Grisoni-Zaugg reprend à zéro le projet de gravière à Botterens

jeu, 02. mai. 2019
Les choses ont changé depuis la délivrance des premiers permis de construire, en 2000: des maisons se sont construites, qui dominent le terrain où sera creusée la gravière, et l’entreprise Mécaplast, active notamment dans le matériel médical, s’est développée juste à côté. CHLOÉ LAMBERT

PAR JEAN GODEL

Les pelleteuses n’entreront pas tout de suite en action à Botterens, où l’entreprise Grisoni-Zaugg s’apprêtait à commencer l’exploitation de la gravière de Champ-Vuarin (La Gruyère du 16 avril). Mardi soir, à l’issue de l’assemblée communale, le syndic Dominique Macheret a lu un courriel reçu l’après-midi même de Grisoni-Zaugg.

Son directeur Pascal Doutaz y annonce qu’après mûre réflexion, une nouvelle demande de permis de construire et d’exploiter allait être déposée, «dans un souci de collaboration et pour répondre à certains soucis de la population exprimés lors de la séance d’information du 16 avril dernier».

S’en sont suivis trois quarts d’heure d’une discussion nourrie entre citoyens et autorités. Des échanges qui ont aussi montré un clivage entre pro et antigravière. Une question centrale est toutefois restée en suspens: les permis de construire et d’exploiter, délivrés en 2000 et prolongés en 2006, sont-ils toujours valables? C’est qu’aucune intervention d’envergure, qui aurait pu justifier l’exploitation réelle de la gravière, n’est intervenue depuis lors sur le site.

Les choses sont claires

Les choses sont claires, selon le préfet de la Gruyère, contacté hier: «Grisoni-Zaugg a pris acte que ces permis ne sont plus valables et reprend la procédure à zéro.» Interpellé par un groupe de citoyens et confronté à certains faits constatés depuis, Patrice Borcard explique qu’il a notifié à Grisoni-Zaugg, mardi 23 avril, la suspension de toute activité liée aux permis de construire et d’exploiter jusqu’à droit connu.

Afin de se déterminer, il a aussi demandé tous les documents nécessaires à l’entreprise et pris contact avec les services compétents de l’Etat. Or, vendredi dernier, le préfet est arrivé à la conclusion que les permis n’étaient plus valables, ce qu’il prévoyait de communiquer cette semaine.

«Sagesse» des exploitants

«Entre-temps, avec sagesse, Grisoni-Zaugg en a tiré les conséquences et a estimé qu’il n’y a plus d’autre solution que de tout reprendre à zéro», apprécie le préfet. Qui précise que, dès lors, il n’est plus nécessaire de prononcer formellement la caducité des permis. Dans son mail, dont une copie a été envoyée à Patrice Borcard, Grisoni-Zaugg précise que son renoncement s’est fait «indépendamment de la décision de la préfecture de la Gruyère».

Dès lors que la procédure reprend depuis son point de départ, elle sera examinée par l’Etat à la lumière des nouvelles normes en vigueur. Notamment celles du Plan sectoriel d’extraction des matériaux de 2011, plus strictes que les règles précédentes, datant de 1994. De même, une étude d’impact sera exigée par l’Etat, de même que toutes les expertises nécessaires, assure le préfet.

La commune attendra la fin de ce processus pour se déterminer, a exposé le syndic mardi. Il mettra dans la balance les engagements pris par la commune avec Grisoni-Zaugg dans les années 1990 et les avis, divergents, de la population, a-til annoncé. «Nous ferons une pesée d’intérêts.»

800 000 francs en dix ans

Mardi soir, Dominique Macheret a aussi précisé que la commune, qui possède un quart du terrain visé par la gravière, touchera 5 fr. 50 par mètre cube de gravier, soit 800 000 francs sur la dizaine d’années que durera l’exploitation. Le gain du bénéfice curial, propriétaire des trois autres quarts, n’a pas été communiqué.

Durant les échanges, les anciens ont aussi rappelé tout ce que la commune avait pu tirer de la première gravière, exploitée jusque dans les années 1980, notamment la réfection de la route cantonale, élargie et sécurisée. En face, les nouveaux arrivants ont surtout fait valoir la dégradation de la qualité de vie et la proximité des installations projetées.

Contactés hier, une demidouzaine d’opposants de la première heure se disent réconfortés, mais pas totalement rassurés: «Il nous manque un écrit officiel établissant la caducité des permis de construire et d’exploiter.» De même, qu’en est-il du PAL révisé en 2017, où Champ-Vuarin figure en tant que gravière en activité? demandent-ils.

Enfin, ils constatent que les pertes annuelles qu’un abandon du projet ferait subir à la commune correspondent peu ou prou à la progression des revenus de l’impôt sur les personnes physiques due, entre autres, aux nouveaux arrivants.

Pour sa part, le syndic Dominique Macheret, s’il salue le fait que chacun a pu s’exprimer, fait remarquer que de nombreux signataires de la lettre qui avait demandé une séance d’information ne se rangeaient pas du côté des opposants. ■


Des comptes florissants

L’assemblée communale de mardi était d’abord consacrée aux comptes 2018 de Botterens. En l’occurrence, ils sont excellents, avec un bénéfice de 101 600 francs pour un total de charges de 2,2 millions. Et cela après amortissements supplémentaires de 40 000 francs et une mise en réserve de 50 000 francs. Un résultat qui s’explique surtout par de meilleures rentrées fiscales que prévu au budget: + 64 000 fr. pour l’impôt sur le revenu des personnes physiques et + 10 000 fr. pour l’impôt sur le bénéfice des personnes morales. Mais aussi + 21 500 fr. pour celui sur les gains immobiliers, + 31 000 fr. pour celui sur les mutations, enfin + 17 600 fr. pour celui sur les successions. JnG


Un site «prioritaire»

«Nous cherchons partout à éviter le conflit. Or, nous n’en voulons surtout pas à Botterens, avec qui nous entretenons de longue date une histoire commune.» Contacté hier, le directeur de Grisoni-Zaugg Pascal Doutaz explique donc le revirement de son entreprise par la volonté de calmer les esprits, qui commençaient à s’échauffer à Botterens. Et non en raison d’éventuels doutes sur la validité du permis de construire. «Nous devons en outre prendre en compte l’évolution de la situation depuis 2006, notamment la mise en service de la H189.» Il confirme ainsi qu’une nouvelle étude d’impact sera menée.

Cela dit, il reste confiant sur les chances de pouvoir exploiter un jour cette gravière, malgré les nouvelles normes en vigueur: «Il n’y a pas de raison de refuser ce projet: le site est déjà en zone gravière, il est répertorié au Plan sectoriel et nous respecterons les nouvelles exigences. Champ-Vuarin reste prioritaire. Mais autant repartir sur des bases saines.» Le dossier pourrait être mis à l’enquête d’ici quelques mois, prédit Pascal Doutaz. Qui dit agir «en toute sérénité». JnG

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