PAR SOPHIE MURITH
L’arnaque est connue. Mais néanmoins elle fonctionne toujours. Depuis le début de l’été 2013, une trentaine de plaintes pénales ont été déposées auprès de la Police cantonale fribourgeoise pour du chantage par internet, par le biais de comportements «coquins», indiquait jeudi la Direction de la sécurité et de la justice.
Contactée sur un site de rencontres par une jolie jeune fille, la victime se voit proposer de brancher sa webcam sur le logiciel Skype. La nymphette se déshabille alors, demande à la dupe d’en faire autant et de se masturber. La scène sera enregistrée à son insu.
La séquence de strip-tease de la bimbo, en réalité préenregistrée, est subitement coupée et la victime reçoit alors un e-mail signifiant qu’elle doit payer un montant de plusieurs milliers de francs. Dans le cas contraire, la vidéo sera diffusée sur YouTube et envoyée à ses contacts.
Pour ajouter au désarroi des escroqués, et les pousser à payer, les brouteurs – l’arnaque est si répandue qu’un nom a été inventé pour ses spécialistes – déclarent que la fille est mineure. Ils produisent parfois de faux documents officiels pour faire croire que la victime est sous le coup d’une infraction.
L’arnaque à la mode
«On a enregistré une augmentation importante du nombre de plaintes», note Jean-Pascal Tercier, commissaire de la Police de sûreté fribourgeoise. Comme il est parfois compliqué d’avouer publiquement s’être fait arnaquer de cette façon, il estime que «ce n’est certainement que la pointe de l’iceberg. Les polices neuchâteloise et vaudoise connaissent les mêmes problèmes. C’est le mode opératoire en vogue ces derniers temps.»
Les auteurs agissant d’Afrique, il est souvent difficile pour la police cantonale d’entreprendre des investigations approfondies. «Nous obtenons des adresses IP, qui correspondent à des coffee-shops d’Abidjan, mais c’est ensuite très difficile de remonter jusqu’à l’auteur de l’arnaque», explique Jean-Pascal Tercier.
La police cantonale insiste donc sur la prévention. Tout d’abord, éviter de donner ses coordonnées personnelles. «C’est assez simple de ne pas se faire attraper. Dès que quelqu’un que l’on ne connaît pas propose de se déshabiller devant une caméra, on peut estimer que c’est une arnaque. Il ne faut pas entrer en matière, même pas répondre au message de demande de versement», conseille, en outre, le commissaire.
Parmi les victimes fribourgeoises, toutes masculines, on retrouve aussi bien des jeunes gens d’une vingtaine d’années que des sexagénaires. «Pour eux c’est parfois une grande déception, car ils espéraient faire des rencontres. Les plus jeunes ont, par contre, une vision plus ludique d’internet.»
Surtout faire le mort
Certains d’entre eux ont accepté de payer. Jusqu’à 7000 francs pour la somme la plus importante. Les versements sont en principe entrepris par le biais de Western Union, en Afrique, plus particulièrement en Côte d’Ivoire ou au Bénin.
Jean-Pascal Tercier rappelle que les vidéos enregistrées des victimes déculottées sont le plus souvent diffusées sur YouTube ou à leurs contacts. «C’est quasiment impossible de les récupérer.»
La police cantonale propose aux victimes de signaler les cas à la Police judiciaire fédérale, par le biais d’un formulaire d’annonce, sur le site www.melani.admin.ch. «La Fedpol peut ainsi centraliser les cas et faire des regroupements.»
Commentaires
marie (non vérifié)
mer, 14 mai. 2014
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