques mois. Un lait pas propre peut en être la cause. Il y avait le risque que la qualité 1A – la meilleure – diminue au profit de la qualité 1B (fromage râpé ou mélange de fondue). Nous avons donc simplement voulu maintenir la qualité de notre produit par un contrôle renforcé du lait.

L’année 2014 s’achève. Quel bilan tirez-vous?
Pour la production, nous nous situerons au niveau des quantités attribuées, à savoir 30000 tonnes. Avec la météo difficile de cet été, nous aurions pu nous attendre à une baisse, mais cela n’a pas été le cas.

Comment l’expliquez-vous?
La météo rend certes difficile les conditions de travail, mais a finalement peu d’impact sur la production. Mais une année sèche et chaude peut affecter davantage la qualité et également nuire à la consommation.

Et pour la vente?
A fin octobre, nous avons battu un record au niveau de l’exportation, tandis que le marché suisse est stable.

Le gruyère progresse à l’étranger alors que, d’après les dernières données, la branche fromagère helvétique est en régression d’environ 5%… Comment l’expliquez-vous?
Le gruyère reste un produit attractif pour la grande distribution. Il fait, semble-t-il, partie du panier de base du consommateur lambda. La qualité est notre priorité.

Ce qui n’a pas été le cas de tous les fromages suisses…
Il y a trente ans, l’emmental a décidé d’affiner ses fromages de façon plus simple dans des caves sèches. Une décision qui, sur le moment, a satisfait tout le monde, mais qui a tué une partie de la différenciation du goût de l’emmental. Aujourd’hui, la filière le paie très, très cher. Les ventes sont passées de 55000 à 22000 tonnes.

Le gruyère est le fromage suisse No1 depuis quatre ans avec 30000 t tous marchés confondus. Un but?
Non, même si cela fait plaisir. D’ailleurs, si nous sommes No1 c’est parce que l’emmental a baissé. Mais oui, nous voulons progresser.

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