Mathilde Gremaud, l’ascension d’une «casse-cou prudente»

| sam, 04. mar. 2017

A seulement 17 ans, la freestyleuse Mathilde Gremaud s’est affirmée au plus haut niveau cet hiver, avec quatre podiums mondiaux dont une victoire. Avec les X-Games en Norvège puis les Mondiaux, la Rochoise entame une quinzaine importante en vue d’une qualification pour les prochains jeux Olympiques.

PAR QUENTIN DOUSSE

C’est l’histoire d’une fille devenue – en l’espace d’un hiver à peine – une dame respectée du ski freestyle. L’histoire est d’autant plus belle qu’elle ne semble pas près de se terminer. A tout juste 17 ans, Mathilde Gremaud possède déjà une carrure internationale. Un statut que l’espoir rochois est allé chercher d’elle-même. Par passion d’abord, par la force de travail ensuite et, surtout, toujours par plaisir. Peu importe qu’elle ride en face du Moléson ou à Québec City, en Coupe du monde. «L’adrénaline, voilà ce qui me comble sur les skis! s’enthousiasme la Gruérienne. Chaque figure posée est unpetit moment de bonheur intérieur, qui me donne la motivation pour défier le prochain saut.»
Dans sa voix, la flamme de la jeune première, amoureuse d’un sport qu’elle a découvert à 13 ans seulement. «Mathilde affiche un plaisir intact et elle a toujours abordé les compétitions de manière relax, observe Stéphane, son papa. En tous les cas, ses résultats n’ont pas changé sa personne.»


«Très à l’aise dans les airs»
Sa fulgurante ascension aurait néanmoins pu lui faire perdre la tête: de ses débuts dans les contests régionaux à son premier podium sur la scène mondiale, il s’est en effet écoulé à peine trois saisons. Impressionnant. Tel est le qualificatif répété par Grégoire Marguet, responsable de la discipline auprès de Ski-Romand, structure qui l’a accompagnée durant deux hivers. «Malgré son manque d’expérience dans le freestyle, elle est immédiatement apparue très à l’aise dans les airs, souligne le Montreusien. Il lui fallait élargir sa palette de figures. Là encore, elle épatait par sa faculté d’assimiler aussitôt les conseils techniques des entraîneurs.»
La rideuse gruérienne progresse dans le freestyle comme dans l’athlétisme, la discipline qui lui a servi à constituer son bagage physique. Sur la piste, l’aisance est naturelle, presque insolente. Le paternel, qui l’entraînait jadis au CS Le Mouret, décrit une athlète «touche-à-tout aux prédispositions évidentes. Elle était facile à coacher car elle a du caractère et du répondant». Malgré une certaine réussite – et quelques finales du Mille Gruyère – Mathilde Gremaud opte pour le freestyle, un milieu «plus fun et moins rigide», qui convient davantage à son tempérament.


Cap franchi à Engelberg
Et la Rochoise s’est donné les moyens de ses ambitions, lorsqu’en août dernier, elle décidait d’intégrer le Centre national de performance à Engelberg. Nouveau mode de vie, nouvel environnement et nouvelle langue: le pari est osé. Il sera à la fois une réussite humaine et un cap dans sa jeune carrière. Immiscée au milieu des meilleurs riders, les entraîneurs de Swiss-Ski en vigie, Mathilde Gremaud a également vu son volume d’entraînement «passer du simple au double». Un facteur déterminant dans son ascension vers le plus haut niveau.
Dans le village obwaldien, l’étudiante gruérienne a accéléré son émancipation. Tout en gardant à l’esprit le souci scolaire. Sa deuxième année de collège, elle l’accomplit en allemand – «je comprends déjà presque tout», se réjouit-elle – et à distance. «Depuis le mois de novembre, elle a suivi quatre jours de cours, indique son papa. Le reste, elle le rattrape entre les compétitions.» Un rythme effréné qu’elle a, depuis, assimilé.
Sa révélation se fera aux prémices de cet hiver. Mi-novembre, à Milan, sa deuxième apparition en Coupe du monde s’est soldé par une 2e place en big air. Si elle se sait désormais attendue, Mathilde Gremaud préfère conserver toute son insouciance. «Je prends les compétitions comme elles viennent. Si je suis montée une fois sur la boîte, pourquoi je ne serais pas capable de le refaire? Me mettre pareillement en confiance me permet de gérer la pression.» Ses résultats suivants – et notamment son triomphe mi-février en big air à Québec City – témoignent d’une philosophie gagnante. Et la Gruérienne semble désormais avoir marqué les esprits de certaines de ses rivales. «Peut-être que leur regard sur moi a changé, que les rideuses expérimentées sont plus nerveuses maintenant», rigole l’espoir.


Progression à tous les étages
Lancée à pleine vitesse, Mathilde Gremaud n’entend évidemment pas en rester là. Elle songe non seulement à sa progression personnelle, mais également à celle de son sport. «Sur le circuit féminin, beaucoup de variantes de figures peuvent être explorées, comme les doubles (périlleux). Si je peux apporter ma touche au ski freestyle, ce serait vraiment une belle réussite.»
A l’évocation de son nom, d’aucuns parlent d’un talent, d’une exception, d’un phénomène de précocité. L’intéressée, elle, préfère en sourire: «Je ne veux pas brûler les étapes. Car en freestyle, on ne sait jamais vraiment comment cela peut tourner.» Celle qui se définit comme une «casse-cou prudente» ne connaît que trop bien la réalité de son sport, qui peut s’interrompre sur un saut, une chute, une blessure. La seule chose qui paraît aujourd’hui en mesure de stopper net sa fulgurante ascension.

 

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«Les JO comme une réalité»


Les deux prochaines semaines s’annoncent comme celles de toutes les émotions pour Mathilde Gremaud. En effet, la Rochoise vivra deux premières lors de deux événements majeurs du calendrier freestyle: les X-Games à Hafjell (Norvège, les 9 et 11 mars) et les championnats du monde à Sierra Nevada (Espagne, dès le 17 mars). Ces deux rendez-vous sont d’autant plus importants qu’ils peuvent – en cas de performances probantes – lui offrir un billet «quasi définitif» pour les jeux Olympiques de Pyeongchang, en février prochain. «Disons que mon horizon pourrait s’éclaircir ces prochains temps, souffle prudemment la Gruérienne. Aujourd’hui, je perçois les JO comme une réalité. Je suis bien partie et je vais tout donner pour me qualifier. Mais je ne veux pas me mettre de pression supplémentaire avec cet objectif, qui est arrivé en cours de route pour moi.»
Plutôt que de «se faire des films» et de penser à son ticket olympique, Mathilde Gremaud confie toute son impatience de prendre part aux prochains X-Games, en Norvège. Cantonnée au rôle de remplaçante à Aspen, fin janvier, la Rochoise s’envole demain avec une place garantie au départ du slopestyle et du big air. «C’est le rêve de tout freestyleur, je n’y croyais simplement pas lorsque l’invitation m’est parvenue! savoure l’espoir. Avec seulement huit athlètes en lice, le niveau se veut très serré et le droit à l’erreur n’existe pas. Là-bas, seul le podium compte et, forcément, les filles prennent plus de risques dans leur run.»


Un podium comme préparation
Mesurée sur ses prétentions de podium – tant en Norvège qu’aux Mondiaux de Sierra Nevada – Mathilde Gremaud a comme à son habitude préféré s’exprimer sur les skis. Hier à Silvaplana, dans les Grisons, la rideuse de 17 ans a décroché son quatrième podium en Coupe du monde. Son deuxième en slopestyle. Créditée de 80,20 points lors de son deuxième run, elle a terminé à 8,20 points de la Britannique Isabel Atkin. Voilà sans doute le meilleur moyen de préparer les échéances décisives de la prochaine quinzaine. QD

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