La communauté portugaise de Romont unie dans le drame

| mar, 10. Jan. 2017

Hier, beaucoup venaient au Centre portugais de Romont prendre des nouvelles des blessés dans l’accident de car survenu dimanche en France. Des rescapés étaient présents. Choqués, ils ont de la peine à évoquer le drame. L’une des victimes est une mère de famille, habitante d’Ursy.

PAR FRANCOIS PHARISA

En ce lundi matin, le Centre portugais de Romont ne désemplit pas. «Tout le monde vient aux nouvelles», assure Susana Silva, en préparant les cafés derrière le comptoir. La veille à l’aube, un car faisait une sortie de route, sur la nationale 79, près du viaduc de Charolles, en Saône-et-Loire, en France (lire encadré). Sur cette même route qui, plus à l’ouest, avait déjà fait 12 victimes en mars dernier, quand un minibus transportant des ressortissants portugais domiciliés dans le canton était entré en collision avec un poids lourd.
De nombreux passagers présents dans le car dimanche habitent Romont ou les environs et fréquentent le Centre portugais. «On apprend au fur et à mesure les noms de ceux qui étaient dans le bus», s’inquiète Manuel Dinis, de Villaz-Saint-Pierre, venu s’enquérir de la situation et «soutenir les siens».


«C’est trop tôt»
Accoudé au bar, le visage fermé, un hématome sur le front, Rui Borges était dans le car. «J’étais avec ma femme. On est rentrés dimanche en fin de journée. On s’en est sortis», souffle ce cinquantenaire. Encore «sous le choc», il ne souhaite pas raconter ce qui s’est passé. Un peu plus loin, un homme d’une quarantaine d’années, Romontois également, a lui aussi survécu à l’accident. Il cache une blessure à la tête sous sa casquette blanche. Lui non plus ne veut pas témoigner. «C’est trop tôt, je veux oublier», glisse-t-il dans un français hésitant.
Le téléphone du café sonne. «Trois fois déjà ce matin. Des journalistes français», soupire Susana Silva. L’une de ses amies et collègue de travail fait partie des victimes. «Blessée, elle est restée en France, son fils de 12 ans est encore à l’hôpital. Le père a, lui, pu rentrer. Il a le bras en écharpe.» La famille habite un immeuble locatif à Villaraboud. «Tout comme cinq autres personnes qui étaient du voyage. Heureusement, elles ont pu rentrer chez elles», assure Daniel Guedes, qui sort fumer une cigarette.


«Je lui ai confié mes fils»
Comme ce dernier, ils sont plusieurs à affirmer avoir déjà voyagé avec la société portugaise Rota das Gravuras, qui possède une filiale dans le chef-lieu glânois. «Je connais bien le chauffeur, raconte Manuel Dinis. Il est expérimenté et responsable, il fait le voyage plusieurs fois par mois, transportant des personnes ou des marchandises. Cette route, il l’a empruntée des dizaines et des dizaines de fois. D’ailleurs, lors de plusieurs étés, je lui ai confié mes deux fils, aujourd’hui âgés de 15 et 17 ans, pour qu’ils aillent rendre visite à leurs grands-parents. Ça aurait pu arriver à tout le monde, c’est la fatalité…»
La fatalité, la «vie», le «destin»… les mots reviennent dans toutes les bouches. «A quoi ça sert de chercher des explications maintenant?» interroge Joao De Pinho, qui tient à préciser que «ce drame est différent de celui de mars. C’était un minibus. Cette fois, le car semble tout à fait aux normes.»
Ce Romontois s’est rendu au pays à plusieurs reprises par cette route réputée dangereuse. «C’était il y a plus de vingt ans, je préfère prendre l’avion, c’est plus sûr.» Et beaucoup plus cher en cette période de fêtes, c’est bien connu. Le prix des billets peut aller jusqu’à quintupler. «Il y a quelques mois, j’ai regardé pour réserver. Si je prenais quatre billets aller-retour pour mon mari, mes deux enfants et moi, on en avait pour 3000 francs», regrette Susana Silva.

 

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«Une vitesse pas adaptée»


Quatre ressortissants portugais ont perdu la vie dans l’accident de bus survenu tôt dimanche matin, sur la route nationale 79, en Saône-et-Loire, en France. Parmi eux, une mère de famille de 32 ans, habitante d’Ursy. L’information était relayée hier par des proches présents au Centre portugais de Romont. Elle l’est également par Philippe Conus, syndic d’Ursy. L’identité des trois autres personnes décédées circule également sur les réseaux sociaux. Mais difficile de confirmer ces informations. Ni la police cantonale fribourgeoise ni le Département fédéral des affaires étrangères n’étaient en mesure de communiquer à ce sujet hier.   
Dimanche en fin de journée, deux véhicules mis à disposition par le consulat du Portugal en Suisse ont pu rapatrier onze blessés vers leur domicile en Suisse. Quatre autres blessés ont pu rentrer par leurs propres moyens, a précisé lundi à l’ATS Marlène Germain, sous-préfète de Saône-et-Loire.
Trois blessés graves en urgence absolue, dont un enfant de 2 ans et son père, ainsi que dix blessés en urgence relative sont toujours à l’hôpital en France. Les corps des quatre personnes décédées sont à Charolles.
Une enquête a été ouverte pour déterminer les circonstances de l’accident. D’après les premiers éléments, il n’y avait pas de verglas, mais la chaussée était glissante. La vitesse de l’autocar n’était, semble-t-il, pas adaptée aux circonstances et aux conditions de circulation. L’autocar aurait eu une vitesse légèrement supérieure à 90 km/h.
Toutes les personnes en état d’être interrogées l’ont été selon la procédure, a indiqué la sous-préfète Marlène Germain. Les deux chauffeurs de bus ont subi des tests d’alcoolémie, qui se sont révélés négatifs. Le dossier est entre les mains de la procureure de la République du tribunal de grande instance de Mâcon. C’est elle qui donnera le feu vert pour rapatrier les corps, a rappelé Marlène Germain.


«Route de la mort»
Les passagers avaient passé les fêtes de fin d’année au Portugal. Le bus a quitté Vila Nova de Foz Côa dans le nord du pays, samedi soir. Il se rendait à Romont. L’accident s’est produit peu avant 4 h 30, près du viaduc de Charolles, sur un tronçon réputé dangereux. La route est surnommée «route de la mort», en raison d’un grand nombre d’accidents, souvent fatals. Douze ressortissants portugais venant de Suisse avaient été tués un peu plus loin sur cet axe en mars dernier, dans la collision de leur fourgon avec un poids lourd.
Cinquante millions d’euros sont engagés dans un programme d’investissement pour élargir cette route à deux voies par direction. Les travaux sont une priorité affirmée de l’Etat en Saône-et-Loire.
Pour les transporteurs qui n’ont pas de licence transfrontalière, il est habituel d’emprunter les routes nationales, explique à l’ats un porte-parole d’Eurolines. Ils peuvent ainsi économiser sur les taxes routières et proposer des voyages moins chers. En été et durant les fêtes de fin d’année, quand de nombreux Portugais rendent visite à leurs proches au pays, les prix des billets d’avion augmentent. D’où l’attractivité des voyages en bus. En outre, chaque passager peut emporter plusieurs valises, souligne le porte-parole d’Eurolines. Ils ne paient pas de frais supplémentaires. Une aubaine lorsqu’il faut emporter les cadeaux de Noël. FP/ATS

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