PAR VALENTIN CASTELLA

Au mois d’avril dernier, lorsque les dirigeants du HC Bulle-la Gruyère avaient annoncé la venue de Fabrice et Damien Eisenring, la nouvelle était source de surprise, tant les Vaudois sont des joueurs reconnus dans le championnat de 1^re ligue.
Mais pourquoi donc deux anciens éléments de ligue nationale débarquaient-ils à Bulle, alors que le club était en lice pour le titre de bonnet d’âne de la saison depuis deux ans? «Pour retrouver le plaisir après une saison à Villars où les problèmes de vestiaires avaient miné l’ambiance d’équipe», lancent-ils en chœur. La deuxième raison est à chercher au niveau de la complicité des deux hommes. «Depuis que nous avons joué ensemble à Star-Lausanne, je noue une forte amitié avec l’entraîneur Olivier Monney», explique Fabrice (30 ans). C’est pour cette raison que je suis venu en Gruyère.» Naturellement, son petit frère Damien (28 ans) a suivi son aîné dans cette nouvelle aventure. Une option différente aurait été étonnante pour ces joueurs qui ont pratiquement toujours évolué côte à côte depuis leurs débuts, à Morges.
Talentueux dès leur plus jeune âge, ils ont rapidement intégré le mouvement juniors de Lausanne. A 17 et 19 ans, les Vaudois ont choisi d’intégrer le monde des adultes à Star-Lausanne, en 1^re ligue. C’est après cette expérience que leur destin s’est séparé. «J’ai signé avec Genève-Servette, explique Damien. La première année, j’ai été prêté à La Chaux-de-Fonds (LNB). Comme l’équipe était en construction, j’ai bénéficié de beaucoup de temps de jeu.» Cette expérience concluante lui a ensuite permis d’intégrer l’effectif de Chris McSorley. «J’ai joué 25 matches. McSorley était très dur et ses colères parfois impressionnantes. Mais j’aime ce genre de personnalité. Un excellent motivateur.»
Malgré un bon début de saison, Damien Eisenring a quitté Genève pour retrouver son frère à Morges, alors en 1^re ligue. Une aventure qui s’est terminée par une promotion en LNB.

Avec Martin Gelinas
Fraîchement débarqué à l’échelon supérieur, Morges est devenu la bonne surprise du championnat en se classant sixième au terme de la saison régulière, grâce notamment à l’apport de la star de NHL Martin Gelinas (en 2004-2005, lors du premier lock-out). «C’était une belle saison, lance Fabrice. Ce joueur était très simple. Un joli souvenir.»  Après cet exercice réussi, Damien a tenté sa chance à Lausanne, alors que l’horizon s’est obscurci pour son frère à Morges, en raison de la faillite du club. Dégoûté, ce dernier a rejoint son père Pierre-Yves (n.d.l.r.: ancien gardien notamment à Lausanne et à Berne), entraîneur à Chiasso. Les compères se sont retrouvés trois ans plus tard à Villars. Après des expériences plus ou moins réussies à Lausanne, La Chaux-de-Fonds et Thurgovie en LNB, Damien avait opté pour le hockey plaisir. Il a été rejoint par son frère lors de la saison 2009-2010.

«Les yeux fermés»
Depuis, les deux frères ne se sont plus quittés. «Notre plus grande qualité est notre complicité, lance Damien. En rollers devant le garage ou sur la glace, nous jouons ensemble depuis l’âge de 6 ans. On se trouve les yeux fermés.» Une complicité telle que leurs performances varient selon la forme de l’un ou de l’autre: «Si l’un fait un mauvais match, il peut tirer le deuxième vers le bas.»
Autre fait spécial lorsqu’on évolue entre frères: le politiquement correct n’est jamais de mise: «C’est vrai qu’en match, je dis parfois des choses à Damien que je n’oserais pas dire à un autre coéquipier. Car je sais qu’il n’y aura pas d’histoire et que ces petites piques lui permettent de réagir. On se connaît tellement par cœur.»
Aujourd’hui, les frères Eisenring se retrouvent lanterne rouge du classement de 1^re ligue avec le HCBG. Une situation qui aurait pu faire naître quelques sentiments de gâchis pour ces deux joueurs qui ont connu la ligue nationale. Mais il n’en est rien. «Je n’ai pas de regret, assure Damien. Le hockey m’a permis de découvrir beaucoup de nouvelles choses et de vivre de belles aventures humaines. Et puis, le hockey nous a surtout permis de nous rapprocher, de nouer un lien très spécial.» Ne reste plus qu’à espérer que le HCBG retrouve quelques couleurs pour que leur nouvelle aventure commune se transforme en un défi concluant.

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En attendant le déclic
Avec un point récolté en cinq rencontres, le HCBG pointe à la dernière place du classement. Une situation que les frères Eisenring expliquent en plusieurs points. Premièrement: l’équipe accuse un retard au niveau de la préparation: «Elle a beaucoup changé et il faut encore travailler pour trouver un équilibre, lance Fabrice. Olivier Monney fait du bon travail et tient sa ligne. On progresse chaque semaine, malgré quelques couacs comme à Sion. Il manque juste un petit déclic pour que la situation change.»
Les joueurs du HCBG doivent en effet faire face à un passé difficile construit sur une série de défaites: «On sent qu’il existe une habitude de perdre, constate Damien. Il faut changer cette mentalité, arrêter de dire que c’est plutôt pas mal de s’incliner seulement 3-0 contre Franches-Montagnes. On ne doit plus entrer sur la glace avec la peur de gagner.» Son frère poursuit: «Cette crainte, on l’a sentie face à Saint-Imier. Si nous avions gagné cette rencontre (n.d.l.r.: perdue en prolongations), je suis certain que nous aurions eu ce déclic. Il suffit de peu de choses.»
Engagés pour faire la différence, les deux frères ne sont pas encore satisfaits de leurs performances: «Il faut s’habituer à des nouveaux coéquipiers, un nouvel environnement, décrit Fabrice. Nous sommes conscients que nous devons être plus décisifs, même si deux ou trois joueurs ne peuvent pas faire la différence. Toute l’équipe doit être à 100%. A ce moment-là, nous aurons les moyens de gagner des matches.» vac