Au départ, ils étaient six gamins sur les étangs de la pisciculture

| sam, 07. déc. 2013
Un livre retrace l’histoire du club fribourgeois. Un récit qui parle d’un club de quartier, mais aussi du sport business. Son auteur André Winckler revient sur les périodes marquantes.

PAR VALENTIN CASTELLA

Quartier de l’Auge, en Basse-Ville de Fribourg. Le 1er décembre 1937, six gamins âgés de
13 à 16 ans s’unissent pour fonder le HC Gottéron. L’histoire aurait pu être sans lendemain, comme le destin de ces nombreuses équipes de quartier. Mais celle-ci est différente. Sur les étangs de la pisciculture du Gottéron naît une petite équipe qui, septante-cinq ans plus tard, fédérera tout un canton.
Comme dans chaque histoire, des héros se sont révélés, d’autres n’ont pas laissé de bons souvenirs, des rivaux sont nés. Tous ces personnages, ces noms que l’on connaît sans même les avoir vus en action, se retrouvent dans le livre La passion selon Gottéron, qui retrace l’histoire du club. Un ouvrage disponible dès aujour­d’hui et écrit par André Winckler. Un journaliste qui suit, notamment pour le journal La Liberté, les aventures du club depuis le début des années soixante, lorsque le club évoluait en LNB. Il raconte.

Les premiers pas
«Au départ, les enfants jouaient sur une gouille. C’était du folklore.» Dans son livre, André Winckler raconte que ces derniers ont commencé sans aucun moyen. Les crosses venaient du frêne voisin, les maillots étaient tricotés et les jambières du gardien faites de coussins de voiture. «A l’époque dans le quartier, il existait d’autres équipes. Mais toutes prenaient des piquettes face au HC Gottéron. Au fil des années, les meilleurs joueurs du coin ont rejoint le club.» Lors de l’hiver 1939-1940, l’Etat de Fribourg accepte de mettre à disposition le terrain vague au bas du couvent des Augustins. La légende pouvait commencer.

Dans l’antichambre
En 1953, le club est promu en LNB. Une promotion suivie de nombreuses années à ce niveau. Avec des hauts et des bas. En 1955 et 1961, les Fribourgeois échouent en finale de promotion. De belles années contrastées par des hivers plus sombres, comme en 1967, lorsque les hommes des Augustins évitent de justesse la 1re ligue. Le club connaît finalement la désillusion de la relé­gation en 1976: «C’est l’un des
épisodes les plus sombres de l’histoire du club. L’euphorie régnait quelques années auparavant. Mais l’avenir n’avait pas été assuré. L’équipe avait perdu trop de bons joueurs.»

La folle remontée
Dans l’anonymat de la troisième division, Fribourg-Gottéron parvient à remonter rapidement en LNB, lors de sa deuxième saison. «Le club a bien géré cette période. Il a su conserver ses meilleurs éléments et le gardien Roblon Meuwly est revenu. Il avait évolué en LNA et en équi­pe nationale.»
De retour à un niveau plus en accord avec leur passé, les Fribourgeois voient leur destin basculer lors de l’arrivée, en cours de saison 1978-1979, de Gaston Pelletier.  «C’était la trouvaille du siècle. Il avait tout gagné.» Une réputation qu’il a su faire perdurer grâce à la promotion en LNA, le 4 mars 1980. «Fribourg n’était pas favori. Finalement, les Zurichois n’ont pas vu le puck. C’était de la folie. La patinoire était pleine déjà trois heures avant le début du match. Les gens étaient assis les uns sur les autres. C’était extraordinaire.»

La fin d’une époque
Le 27 septembre 1980, les hom­mes de Gaston Pelletier disputent leur premier match en LNA. «Tous les observateurs disaient que le club ne ferait qu’une année à ce niveau. Mais il a réussi à réaliser de bons transferts. Et puis, les dirigeants ont fait confiance aux joueurs du cru, comme Lüdi, Raemy et Rotzetter.»
Après une première saison sans histoire, les exigences de la modernité viennent bouleverser la tradition. Le 20 février 1982 se déroule le dernier match aux Augustins. «Ce déménagement n’a pas été bien vécu par les gens de la Basse-Ville. Ils avaient peur que le mythe du chaudron disparaisse.»
En 1983, le club réalise sa meilleure saison en LNA en terminant vice-champion de Suisse. S’en suivent deux exercices ponc­tués au 3e et 4e rangs, avant une lente descente dans la hiérarchie. Lors de la saison 1987-1988, la dette du club se monte à 1,3 million de francs. Le premier «Sauvez Gottéron». «Si nous ne réussissons pas, il n’y aura plus de hockey à Fribourg pendant vingt-cinq ans», avait déclaré le futur président Jean Martinet. Le club parvient à relever la tête.

La période russe
Slava Bykov et Andreï Khomutov ont fait rêver des milliers d’enfants. «C’est l’une des plus belles périodes du club, avec trois finales.» Grâce aux deux Russes, Fribourg-Gottéron rè­gne sur le pays, sans pouvoir pour autant concrétiser sa domination. Trois finales et deux demi-finales, voilà le bilan de cette épopée. «Grâce à eux, le hockey suisse a énormément progressé. Le club était, hélas, devenu trop dépendant des Russes, qui ont été usés par tous leurs efforts. Ils prenaient tellement de coups. A cette époque, on a pu voir de véritables tentatives d’assassinat.»

Une lente descente
L’année 1995 voit les deux Russes devenir moins décisifs. Blessures et attaques continu­elles ont raison de leur maestria. En 1996, Fribourg joue sa place en LNA en play-out. Premier cri d’alerte: une dette de 2,8 millions. Deux saisons plus tard, malgré une demi-finale (1997-1998), la dette s’élève à 4,6 millions. «Le club a vécu sur les Russes pendant des années, sans préparer l’avenir. Il n’y avait plus rien derrière.» La saison 1998-1999 est triste: Slava Bykov est prié de faire ses valises et l’équipe se retrouve en play-out.

L’époque RVM
Roland von Mentlen: un nom qui ne laisse personne indifférent. Débarqué à Saint-Léonard en 1999, le futur grand maître des lieux a façonné un club encore amateur au niveau de la gestion. Seule une troisième place en championnat régulier en 2002 laisse un bon souvenir aux supporters, qui subiront ensuite
les play-out en 2005. En 2006, l’équipe doit même jouer sa survie face à Bienne, alors champion de LNB. Une année durant laquelle Fribourg-Gottéron se retrouve en faillite virtuelle. «Le club était en survie, tant au niveau sportif que financier.»

La renaissance
Le 22 novembre 2006 lors de l’assemblée extraordinaire, un groupe de travail insuffle un vent nouveau à Fribourg. La dette, qui se monte à 4,5 millions, est épongée. La patinoire Saint-Léonard deviendra bientôt la BCF Arena. Dès lors, le club a retrouvé le chemin du succès, avec trois demi-finales et une finale disputées en six ans. «Nous sommes passés d’un hockey folklore à du sport business. Tout est maintenant mieux structuré.» Reste à savoir si les Sprunger, Bykov et autre Conz parviendront, un jour, à rester dans les mémoires collectives, comme le sont leurs aînés. «On a toujours tendance à magnifier le passé. S’ils deviennent champions, ils seront les héros de leur époque.»

 

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A toutes les générations
C’est aujourd’hui que le livre La passion selon Gottéron, écrit par André Winckler est dispo­nible. «Comme un premier ouvrage avait été écrit en 1982, nous avons fait le choix d’insister sur la période Saint-Léonard, sans pour autant oublier la précédente», explique l’auteur.
Cet ouvrage, édité par les Editions La Sarine, comprend deux parties. La première s’attarde sur les premiers pas du club, jusqu’à la promotion en LNA. Puis, la seconde rappelle toutes les saisons suivantes vécues par les Fribourgeois. Différents portraits de joueurs historiques rappelleront aux plus jeunes qui a fait Fribourg-Gottéron. Le tout complété par de nombreuses anecdotes intéressantes. Fribourg qui tente de soudoyer un adversaire pour se maintenir, un président qui ne souhaite pas monter en LNA, un club qui invite les supporters à rester chez eux le jour de l’inauguration de la patinoire Saint-Léonard, un pistolet retrouvé lors d’un derby face à Berne… Autant d’histoires qui reflètent les mœurs de différentes époques. vac

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