Quelle ne fut pas ma surprise d’apprendre que l’équipe des maillots arc-en-ciel avait décidé de ne plus jouer contre celle des maillots noirs-blancs. Pire, de l’interdire purement et simplement de jouer, sous prétexte que la majorité des citoyens ayant financé le stade n’aimait pas les noirs-blancs. Comment était-ce possible dans mon monde, ce monde que j’avais idéalisé, imaginant que nous avions tous été sensibilisés au respect des sensibilités différentes s’exprimant sur nos maillots? Eh bien non! J’en tombais des nues. Interdire une équipe de jeu à cause de son maillot… N’est-ce pas de la discrimination? Sans doute, l’équipe arc-en-ciel ne s’en est-elle pas aperçue. Enfin, espérons. Sinon, ne serait-ce pas là un aveu de faiblesse face aux noirs-blancs? C’est vrai, il faut l’avouer, les méthodes d’entraînement des noirs-blancs ne sont pas celles des arcs-en-ciel, leur façon de voir les hors-jeu non plus. De part et d’autre, cela donne parfois des empoignades. Ce qui n’empêche pas les supporters des deux équipes de se côtoyer paisiblement et amicalement hors du stade. Censurer une équipe du stade, n’est-ce pas une forme d’intolérance ou de phobie à son égard? Dommage pour l’échange de ballon qui n’aura plus lieu publiquement entre les deux équipes. Dommage pour le jeu. Cette petite parabole illustre pourtant une décision prise par notre Parlement en décembre dernier, qui a choisi de retirer la liberté de s’exprimer en noir-blanc face aux arcs-en-ciel. Certainement un manque de confiance dans notre capacité à échanger dans le respect mutuel, et à débattre ensemble. Débattre comporte le mot battre… Le débat a une dimension parfois désagréable, car il remet chaque parti en question. Le museler est se priver d’une possibilité de grandir ensemble. J’ai donc décidé de prendre le stylo pour dire non à cette forme de censure. On m’imprimera en noir sur fond blanc, mais ça, je ne l’ai pas choisi. Gérard Stauffer, Charmey