«Employés et sportifs doivent être heureux pour s’épanouir»

jeu, 15. nov. 2018
Durant la conférence, Georges-André Carrel a multiplié les anecdotes vécues lors de ses trente années à la tête du LUC Volleyball. Il a également partagé son expérience de leader avec les trois managers qui ont participé à la table ronde. PHOTOS ANTOINE VULLIOUD

PAR MAXIME SCHWEIZER

CONFÉRENCE. Georges-André Carrel, 70 ans, c’est trente ans au Lausanne Université Club (LUC) Volleyball et 29 titres glanés. Un modèle de longévité, de stabilité et de succès. Vendredi à Charmey, il a mené une conférence intitulée Le coachingsportifetlemanagement d’entreprise. Lors de la table ronde qui a suivi, le Vaudois a échangé avec trois managers: Raphaël Berger (Fribourg-Gottéron), Jean-François Suchet (R. Morand & Fils) et Philippe Remy (JPF Construction).

Devant une assemblée comble, Georges-André Carrel a commencé par définir la performance, un point essentiel selon lui. «Il s’agit de la manière d’atteindre un objectif élevé en n’oubliant pas la limite du potentiel.» Pour l’ancien entraîneur de volleyball, il ne faut donc pas perdre de vue les limites des sportifs ou des employés, qui sont de moins en moins respectées. «De nos jours, beaucoup de personnes partent en burn-out, car le temps de récupération n’est pas observé.»

Un changement de société

De la fin des années 1960 jusqu’en 1980, la pratique du sport a drastiquement changé. De même que la façon de penser: «Avant, nous vivions dans une société de devoir. Aujourd’hui, dans une société de droit. Le sport s’est individualisé, le zapping est apparu et le plaisir collectif a peu à peu disparu.» De plus, les athlètes, qui ont commencé à être considérés par les marques et les managers, ont dû s’ajuster. «Une équipe de volley est formée de six individualités. Il faut les faire cohabiter et non pas les ajouter les unes aux autres. Avant, chacun s’adaptait.»

Pour Georges-André Carrel, le manager ne doit pas viser l’excellence, mais atteindre des objectifs fixés et aussi donner un sens aux choses. «Il faut d’abord répondre au pourquoi avant au comment. Cela donne un sens à la vie, un sens au projet. Si on explique le geste avant de s’attarder sur son utilité, personne ne prend en compte l’importance de le réaliser à la perfection.»

Dans la vie, un manager ne doit pas confondre la motivation et la manipulation. «Nous devons connaître les points forts des personnes et qu’elles en prennent conscience. Ensuite, si elles se sentent moins bien, on peut leur rappeler ce dont elles sont capables.»

Georges-André Carrel a également insisté sur un point: la simplicité. «Le leadership est l’art de susciter la réussite. Le LUC est plus important que son directeur sportif, Nestlé davantage éminent que son PDG et le service que nous rendons à nos employés ou sportifs supérieur à nous-mêmes.»

Le sport vs l’entreprise

A la fin de la conférence, le Vaudois a tenu à souligner les similitudes et les différences entre une entreprise et une équipe sportive. «Les deux doivent établir et partager une stratégie commune avec un team en créant un environnement de confiance et de réussite, pour permettre l’épanouissement des personnes. Et n’oublier à aucun moment que la compétence personnelle est aussi importante que la compétence professionnelle.» La disparité entre les deux entités vient surtout du temps passé avec les joueurs ou employés et du nombre de personnes concernées. «En tant qu’entraîneur, nous voyons deux fois par jour nos joueurs et ils ne sont qu’une quinzaine. En sport, nous appliquons davantage la formule magique “exiger et aimer”, au contraire des entreprises où la formule “commander et contrôler” est appliquée.»

Et de conclure: «Comme les enfants, les employés et les sportifs doivent être heureux pour être épanouis sur le lieu d’activité. Pour participer au bonheur de l’autre, nous devons trouver son moteur de vie et donc s’intéresser à lui.» ■


«Parler vrai de manière fiable»

JEAN-FRANÇOIS SUCHET
Directeur général R. Morand & fils

«L’entreprise regroupe environ 200 personnes et nous ne menons pas un management de compétition. Il n’y a pas de chrono à battre ou d’adversaire direct. Pour concerner les employés, nous mettons en avant tout ce qui entoure le travail avec une gestion de la communication importante. Grâce à cette politique, quasiment toute l’entreprise est présente au souper de fin d’année et nous en sommes fiers.»
«Aujourd’hui, je ressens plus de revendications et moins de sentiment d’appartenance chez les employés. Mais avec la direction, nous souhaitons garder le même cap en leur parlant vrai de manière fiable et authentique. Nous voulons également expliquer les choses avant de les mettre en place et de les imposer. Tout en étant disponible. Si je dois voir un ouvrier à 5 h, cela ne me dérange pas, car je sais que cette entrevue demeure importante pour l’employé qui la sollicite. Cet investissement demande beaucoup, mais il en vaut la peine. Pour nous et pour lui.» MS


«Difficile de fixer à tous un objectif»

PHILIPPE REMY
Directeur de JPF construction

«En dirigeant une entreprise de 600 employés répartis en une multitude d’équipes, il est difficile de fonctionner avec un objectif pour chacun. Car tous possèdent une vision différente du métier et ne pratiquent pas le même genre de travail. Cependant, nous avons instauré un management collaboratif, car les employés doivent se sentir concernés.»
«J’avoue que nous utilisons encore passablement la méthode “commander et contrôler”. Nous essayons d’instaurer de plus en plus la technique “aimer/exiger”, mais elle demande beaucoup d’efforts. Nous travaillons aussi sur la reconstruction du team après un gros chantier qui a demandé énormément d’investissement. Que tous puissent avoir un temps de récupération tout en développant au maximum le sentiment d’appartenance.»
«Les femmes sont également présentes en tant que conductrices d’équipe. C’est intéressant de noter qu’elles possèdent une approche différente du management et nous ne regrettons aucunement notre décision d’augmenter nos effectifs féminins.» MS


«L’identification reste importante»

RAPHAËL BERGER
Directeur général de Fribourg-Gottéron

«Etre à la tête d’une institution sportive nécessite forcément de jouer à l’équilibriste. Il faut remplir les objectifs financiers et sportifs. Pour nous, l’identification reste importante. J’utilise souvent l’image du cuisinier. Si la fondue ne laisse pas un bon souvenir aux spectateurs, alors l’aventure à Saint-Léonard sera mauvaise. Donc, nous devons concerner tout le monde au sein de Fribourg-Gottéron.» «Pour former une équipe, nous devons prendre en compte le noyau des joueurs présents sur le long terme, pour que tous se sentent le mieux possible chez nous. Et bien sûr, en respectant les contraintes budgétaires. Le rôle de l’entraîneur demeure fondamental aujourd’hui, car il doit vendre son projet aux potentielles recrues.» «Pour les objectifs précis, tout se règle avec le directeur sportif et l’entraîneur. Ensuite, durant la saison, on laisse ce dernier coacher. Si quoi que ce soit se passe, nous en sommes informés, mais l’équipe c’est son domaine.» MS

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