Cet été, les sapeurs-pompiers versent des litres de sueur

sam, 25. jui. 2015

Pour l’instant, la canicule n’a pas multiplié les sorties du Corps de sapeurs-pompiers Grevîre. Mais les interventions sont très pénibles. A Moléson et à la forêt de Sautaux, les combattants du feu ont frôlé la syncope. Des mesures supplémentaires ont été prises pour faire face à la situation exceptionnelle.

PAR YANN GUERCHANIK

Un mégot de cigarette suffit à déclencher un incendie. La mise en garde est coutumière dans le sud de l’Espagne ou en Californie. Cet été, elle est valable chez nous. «Je pense qu’on en est effectivement là, confie Cédric Dématraz. Malgré des averses ces derniers jours, les champs et les sous-bois sont encore très secs.» Le commandant du Corps de sapeurs-pompiers intercommunal Grevîre en a fait l’expérience il y a une semaine, lors d’un incendie qui s’est déclaré au bois de Sautaux.
Pour autant, les interventions ne sont pas plus nombreu­ses que d’habitude. Pas encore. «Les paysans se sont mis à battre les champs, constate Stéphane Rauber, trente-deux années de pompier au compteur à 51 ans. La situation pourrait devenir plus critique: il suffit d’une machine qui surchauffe, d’une étincelle qui jaillit.» Et puis le 1er Août approche: «Même si les feux d’artifice sont prohibés, il y a toujours quel­ques personnes qui passent outre à l’interdiction.»
Les 80 pompiers du CSPi Grevîre (Gruyères, Botterens, Broc et Le Pâquier) s’affairent en moyenne entre 40 et 50 fois par année. Mais cet été, ils ont affaire à un feu qui les consume de l’intérieur. C’est qu’ils doivent agir par 35 degrés avec des combinaisons qu’on jurerait faites pour une expédition polaire. Une tenue qu’il faut enfiler dès la sortie de la caserne à Broc.
«En route, en cas de feu d’habitation par exemple, il nous faut encore engager la protection respiratoire», relève Stéphane Rauber. Des kilos d’habits et de matériel à se mettre sur le dos quand la plupart portent un short sur les terrasses comme au boulot. Dans cette fournaise qui leur colle à la peau, dans ce thermos, les pompiers versent des litres de sueur. «Dans les bottes, il y a ça de flotte», signale Cédric Dématraz en espaçant le pouce et l’index d’un bon centimètre.
Et cela ne fait que s’ajouter à tout le reste. Les pompiers volontaires ne patientent pas au frais dans une caserne, prédisposés à l’intervention. Ils bossent comme Monsieur et Madame Tout-le-Monde. «Certains ont passé des heures sur une machine agricole ou sur le bitume à marquer les routes lorsqu’on les alerte pour un incendie… » C’est un feu de l’enfer qui attend alors le sapeur, même quand on est une armoire à glace comme Stéphane Rauber.


Jusqu’à l’évanouissement
«Les premiers instants sont les plus difficiles, explique le Gruérien. Il y a le stress qui fait monter encore la température. Et puis, toute une série d’actions décisives à mener durant les premières minutes, notamment les courses vers les sources d’eau. L’effort est continu. Normalement, votre réaction serait de ralentir. Mais, dans le cas d’un incendie, vous n’êtes plus aussi conscient, vous poussez au maximum.»
Le feu de l’action. Sans parler du fait qu’on ne retire pas sa lance à un pompier volontaire si facilement. Son engagement tout entier est dirigé vers ce moment où il devra intervenir. Lorsque enfin il peut servir, difficile de l’arrêter. C’est tout le problème du commandant Cédric Dématraz: «Du coup, il faut presque les materner. Leur dire de boire, de changer de T-shirt, de se relayer.»
L’effort, sous ce soleil de plomb, peut vite mener à l’épuisement total. Le commandant l’a lui même éprouvé récemment, lorsqu’un chalet a pris feu à Moléson-Village, en plein après-midi (La Gruyère du 4 juil­let). «Je me suis senti devenir mal et j’ai dû demander du sucre à l’ambulancier.» D’autres ont dû se coucher pour reprendre leurs esprits et éviter l’évanouissement. «Ça s’est joué à pas grand-chose. Même pour les plus sportifs.»
En l’occurrence, Cédric Dématraz avait demandé à l’ambulance de rester plus longtemps que ne le prévoit la procédure. Si les combattants du feu venaient à tomber comme des mouches, ils pourraient rapidement perdre la maîtrise du sinistre.


Mesures supplémentaires
La canicule a poussé le commandant du CSPi Grevîre à prendre des mesures supplémentaires. Depuis le 16 juillet, un deuxième groupe est alerté systématiquement en plus du premier groupe d’intervention (deux fois dix pompiers). Rappelons que le Centre de renfort de la Gruyère est là pour appuyer les différents corps de la région. Quand bien même ces derniers se font un point d’honneur de maîtriser la situation.
Les circonstances particulières de cet été ont par ailleurs déclenché des dispositions particulières qui proviennent de l’ECAB: un plan sécheresse. Il implique un système d’alarme plus poussé et permet notamment au chef d’intervention du corps local de faire directement appel à un hélicoptère de la Rega.
Malgré tout, faudrait-il que les sapeurs s’entraînent davantage pour tenir le choc? «Je ne pense pas. En tant que volontaire, il s’agit surtout de s’adapter à ces situations exceptionnelles», confie Cédric Dématraz. Le commandant relève que, depuis l’année dernière, celui qui s’engage doit passer un test particulier auprès de son médecin traitant.
«A l’époque, on se retrouvait plus facilement avec des gens qui avaient la volonté de bien faire, mais pas le physique pour y arriver.» Et cet été plus que jamais, les pompiers se doivent d’avoir du souffle.

 

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Incendie intentionnel à Sautaux?


Que s’est-il passé exactement à la forêt de Sautaux le 16 juillet dernier? A une centaine de mètres de la place de jeux du Pâquier, à l’intérieur de la forêt, plus d’un millier de mètres carrés de terrain ont été ravagés par les flammes. Une première alerte a été donnée peu avant 15 h. Une vingtaine de pompiers sont alors intervenus pour maîtriser le sinistre. Des hommes du CSPi Grevîre et du Centre de renfort de la Gruyère. Leur travail a nécessité l’appui d’un hélicoptère et s’est terminé tard dans la soirée. Mais les combattants du feu sont rappelés une deuxième fois vers 22 h, pour intervenir au même endroit.
Du côté de la police fribourgeoise, on confirme cette double intervention. «Nous menons actuellement une enquête, explique l’attachée de presse Isabelle Pauchard. L’ensemble des faits n’a pas été établi et nous n’avons pas encore tiré de conclusions.» Une équipe de la police scientifique s’est rendue immédiatement sur place, de même qu’une équipe de recherche accompagnée d’un chien. Les voisins ont par ailleurs été interrogés.
D’après différents intervenants, plusieurs départs de feu indépendants seraient à l’origine du sinistre. Des tas de bois rassemblé par des bûcherons il y a longtemps. Certains ont même senti une odeur d’hydrocarbure. D’après la façon dont le vent soufflait ce jour-là, il apparaît peu probable que des braises aient consumé ces tas à la chaîne.
Par ailleurs, la première intervention semblait bien avoir mis un terme définitif à l’incendie: la zone a été abondamment mouillée, le sous-bois noyé, et tous les alentours ont été contrôlés à la caméra thermique. En attendant les conclusions de la police, le mystère reste entier. YG

 

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Restrictions pour le 1er Août
Si l’interdiction des feux en plein air et de l’utilisation d’engins pyrotechniques est maintenue jusqu’à nouvel avis, le canton édicte des mesures spécifiques pour le 31 juillet et le 1er août. Tout d’abord, la vente et l’achat de feux d’artifice ne sont pas prohibés, mais leur utilisation sera strictement réglementée. En effet, «seules les communes peuvent autoriser des feux d’artifice et des feux traditionnels sur des places spécifiquement prévues à cet effet, sous la surveillance des sapeurs-pompiers», détaille la police cantonale dans un communiqué. Il est également précisé que «même à ces endroits, seules les personnes possédant la formation adéquate pourront utiliser des moyens pyrotechniques avec retombée à distance». En clair, les privés ne pourront pas envoyer de fusées. Ils pourront en revanche faire aller des moyens pyrotechniques statiques, tels que les vésuves ou les allumettes de Bengale et cela, uniquement sur des surfaces non inflammables et aux endroits prévus par les communes. Pour le reste, les directives édictées le 17 juillet restent en vigueur, comme l’interdiction des feux en plein air, de jeter des allumettes ou des mégots de cigarette par terre. Les contrevenants pourront être dénoncés aux autorités et seront passibles d’une amende pouvant aller jusqu’à 50000 francs. JG


Informations mises à jour sur www.fr.ch/catastrophe

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