Etre opéré de nuit à Riaz, c’est bientôt terminé

| mer, 25. avr. 2018

L’Hôpital fribourgeois clôture l’année 2017 sur un déficit de plus de 14 millions de francs. Parmi les mesures d’économies, le bloc opératoire de Riaz sera fermé pendant la nuit. Un rapport confidentiel, qui a fuité, préconise une sortie des employés de l’HFR de la loi sur le personnel de l’Etat.

PAR DOMINIQUE MEYLAN

Pour les dirigeants de l’Hôpital fribourgeois (HFR), 2017 figure parmi les années à oublier. Le résultat des comptes, présenté hier, est «décevant», selon le président du conseil d’administration Philippe Menoud. Avec un déficit de 14,6 millions de francs, l’HFR est obligé d’engager des mesures d’assainissement. «Ce qui nous a surpris, c’est la vitesse de la dégradation financière, rapporte Philippe Menoud. Nous avons été pris de court, je le reconnais.»
Parmi les mesures d’économie, la fermeture du bloc opératoire de l’hôpital de Riaz de 19 h 30 à 7 h 30 pendant toute la semaine aura des conséquences pour la population du Sud. «Notre but n’est pas de diminuer l’activité à Riaz, justifie Philippe Menoud, mais de la réorienter là où elle doit se situer.»
En 2017, seuls 120 patients ont été opérés durant la nuit, principalement pour des interventions de chirurgie et d’orthopédie. Maintenir un bloc ouvert suppose d’avoir en permanence des professionnels prêts à intervenir. «Cela ne vaut pas la peine d’avoir une équipe sur place. Ce n’est juste pas finançable», justifie Rolf Wymann, médecin-chef des centres opératoires à l’HFR.
Cette mesure devrait être effective cet automne. Pendant la nuit, les cas critiques seront transférés à Fribourg. Les personnes plus légèrement touchées attendront le matin pour être opérées à Riaz. Cette décision n’affecte pas les urgences qui continueront à être ouvertes 24 heures sur 24.


Du personnel transféré
L’HFR espère éviter d’éventuels licenciements en transférant une partie du personnel à Fribourg et en comptant sur des départs naturels. Les frais relatifs au personnel soignant du bloc opératoire et aux infirmiers en anesthésie s’élèvent à plus d’un million de francs. L’impact de cette décision sur l’affectation des anesthésistes fait encore l’objet de discussions, selon l’HFR.
Parallèlement, la direction espère développer d’autres activités en journée dans les blocs opératoires de Riaz, par exemple des endoscopies. Les locaux doivent être entièrement rénovés pour permettre une exploitation plus efficace. «Nous voulons faire tourner nos infrastructures à 100%», rapporte le directeur général ad interim de l’HFR, Marc Devaud. L’hôpital de Riaz sera aussi touché par la centralisation de la stérilisation à Fribourg.


Autres décisions
Une autre mesure importante concerne la durée d’hospitalisation. Dans ce domaine, Fribourg fait figure de mauvais élève. Depuis fin 2017, décision a été prise de faire partir les patients à 10 h au plus tard. Cela a déjà permis une diminution du temps d’hospitalisation.
Les salaires du personnel restent une préoccupation majeure pour la direction. «Il n’est pas simple d’avoir un prix de vente qui diminue et de devoir, chaque année, augmenter les salaires sans pouvoir les maîtriser», explique Philippe Menoud. Le président du conseil d’administration refuse toutefois de se prononcer sur le rapport qui préconise une sortie des employés de l’HFR de la Loi sur le personnel de l’Etat.
Il se contente d’affirmer: «Nous avons notre part à faire, mais nous ne pourrons y arriver seuls!» Pour l’HFR, un dialogue constructif avec l’Etat est nécessaire, notamment pour définir le périmètre des prestations d’intérêt général et concrétiser le projet de nouvel hôpital. Quant à l’engagement de personnel, il est gelé actuellement. «Nous avons déjà enregistré une baisse pour 2018», révèle Marc Devaud.


Hausse de l’activité
Malgré ces chiffres rouges, l’HFR a traité davantage de patients en 2017. Mais les recettes ne suivent pas: les tarifs conclus avec les assurances maladie sont toujours bas. L’HFR a également souffert d’une diminution de son indice de «case mix», qui évalue la gravité des cas (1,08 inscrit au budget contre 1,04 dans les comptes). «Un seul centième en moins représente pas loin de 2 millions de recettes manquantes», précise Philippe Menoud.
Les perspectives financières restent mauvaises: le budget 2018 prévoit une perte de 21 mio. L’HFR se cherche également un nouveau directeur général: une annonce a été publiée ces derniers jours. ■

 

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Des conclusions sans appel

Un rapport confidentiel, mais largement diffusé depuis mardi, apporte un point de vue tranché sur le maintien ou non des employés de l’HFR dans la Loi sur le personnel de l’Etat (LPers). «La sortie de la LPers constitue la proposition principale du groupe de travail puisqu’elle est la seule à répondre aux besoins majeurs exprimés par l’HFR», peut-on lire en page 12.
Cette étude, remise au Conseil d’Etat en 2015, a été rédigée par un groupe de travail comprenant des représentants de l’HFR, du Service du personnel de l’Etat, de la Direction de la santé et de l’administration des finances. Presque trois ans plus tard, rien n’a officiellement fait surface. Selon le président du conseil d’administration de l’HFR Philippe Menoud, le Conseil d’Etat devrait se prononcer ce printemps.
Le groupe de travail a mandaté une société pour comparer les salaires de l’HFR avec ceux de 75 hôpitaux et cliniques suisses. En moyenne, le niveau moyen des traitements à Fribourg est supérieur de 7,9%, concluent les experts. Dans le domaine hôtelier, la différence s’élève à 13,5% et dans le domaine des soins à 12,1%. Par contre, les médecins ont un salaire en dessous de la moyenne suisse (– 8,1%).
Afin d’affiner son analyse, la société a encore procédé à une comparaison avec cinq établissements géographiquement proches. «Le niveau moyen des salaires de l’HFR se situe + 9,1% en dessus de ce collectif d’établissements hospitaliers romands», affirme le rapport. Financièrement, cela représente plus de 13 millions de francs, charges sociales comprises.
Forte résistance attendue
Le rapport examine également les avantages et les inconvénients d’une sortie de la LPers. Cet assouplissement permettrait à l’HFR de maîtriser ses coûts de personnel, tout en ayant la possibilité de fixer des salaires compétitifs. Par contre, cela suppose un long processus législatif, une politisation du dossier et une forte résistance du personnel.
Pour arriver à ce résultat, le groupe de travail propose au Conseil d’Etat de laisser le personnel de l’HFR soumis à la LPers pendant deux ans, le temps de négocier une convention collective de travail. DM

 

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Réactions vives et sévères
Premiers à réagir hier, le Syndicat des services publics (SSP), la Fédération des associations du personnel du service public (FEDE) et le PLR ne sont pas tendres. Selon les libéraux-radicaux, le Conseil d’Etat n’assume pas ses responsabilités dans la gestion de l’HFR: «La sortie d’un rapport confidentiel datant de 2015 sans qu’aucune mesure n’ait été prise, indique que le Conseil d’Etat refuse le débat et pratique une regrettable rétention d’informations.»
Le SSP dénonce un rapport d’une «brutalité étonnante». Ce n’est pas seulement aux salaires que le groupe de travail propose de toucher, mais il voudrait aussi faciliter les licenciements, permettre à l’HFR de décider de la durée du travail hebdomadaire ou de la longueur du congé maternité et paternité. Quant à la fermeture du bloc opératoire de Riaz la nuit, le SSP dénonce le manque de consultation du personnel.
Le titre du communiqué de la FEDE, «L’HFR en plein chaos», donne immédiatement le ton. Pour la Fédération, couper les salaires sera contre-productif, car cela débouchera sur une fuite du personnel compétent et sur des difficultés de recrutement. Comme le SSP, la FEDE estime que le conseil d’administration porte une lourde responsabilité dans ces difficultés financières. DM

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