Dominique de Buman devient premier citoyen du pays

| lun, 27. nov. 2017
Un couronnement pour Dominique de Buman (photo Antoine Vullioud)

Dominique de Buman a été élu hier à la tête du Conseil national et de l’Assemblée fédérale. Pendant un an, il dirigera les débats de la Chambre du peuple, mais sera également actif en Suisse et à l’étranger.

PAR DOMINIQUE MEYLAN

Le Fribourgeois Dominique de Buman a été élu hier au perchoir du Conseil national par 160 voix sur 179. Dans un communiqué, le Conseil d’Etat félicite le démocrate-chrétien et invite la population à venir fêter le premier citoyen de Suisse demain à Morat, puis à Fribourg où un hommage officiel lui sera rendu sur la place de l’Hôtel-de-Ville.

Avec quel sentiment abordez-vous cette fonction?
J’ai surtout un sentiment d’émotion par rapport à la reconnaissance que m’ont exprimée mes collègues. Cette désignation interne, qui se base sur des critères comme l’ancienneté, l’assiduité, la fidélité aux séances, la capacité à rassembler ou l’aptitude à diriger les débats, n’existe pas souvent dans le monde politique.
Ce mandat ne ressemble à aucun autre. C’est à la fois la fonction la plus élevée de Suisse, mais c’est aussi celle qui cache le moins de pouvoir personnel, d’intrigues, de jalousie ou d’usurpation.

Vous avez été syndic, président du Grand Conseil, vice-président du PDC suisse. Président, c’est une fonction qui vous convient bien?
Ce n’est pas le goût du pouvoir, mais j’ai ce côté «bête politique». Je ne crois cependant pas que l’exercice des responsabilités me soit monté à la tête. J’aime bien diriger, pas pour le plaisir de diriger, plutôt pour amener une certaine efficacité.

En tant que président du Conseil national, quel sera votre rôle politique?
Le président n’a pas de pouvoir personnel. C’est même l’inverse, il ne peut pas mettre en avant une motion, par exemple, qu’il aurait gardée dans ses tiroirs. Le président, à une ou deux exceptions près, s’abstient toujours.
Mais il peut imprégner un style. Si, tout à coup, il sent venir un débat uniquement polémique, il peut réunir les chefs de groupe et les rendre attentifs à la dignité des discussions. Le président doit être le chef d’orchestre de la procédure et de la bonne humeur.

Quels seront les moments forts de votre présidence?
Il y aura le voyage officiel en délégation à l’étranger: ce sera du 3 au 8 février en Arménie. C’est un de mes pays de prédilection: j’avais obtenu du Parlement la reconnaissance du génocide arménien. Un autre projet qui me tient à cœur: je représenterai la Suisse aux deux cents ans de la fondation de Nova Friburgo au Brésil.
Mon idée est de faire des déplacements en relation avec les populations voisines de la Suisse. J’aimerais organiser le voyage du président en France autour du 14 juillet. J’ai aussi envie d’aller en Allemagne, où je souhaiterais rencontrer Angela Merkel, une femme que j’admire beaucoup. Ces deux destinations attendent encore confirmation. Par contre, mon voyage en Italie est fixé: j’assisterai à la prestation des gardes au Vatican, en profitant de cette possibilité pour prendre contact avec mes collègues du Parlement italien.
Je prévois aussi de nombreuses rencontres avec la population suisse par exemple au Marché-concours de Saignelégier ou à la Fête fédérale des tambours et fifres à Bulle. Je vais tâcher d’honorer mes associations, d’exporter l’esprit fribourgeois et de franchir la barrière des langues, notamment en Thurgovie où je compte remercier les autorités cantonales pour avoir maintenu l’enseignement précoce du français.

Un autre Fribourgeois, Alain Berset, sera président de la Confédération la même année que vous. Hasard heureux ou malheureuse coïncidence?
Non, c’est sympa. Nous nous entendons très bien et je lui ai proposé qu’on se coordonne. Dans les manifestations et les voyages, parfois il vaut mieux être deux et parfois seul, afin d’optimiser la présence. Dans les prises de parole aussi, cela n’a pas de sens que deux représentants de la Confédération se succèdent à la tribune.

Le canton de Fribourg va-t-il profiter de cette double présidence?
Bien sûr, cela donne une visibilité. Mais, dans une fonction officielle, vous ne pouvez pas favoriser votre canton. Il y a une neutralité à avoir dans les dossiers. Dans un second temps, le canton pourra profiter de cette image rassembleuse, pluraliste et crédible. C’est notamment positif pour l’implantation de sociétés ou l’organisation de manifestations. ■

 

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De beaux succès et quelques revers

A 61 ans, Dominique de Buman mène une carrière politique depuis plus de trente ans. Ce juriste de profession accède en 1986 au Conseil communal de la ville en même temps qu’au Grand Conseil. Son parcours le mène au Conseil national en 2003, une fonction qu’il occupe toujours. Ses succès comme ses revers ont laissé d’intenses souvenirs à Dominique de Buman.

Vous avez été syndic de Fribourg de 1994 à 2004.
C’est un mandat que j’ai passionnément aimé. Le côté intellectuel – présider un collège où il faut avoir des plans, des visions et une stratégie – côtoie le sentiment, l’âme avec le contact quotidien avec la population.

Votre image est beaucoup associée au sauvetage de Cardinal.
Fin octobre 1996, Feldschlösschen annonce la fermeture de la brasserie, un véritable coup de tonnerre. J’étais syndic depuis deux ans et je n’ai pas hésité une minute. Je savais que l’entreprise avait été restructurée et qu’il n’y avait pas de raison de fermer, si ce n’est pour une symétrie des sacrifices.
Avec un autre représentant de la ville et deux conseillers d’Etat, nous avons réussi à monter un dossier incroyable. Cela a été un moment homérique où je risquais gros. Humainement, on ne peut pas l’expliquer, cela n’arrive qu’une fois dans une vie.

Vous êtes aussi passé par le Grand Conseil fribourgeois.
J’ai beaucoup aimé le Grand Con-seil. Lorsque j’ai accédé à la présidence, j’ai découvert le monde agricole, alors que j’étais un pur citadin. Aujourd’hui encore, je suis plutôt considéré comme propaysan à Berne.

Vous êtes arrivé au Conseil national à un moment où la délégation fribourgeoise était en pleine ascension.
Objectivement, oui, je pense que nous étions une délégation assez enviée. Mais il ne faut pas s’enorgueillir, parce que les choses passent très vite. Notre équipe s’entendait assez bien, avec des personnalités différentes et pas mal d’individus alpha. Mais nous n’avons jamais travaillé les uns contre les autres.

Vous avez été assez rapidement nommé vice-président du PDC.
Presque tout de suite, en 2004. C’était une chance pour moi, même si ce n’est pas toujours facile parce qu’il y a, là aussi, beaucoup d’alpha. J’ai d’abord été vice-président avec Doris Leuthard.

Puis Christophe Darbellay est arrivé.
Cela a parfois été éprouvant pour moi, mais j’ai tourné la page, et maintenant, le groupe parlementaire m’a fait confiance.

Parmi les moments difficiles, il y a eu l’affaire de la caisse de pension.
J’ai été blanchi. Sur le moment, ça a été évidemment pénible. Mais, s’il y avait vraiment eu une affaire, je n’aurais pu devenir président du National.
Ce que le peuple ne sait pas et qui n’a jamais été publié par la commission financière, c’est que le Conseil communal a pris des mesures lors de la dernière séance que j’ai présidée. Cela montre que nous avions anticipé le problème. J’étais très content de finir mon mandat en ayant mis de l’ordre dans la maison.

En 2009, vous êtes candidat à la candidature pour la succession de Pascal Couchepin au Conseil fédéral.
C’est un dossier sur lequel pas mal de bêtises ont été écrites. J’étais sur la liste des papables et ma candidature a été considérée comme sérieuse après un premier entretien. Cela m’intéressait, parce que j’aime la politique et c’est dans mes cordes.
Je n’ai pas commis un crime de lèse-majesté. Urs Schwaller pouvait être candidat et il l’a été comme moi. J’avais envie de la fonction, je n’avais pas à attendre qu’il se déclare. Puis j’ai renoncé quand j’ai senti que le PDC à Berne préférait miser sur son chef de groupe pour cette candidature de combat.

En 2015, alors que vous êtes bien installé à Berne, votre parti préfère Beat Vonlanthen pour le Conseil des Etats. Avez-vous compris?
Je vais vous répondre, comme on peut répondre en politique. Le destin m’a donné mieux, parce que la présidence de l’Assemblée nationale, c’est unique. Je voulais rendre service à mon parti. Ma candidature aurait permis de redistribuer les cartes.

Et votre avenir?
Je vais prendre les 365 jours de la présidence un par un, comme des grains de raisin. Ensuite, on verra. Normalement, le PDC limite les mandats à seize ans au Conseil national. Je pense que c’est bien. Mais ça ne veut pas dire que je vais enfiler mes babouches. Je suis à disposition pour d’autres choses. Je me prépare. Dm

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