Des mesures d’économies tailladent l’enseignement

| jeu, 20. fév. 2014
L’enseignement est à son tour touché par des mesures d’économies. Les besoins pour 2015-2016 prévoient 112 équivalents plein temps supplémentaires. Le Conseil d’Etat en veut 40 de moins. Responsable d’établissement et enseignants s’expriment à chaud.

PAR YANN GUERCHANIK


Il pleut des mesures d’économies sur l’enseignement. L’Université, les HES et la HEP ainsi que le Conservatoire ont déjà essuyé une averse en octobre dernier. A présent, c’est au tour de l’école primaire et du secondaire de deuxième degré de se faire rincer. Pour améliorer les finances de l’Etat – 468,9 mio de déficit cumulé prévu pour les exercices 2015 et 2016 – le Gouvernement fribourgeois entend «maîtriser la croissance du nombre de postes dans l’enseignement». Il a communiqué hier un choix de mesures mis en consultation.
Selon les dernières prévisions, il faudrait 111,8 équivalents plein temps (EPT) supplémentaires pour 2015-2016. Le Conseil d’Etat en veut 40 de moins. «Les mesures envisagées ne conduisent dès lors pas à une réduction des postes dans l’enseignement. Elles ne devraient en principe pas entraîner de suppressions de postes existants», communique-t-il. Autrement dit, les mesures visent avant tout une diminution des charges.

Nombre de classes
La mesure la plus importante porte sur la scolarité obligatoire. Elle doit permettre de diminuer le besoin de 16,5 EPT. Le Conseil d’Etat propose «une marge de décision de cinq élèves autour d’un seuil», qui détermine le nombre de classes à l’école primaire. Actuellement par exemple, on compte sept classes pour un nombre d’élèves compris entre 129 et 149. A partir de 150 jusqu’à 170 élèves, on compte huit classes. Avec le nouveau règlement, on pourra toujours s’en tenir à sept classes dans ce dernier cas en jouant sur cette marge de manœuvre de cinq élèves.
Voilà qui pourrait bien favoriser une augmentation des classes à deux degrés (lire ci-dessous). Quoi qu’il en soit, le Conseil d’Etat annonce qu’il devrait être ainsi possible «de diminuer le nombre de classes primaires à raison de huit à 15 classes». Il relève aussi l’incidence financière favorable pour les communes… quelque 2,36 mio de francs au total pour 2015 et 2016.

Décharge réduite
Sur le total des heures qu’il doit effectuer, un professeur de classe bénéficie d’une heure «de décharge» pour accomplir le travail supplémentaire qu’il a par rapport à un simple professeur. Une mesure prévoit de réduire cette dernière à une demi-heure dans les classes de 3e et 4e dans les collèges, écoles de commerce et écoles de culture générale: 1,5 EPT devrait être ainsi économisé.

Salaires diminués
La palette de mesures touche tout de même les salaires du secondaire II. Ainsi, l’activité des experts et des examinateurs serait intégrée dans le cahier des charges du corps enseignant du secondaire II. Autrement dit, cette activité ne serait plus rémunérée. Cette mesure va de pair avec une deuxième qui vise «à instaurer une égalité de traitement entre les enseignants des classes terminales qui font passer des examens et ceux qui n’ont plus de cours dès le mois de mai; ceux-ci verront leur rémunération diminuée proportionnellement».
De même, une mesure propose de «tenir compte de la taille des groupes pour le calcul du nombre de périodes enseignées et du nombre de périodes rémunérées». «Si l’on part de l’idée qu’enseigner à un petit groupe d’élèves permet de gagner du temps par rapport à une situation d’une grande classe, on peut admettre que la rémunération de la personne enseignante peut être modulée en fonction de la taille du groupe», communique le Conseil d’Etat. Il note néanmoins que les petits groupes sont plutôt rares.

Déjà en vigueur
Dans le paquet proposé, certaines mesures ont déjà été introduites pour la rentrée scolaire 2013/2014. C’est le cas notamment de la diminution de trois à deux leçons d’éducation physique à l’école de commerce. A noter encore que l’Institut agricole de Grangeneuve est également touché: l’augmentation de 2 EPT demandée pour 2016 est reportée à 2017.

Mesures à venir
A court terme, ces mesures, parmi d’autres moins significatives, permettraient d’éviter la création de 40 EPT tandis que 70 EPT pourront toujours voir le jour. Mais cela ne suffira pas à rétablir l’équilibre financier. Une partie seulement des 165,2 mio de déficit résiduel (en tenant compte des mesures structurelles d’économies adoptées à ce jour) pourrait être compensé en piochant ainsi dans le domaine de l’enseignement.
Autrement dit, d’autres mesures à moyen et à long terme vont suivre. Le Conseil d’Etat planche déjà sur quelques pistes. Il s’agit notamment d’augmenter les taxes d’études dans les HES. Ou encore, d’optimiser les offres et les voies de formation: par exemple réexaminer l’offre des options spécifiques dans les collèges ainsi qu’optimiser la mise en commun des ressources de l’Université et la Haute Ecole pédagogique. Le Gouvernement souhaite également que la Direction de l’économie et de l’emploi analyse l’offre des HES. Il envisage encore de lancer un examen élargi de l’offre de formation tertiaire dans le canton.
A plus long terme, le Conseil d’Etat prévoit même d’examiner «ce que signifierait, sous un angle pédagogique comme dans ses incidences financières, la réduction de la durée des études conduisant à la maturité gymnasiale».

 

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«De vrais problèmes pédagogiques»
réactions. «Je suis surpris par certaines mesures proposées, confie Gaétan Emonet, président de la Fédération des associations des enseignants fribourgeois. Pour le primaire, il n’y en a qu’une, mais qui pourrait avoir de lourdes conséquences. C’est clairement une augmentation des effectifs par classe et plus de classes à deux degrés. Alors que le canton de Fribourg est déjà au-dessus de la moyenne suisse pour le nombre d’élèves par classe. Ce n’est pas de la faute des enseignants si le canton connaît une augmentation démographique. Je regrette le manque d’anticipation du Gouvernement.
» La diminution de classes va complexifier l’organisation des cercles scolaires. L’année dernière déjà, les autorités scolaires ont refusé deux ou trois ouvertures de classe quand les effectifs étaient limite. Mais là, on parle de cinq élèves en plus pour une ouverture.
» Du côté des associations d’enseignants, nous allons prendre la température, mais nous attendons d’importantes réactions. Notamment du secondaire II, avec des mesures qui seront difficiles, voire très difficiles à accepter, puisque l’on touche directement à la rémunération des enseignants.»

Réaction d’un responsable d’établissement de la région, qui souhaite rester anonyme:
«Avec la marge de cinq élèves qu’elle s’offre, la DICS va mettre une forte pression sur les petits cercles scolaires, comptant quelques classes. Cela se traduira par plus de classes à deux degrés. Quand les degrés sont dans un même cycle, comme 1e-2e, ça va. Avec des classes dont les programmes ne sont pas adaptés, comme 2e-3e, ça pose de vrais problèmes pédagogiques. Des rapprochements seront peut-être nécessaires entre cercles scolaires, mais rationaliser un peu et regrouper pourra être utile.
» La loi scolaire actuelle ne fixe pas de maximum pour une classe, mais une directive demande aux responsables d’établissement de limiter à 27 élèves. Par contre, ce nombre peut être dépassé quand il y a des arrivées tardives ou en cours d’année.
» Mon sentiment est partagé, mais je trouve que la méthode est en tout cas correcte. En Valais, le Gouvernement a imposé 10% d’effectifs en plus, sans discussion possible. Je fais confiance à la consultation pour faire entendre notre avis.» XS

Commentaires

Gentiment la honte... Quand on pense au nombre d'enseignants qui ont été sortis de leurs classes sous l'ère Chassot pour repourvoir des postes que cette dernière a inventés de toutes pièces et dont l'utilité reste à prouver ! Qu'on remette les enseignants à leur place, face à une classe !!! Et non pas seuls derrière un bureau à soit-disant gérer Dieu sait quoi ! Trop d’enseignants bénéficient de décharges ou de salaires pour s’occuper de tout et rien, sauf de classes ou d’élèves... Et ce, souvent malgré eux ! Je pense spécialement aux responsables d'établissement dont on s'est très bien passé jusqu'à il y a peu et dont on pourrait très bien se passer à l'avenir, car ils ne sont qu’un effet de mode... Tout comme également les responsables de projets d'école, encore un autre effet de mode imposé aux école et qui n'apporte vraiment que peu de choses aux élèves, si ce n'est rien ! STOP aux enseignants bureaucrates, OUI aux enseignants face à une classe ! Faites un grand pas en arrière, revenez au temps raisonnable où Madame Chassot n’avait pas encore jeté un gros coup de pied dans la fourmilière... Là, des économies seront possibles facilement, sans surcharger les classes au détriment des élèves. Quel gâchis que ces 10 dernières années !!! Merci Isabelle... Bon courage, Jean-Pierre ! Et surtout... évitez de marcher sur les traces de Madame Chassot ! Elle a su quitter le navire à temps... A vous de le remettre à flot !!!
Vous avez raison Frédo, personnellement je trouve qu'une école de proximité, une ou deux classe par petit village, avec des degrés multiples (voire même de la 1ère à la 6ème), le tout mené à la baguette par des régents bien rigide et sévère, avec des parents qu'on convoquerait enfin pour leur rappeler leurs devoirs et qu'on dénoncerait au curé s'ils ne s'en acquittent pas, ça serait vraiment super. Vous reprendrez bien un petit coup de règle sur les doigts ? ps : au cas où vous ne l'auriez pas saisi, tout comme vous n'avez pas saisi la nécessité des Responsables d'établissement, mon commentaire était ironique...

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