Le Collège fête les 40 ans de ses premiers bacheliers

jeu, 09. mai. 2019
Jusqu’à l’ouverture du bâtiment propre au Collège du Sud en 1994, ce bloc de béton (àgauche) accueillait les visiteurs à la rue de la Léchère 40. A droite, la première volée de bacheliers en 1979.

PAR SOPHIE ROULIN

«Œuvre historique». Deux mots bien sonnés pour titrer l’édito de Michel Gremaud dans La Gruyère qui a suivi le 30 juin 1979. Ce jour-là, le Collège du Sud (CS) remettait leur diplôme aux premiers bacheliers formés à Bulle. Demain vendredi, l’établissement organise une grande fête pour célébrer ce 40e anniversaire. L’occasion de revenir sur l’histoire de cette école, intimement liée à celle du développement économique et démographique de la région.

Au début des années 1970, l’école secondaire est en passe de devenir obligatoire dans le canton de Fribourg. La Gruyère lance la construction d’un bâtiment pour accueillir tous les futurs élèves à Bulle, rue de la Léchère. En parallèle, l’inspecteur Jean-Pierre Corboz et Marcel Delley, directeur de l’école secondaire, prennent l’initiative de convoquer les préfets et les députés de la Gruyère et de la Veveyse. Objectif: créer un collège pour les élèves du sud du canton.

Dans les murs du CO

«A l’époque, il fallait aller à Fribourg si on voulait étudier, relève François Genoud, recteur du CS. Du fait des coûts et de l’éloignement, peu d’élèves du Sud dans les collèges de la capitale. Les dépenses pour ouvrir une nouvelle école dans le Sud semblaient donc disproportionnées par rapport à l’intérêt.» Mais le comité d’action mis en place par Marcel Delley et Jean-Pierre Corboz a bataillé ferme. En 1973, alors que l’école secondaire prend ses quartiers à la rue de la Léchère, une quatrième année gymnasiale est proposée. Deux volées d’étudiants pourront y suivre les deux premières années et terminer ensuite leur maturité à Fribourg. Ce qui a été le cas du recteur François Genoud.

«Le Collège du Sud se trouvait dans les murs du cycle d’orientation, se rappelle ce dernier. La gestion était la même, tout comme la discipline imposée!» A partir de 1975, toutes les filières gymnasiales sont proposées et il est devenu possible de suivre l’entier du cycle à Bulle.

Les enfants Liebherr au CS

«Le canton avait garanti qu’il reconnaîtrait les diplômes attribués, raconte Micheline Repond, qui compte parmi les premières bachelières bulloises (lire aussi ci-dessous). Mais on n’avait aucune garantie qu’il soit reconnu comme maturité fédérale.» Marcel Delley a donc mis la pression sur les enseignants pour qu’il n’y ait aucun doute sur le niveau atteint par les élèves. «Les choses ont ensuite évolué de pair, note François Genoud. L’autoroute s’est ouverte. Le tissu économique s’est développé.» Le Collège du Sud s’est inscrit dans cette dynamique. «Le fait que cette formation soit proposée a favorisé l’installation des collaborateurs et des cadres des nouvelles entreprises.» Et de rappeler que les enfants Liebherr ont fait leur bac à Bulle.

Dès 1984, une filière d’Ecole de commerce est proposée. Bien vite, le bâtiment devient trop petit. Des pavillons sont installés pour accueillir des classes de l’école secondaire. Les gymnasiens, eux, migrent d’une classe à l’autre, profitant des heures de sport ou de musique pour investir les salles laissées vacantes.

La construction d’un bâtiment propre au CS s’impose à la fin des années 1980. Il sera inauguré à la rentrée 1994. Enfin à l’aise, le CS propose encore une nouvelle filière, celle de l’Ecole de degré diplôme, devenue Ecole de culture générale. Conçu pour accueillir 750 élèves, le bâtiment en abrite 600 à la première rentrée.

A l’étroit une fois de plus

«Mais, dès 2000, les effectifs explosent», relève le recteur. Il est question d’une nouvelle école ou d’un agrandissement. La deuxième option est finalement retenue. Les travaux se sont déroulés entre 2014 et 2016, faisant passer la capacité de l’école de 750 à 1350 étudiants. «L’étude de faisabilité se basait sur des chiffres du milieu des années 2000, ajoute François Genoud Et, clairement, nous sommes à nouveau en sureffectif avec 1400 étudiants lors de la dernière rentrée.»

L’ouvrage est donc à nouveau sur le métier: il faudra une nouvelle école à l’horizon 2030. ■


«Une vraie chance pour les filles»

MICHELINE REPOND. Enseignante au Collège du Sud, Micheline Repond en est surtout l’une de ses premières bachelières. «Quand nous étions en troisième année d’école secondaire, Marcel Delley est passé dans toutes les classes de prégymnasiale et dans toutes les familles concernées pour convaincre les parents d’inscrire leurs enfants, notamment les filles, au Collège.»

Au début des années 1970, la formation des filles est loin d’être une évidence. «La palette des choix était restreinte et si on voulait faire des études, on nous poussait à devenir institutrices. Le CS m’a permis d’éviter le pensionnat Sainte-Croix et m’a ouvert à d’autres perspectives académiques.» Seules les familles aisées pouvaient se permettre d’envoyer leurs enfants à Fribourg. «En tant que fille, l’ouverture du Collège à Bulle a été une vraie chance!»

Micheline Repond se souvient de ses quatre ans de collège comme d’une période d’intense émulation intellectuelle. «Marcel Delley avait placé la barre haut, mais il avait aussi cette ouverture à la culture. L’école proposait des expositions, des conférences, des films… Et on vivait une période très engagée. Ces années ont été riches.» SR


«Au début régnait un esprit familial»

JEAN-MARC PURRO. A la retraite depuis 2014, Jean-Marc Purro enseignait au Collège du Sud depuis 1977. Soit la deuxième année de la mise en place de toutes les filières gymnasiales à Bulle. «L’ouverture du Collège a été un vrai plus pour la région. Avant 1974, il fallait aller à Fribourg pour étudier, avec des coûts supplémentaires pour les transports ou le logement. Très rapidement, le pourcentage de gymnasiens du Sud a augmenté.» Jeune enseignant, il a senti une certaine pression. «Il fallait montrer qu’on était à la hauteur. Pas dans un esprit compétitif par rapport aux autres collèges de Fribourg, mais par rapport à l’investissement public consenti et à l’engagement politique qui avait permis l’ouverture du Collège du Sud.» Ses premières années d’enseignement, il les passe dans une ambiance qu’il qualifie de «familiale, compte tenu des effectifs. Mais la croissance était inévitable puisque liée au développement de la région.»

Pour Jean-Marc Purro, le déménagement du CS dans son propre bâtiment en 1994 a permis à un autre état d’esprit de s’installer. «Mais je ne vis pas dans la nostalgie. Au contraire, je trouve stimulant de devoir s’adapter, de vivre avec la jeunesse.» SR


«Occasions loupées de rester petit»

PATRICK BERGEM. Luxembourgeois d’origine, Patrick Bergem était assistant à l’Université de Fribourg lorsque le Collège du Sud cherchait un physicien pour compléter son effectif. «Je pensais rester trois ans et j’en suis à ma 36e année d’enseignement. Au début, le Collège était tout petit, cosy. On connaissait tous les élèves.»

Premier physicien en poste, il peut aménager sa place de travail selon ses souhaits. «J’ai à nouveau pu le faire dans le nouveau bâtiment. C’était fabuleux!» Il se souvient de l’entrée du Collège dans son propre bâtiment comme d’un grand ouf! «La pression a nettement baissé avec le départ de Marcel Delley, qui tenait la maison d’une main de fer, et on avait enfin de la place.» Mais l’espace s’est bien vite rétréci avec l’augmentation des effectifs. «Aujourd’hui, on compte en moyenne 29 élèves par salle de classe. L’école est largement surpeuplée.»

Une réalité que Patrick Bergem goûte peu: «On a agrégé au fil des ans l’Ecole de commerce, l’Ecole de culture générale. Cela répondait vraisemblablement à une volonté politique, mais on est devenus une sorte d’usine, assez anonyme. De mon point de vue, on a loupé plusieurs occasions de scinder ces écoles pour garder une taille raisonnable.»

Début juillet, le physicien prendra sa retraite: «J’ai gardé mon enthousiasme à enseigner, mais je ne suis pas mécontent de terminer mon mandat.» SR

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