Premier bilan pour les dix ans du PNR Gruyère Pays-d’Enhaut

| mar, 23. aoû. 2016

En février 2006 naissait formellement l’association Parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut. Instigateurs du projet et présents depuis ses débuts, François Margot et Patrick Rudaz sont désormais à la tête d’une «petite PME». Bilan et perspectives en huit points.

PAR CHRISTOPHE DUTOIT

La préhistoire du parc
En juillet 2005, en plein moratoire sur l’avenir des parcs naturels, Patrick Rudaz et François Margot décident de réunir leurs forces. En Gruyère, le projet d’IFP Vanil-Noir et Préalpes de la Gruyère a fait long feu. Pareil pour la Réserve de biosphère dans le Pays-d’Enhaut. «Il nous a vite paru impossible de créer deux parcs naturels limitrophes», explique François Margot. Quatre communes rescapées – Charmey, Haut-Intyamon, Château-d’Œx et Rossinière – forment un comité de pilotage qui dépose une ébauche de projet auprès de l’Office fédéral de l’environnement. «Nous avons très vite cherché à créer un engouement populaire, pour assurer la pérennité du projet», note pour sa part Patrick Rudaz. Les deux hommes sont engagés au poste de coordinateur.

Les débuts de l’association
Le 16 février 2006, quelque 130 personnes font partie de l’assemblée constitutive du Parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut à Rossinière, bien plus que ce que les coordinateurs attendaient. «Il convenait alors de fédérer d’autres communes.» Des représentants de l’agriculture et du tourisme comprennent rapidement leurs intérêts à participer au mouvement. En février 2009, une nouvelle étape est franchie: le territoire proposé peut prétendre à devenir un parc naturel régional aux yeux de la Confédération.

Les projets emblématiques
Dès le début, le PNR a lancé des projets porteurs, toujours d’actualité aujourd’hui. Les quatre réseaux écologiques ont par exemple touché, en 2015, quelque 957000 francs. «Nous avons été en avance avec ces réseaux écologiques», affirment les deux coordinateurs. On peut également citer les projets Ecoles, dont les animations sur le thème des abeilles ont été suivies par un millier d’élèves en 2015. Mais aussi les itinéraires touristiques (le Grand Tour, les Vias du fromage), le projet verger hautes tiges («ou comment en faire plus sans aucune contrainte», selon François Margot). Le coordinateur vaudois est également très fier de la carte de sensibilité de la faune au dérangement touristique, un outil appréciable créé dans le cadre du Parc. «Nous revendiquons une certaine lenteur dans nos processus créatifs, avoue Patrick Rudaz. Notre Parc se veut également un forum délibératif où chacun a droit à la parole.»

Un projet pilote sur la biodiversité
En dehors de son plan de gestion 2016-2019, le Parc naturel régional participe à un projet pilote de la Confédération sur la biodiversité, «qui se dégrade de plus en plus en Suisse, analyse François Margot. L’idée est de mettre en place des infrastructures écologiques, selon le principe des couloirs à faune, mais adaptés à d’autres espèces.» D’ici à 2017, nous aurons une bonne vision des besoins et des mesures qui peuvent être prises par le Parc ou par l’Etat, qui doit assumer ses responsabilités en matière de protection de la nature. «On arrive au bout de l’analyse méthodologique. Mais la Confédération ne nous donne pas les moyens pour des mesures sur le terrain, par exemple engager un forestier, un biologiste ou une pelle mécanique. En revanche, on pourrait concrètement convaincre un conseil communal que tel endroit est un espace nodal important pour l’infrastructure écologique de la région. S’il n’est pas encore protégé et s’il y a des risques qu’il perde sa valeur naturelle, une mesure test serait de le protéger d’une manière ou d’une autre pour une période de quinze ans. Le Parc doit assumer ses responsabilités et également chercher des financements.»
Pour d’autres projets en lien avec la nature, le Parc donne souvent des impulsions, sans forcément assumer l’entier du subventionnement. «Nous actionnons nos réseaux cantonaux et confédéraux. Ces derniers temps, nous avons été actifs lors de la réhabilitation de la châtaigneraie de Villeneuve, pour la restauration d’un mur en pierres sèches au pied du Vanil-Noir et pour la réfection de barrières sur un chemin en dessous des Rochers-de-Naye.»

L’effet «Demain»
Dans le périmètre du Parc comme partout en Suisse romande, les habitants ont vu en nombre le film Demain. «Nos collaborateurs en ont parlé, note Patrick Rudaz. Je pense que Demain est parvenu à transformer des craintes en espoirs. Il nous fait passer du négatif au positif.» Reste maintenant à déterminer le rôle de l’institution PNR parmi les vocations individuelles que ce film va susciter. Notre rôle sera sans doute de les accompagner.» Les coordinateurs donnent l’exemple de deux projets récents portés par des petites structures: les Rencontres Elément Terre qui se dérouleront du 2 au 4 septembre au Cinéma Eden à Château-d’Œx. Et celui de la réhabilitation de l’ancienne forge de La Tzintre, à Charmey. «Le Parc pourrait être un périmètre de discussion si des citoyens sont intéressés à mettre en place une monnaie locale.»

La question du territoire
Bientôt se reposera la question du territoire au nouveau comité du Parc (les membres sont des délégués des communes, dont certains ont été nouvellement élus ce printemps). Pour l’heure, aucun remaniement n’est néanmoins prévu. Pour mémoire, le périmètre d’intention du Parc comprend trois communes qui n’ont jamais fait de démarches pour adhérer au projet: Bellegarde, Broc et Gruyères. «Nous avons récemment senti quelques frétillements du côté de Gruyères, remarque Patrick Rudaz. Des questions ont été posées durant les assemblées communales et nous avons présenté nos activités à la Société de développement. Mais nous n’avons pas été approchés officiellement par la commune.»
Contrairement à Montreux, dont la partie urbaine se trouve hors du territoire du Parc, Gruyères devrait, le cas échéant, intégrer dans sa globalité le périmètre du PNR. Y compris le Moléson et ses domaines skiables, ce qui représentait jusqu’ici une crainte de la part de la commune.

Les points à améliorer
«Nous sommes partis très tôt avec notre label Produit et nous devons maintenant mieux exprimer son potentiel.» Les coordinateurs avouent qu’ils ont dû apprendre à faire avec «les lenteurs de la Confédération». «Nous essayons de créer un nouveau produit phare: la fondue du Parc, qui réunira les fromages AOP du territoire.» Serpent de mer depuis les débuts du Parc, la signalétique routière se met peu à peu en place. Les premiers panneaux ont été installés ce printemps sur la Riviera et aux Ormonts. «On attend toujours une réponse fédérale pour l’autoroute», affirment les coordinateurs, conscients que la visibilité du Parc doit encore être améliorée. «Nous n’avons pas de Maison du Parc, comme c’est le cas ailleurs.» Pour l’heure, le PNR doit se contenter de plusieurs relais-infos, relais-paysage et relais-nature pas forcément très en vue pour les autochtones ou les touristes…
Un dernier point a déjà fait l’objet d’amélioration depuis ce printemps: la gestion des finances. Avec un déficit de 200000 francs en 2015, le Parc a en effet puisé dans ses réserves. «Nous avons réalisé davantage de projets que prévu et ça se ressent au niveau comptable», dit Patrick Rudaz. Partant de ce constat, de nouveaux outils de gestion ont été mis en place, qui devraient porter leurs fruits dès le prochain exercice.

L’avenir du parc
«Nous arrivons maintenant à maturité, affirme Patrick Rudaz. Nous devons gérer l’acquis et devenir encore plus présents.» Le Parc emploie aujourd’hui huit salariés permanents (soit 5,5 équivalents plein temps) et deux stagiaires . Pour les années à venir, les coordinateurs espèrent renforcer la communication, recadrer les propositions touristiques et mettre davantage l’accent sur la nature. «Le Parc n’est ni propriétaire ni autorité, mais nous sommes convaincus que nous pouvons en faire plus. C’est pourquoi nous avons engagé une biologiste. A l’avenir, nous poursuivrons les mêmes projets, mais avec davantage de moyens.»

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