«Le village est mort et ressemble à une station-dortoir»

| jeu, 20. aoû. 2015

En quinze ans, la population des Paccots a doublé. Son activité sociale ne s’est pourtant pas renforcée. Au contraire. Anciens et nouveaux habitants se renvoient la balle. Mais tous pointent du doigt l’absence d’une place centrale fédératrice. La commune est consciente du problème.

PAR FRANCOIS PHARISA

 

Tous les matins, aux alentours de 7 h, un cortège de voitures et de 4x4 dévale la route des Paccots. Bis repetita entre 17 h et 18 h 30, en sens inverse. Entre ces deux flux de pendulaires, quelques allées et venues de touristes, attirés par les délices de la cuisine traditionnelle fribourgeoise proposés par les restaurants de la station et les buvettes d’alpage.
En quinze ans, la population des Paccots a plus que doublé. S’élevant à près de 400 habitants à l’aube du XXIe siècle, elle dépasse désormais les 860 âmes (voir graphique). L’époque où ne résidait aux Paccots qu’une poignée de familles de restaurateurs est depuis longtemps révolue. Pourtant, en dépit d’une expansion démographique soutenue, l’impression d’une station inanimée domine. Périodes de forte neige exceptées. Ses habitants, anciens comme nouveaux, dressent le même constat: «Le village est mort et ressemble à une station dortoir.» Principale doléance avancée, l’absence d’une place centrale conviviale.
«Il n’y a ni village ni encore moins station, il n’y a qu’une route.» Philippe Rothen, habitant Les Paccots depuis 1972, force volontairement le trait. Pour mieux souligner le mal qui, selon lui, mine le dynamisme des Paccots. «Où est le centre? Est-ce cette place coincée entre un immeuble en chantier, constamment à l’arrêt, et un hôtel désaffecté?» ironise-t-il.
Sophie Reymond, directrice de l’Office du tourisme de Châtel-Saint-Denis, Les Paccots et la Région, rejoint sur ce point Philippe Rothen, ancien responsable de la patinoire. «La station se trouve actuellement dans une situation provisoire, explique-t-elle. Le chantier de la Dent-de-Lys et l’Hôtel Corbetta pourrissent l’entrée du village. Les conteneurs qui accueillent temporairement le magasin d’alimentation n’arrangent rien. Mais nous avons bon espoir qu’une fois ces travaux terminés, la station retrouve une place centrale digne de ce nom.»
Les habitants sont priés de prendre leur mal en patience. La fin des travaux n’est pas pour tout de suite. En outre, un projet de réaménagement de la traversée de la station a été inséré dans la planification financière 2016-2017 de la commune.
«Quelques restaurants et auberges, un hôtel, un magasin de sports et une épicerie, l’offre est maigre», lâche Marielle Colliard, patronne du café-restaurant Le Tsalè. Selon elle, l’Office du tourisme «fait tout ce qu’il peut». Les touristes continuent d’ailleurs de fréquenter la station, en hiver comme en été. Avec 75 lits hôteliers, Les Paccots manquent même de lieux d’hébergement. «Les seules fois où le village donne vraiment l’impression de bouger sont les deux courses de côte automobiles et motos et le marché de la mi-été», juge Philippe Rothen.


Sus aux nouveaux habitants
Comme plusieurs communes veveysannes, Les Paccots se voient fréquemment accoler l’étiquette de village-dortoir. «Nous n’avons pas l’impression que la population a augmenté, les nouveaux venus ne se montrent pas. Ils ne font que dormir là.» Philippe Genoud, propriétaire de la Buvette de l’Edelweiss, à côté de la patinoire, traduit un sentiment partagé par nombre de ses concitoyens: les nouveaux arrivants ne participeraient pas à la vie locale. Pire, ils désireraient lui nuire.
Ainsi, les ouï-dire font écho de la volonté de certains d’entre eux de lancer une pétition visant à interdire les courses de côte automobiles et motos, organisées chaque année depuis respectivement trente-cinq et cinquante ans. «Ce ne sont pour le moment que des bruits de fond, aucune pétition n’a été lancée», indique Raymond Gauthier, vice-président du Groupement des propriétaires de chalets des Paccots, qui comptent environ 250 membres. «Mais il est vrai que quelques récalcitrants ne voient pas ces événements d’un bon œil.»
Le lotissement des Mayens, sorti de terre en 2008, cristallise les critiques. Son entrée, fermée par une barrière, symbolise l’entre-soi du quartier. Installé depuis dix-huit mois dans l’un des luxueux chalets qui composent les Mayens, Tomas Gallée accepte la critique. Il la comprend, mais assure néanmoins qu’il n’y a pas volonté de ne pas participer à la vie locale. «Il manque d’endroits fédérateurs où les habitants du village pourraient se retrouver et échanger», estime le Slovaque, dans un français parfait. «J’ai récemment invité les hommes du quartier pour une soirée au village, mais nous ne savions simplement pas où aller. Finalement, nous sommes restés sur ma terrasse.»
«Et puis bon, on ne veut pas non plus aller tous les vendredis soirs à l’Auberge des Joncs», illustre Rainer Wentein, un Flamand qui a emménagé aux Mayens en octobre 2013. «En achetant un chalet aux Paccots, les gens recherchent la tranquillité avant tout.»
Marielle Colliard reconnaît que si certains nouveaux résidents ne font que peu d’efforts, ils ne représentent qu’une minorité. «Beaucoup sont déjà venus partager une fondue au restaurant, par exemple, relève-t-elle. Le manque d’endroits conviviaux pour les piétons et le peu d’infrastructures sont les principales causes de cette situation.»

 

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La traversée de la station sera repensée

«Il y a un vide au milieu des Paccots.» François Genoud, syndic de Châtel-Saint-Denis, le reconnaît, la situation actuelle n’est pas idéale. Selon lui, les fermetures du Restaurant de la Dent-de-Lys et de l’Hôtel Corbetta y contribuent fortement. Le manque de lisibilité et les dysfonctionnements de la traversée du village également. «L’image de la station et le confort de ses habitants et visiteurs en souffrent.»
Dans le but de rectifier le tir, un projet de réaménagement de l’axe principal est en cours. «Il est quasiment prêt, assure le syndic. Il a été inséré dans la planification financière 2016-2017.» Le début des travaux dépend toutefois de l’avancement des chantiers des bâtiments de la Dent-de-Lys et de Corbetta.
Ainsi que le démontre l’étude du bureau d’ingénieurs lausannois Transitec, produite en décembre 2013 à l’intention de la commune, l’intégralité du tronçon reliant l’arrêt de bus des Moilles à celui des Rosalys sera repensée. Soit la chaussée, les places de parc, les arrêts de transports publics, la signalisation, la vitesse de circulation ainsi que la jonction avec la route des Joncs.
Le projet permettra notamment «d’atténuer l’effet de coupure de l’axe principal et de lui donner un caractère plus convivial» et «de valoriser l’espace public et l’image de la station». Pour ce faire, toute une série de mesures sont envisagées (voir carte). Le coût de l’opération est estimé entre 800000 et 900000 francs.
La vie sociale de la station devrait bénéficier de ces améliorations urbanistiques. François Genoud rappelle néanmoins qu’il est difficile pour la commune d’animer deux centres: «Les sociétés locales, par exemple, ne peuvent pas être présentes à la fois à Châtel-Saint-Denis et aux Paccots. Et tous les habitants de la station ne souhaitent pas davantage de développement. Beaucoup s’y sont installés pour la proximité avec la nature et la tranquillité.» FP   

 

Commentaires

La traversée du village à 30 km/h serait un cadeau que vous n'imaginez même pas ! On ose même plus marcher sur le bord de la route avec nos petits enfants tellement c'est dangereux. La plus part des véhicules roulent à des vitesses excessives ! Certains se croient sur l'autoroute c'est détestable ! Il faut que ça change !
+1 Savio Michellod
Espérons que ces travaux redonnent vie à l'axe principal. Pour le moment, ça ne donne pas envie de flâner. Quant à la problématique d'un district dortoir, elle est due autant aux nouveaux qui ne participent pas toujours à la vie locale, qu'aux anciens, qui n'ont pas chercher à freiner le développement de la région.

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