PAR DOMINIQUE MEYLAN

Tout avait pourtant commencé par une bonne nouvelle: le Service de l’environnement (SEn) craignait une pollution des espaces verts en ville de Fribourg due à l’incinération de PCB. En cause: l’ancienne usine de traitement des ordures ménagères des Neigles. Cet établissement, qui avait pris la succession de la décharge de la Pila, avait arrosé la ville de poussières suspectes entre 1972 et 1977.
Cette inquiétude s’est révélée infondée. Plus précisément, les analyses n’ont pas indiqué de teneurs en PCB, dioxines et furanes problématiques. Par contre, les concentrations en métaux lourds se sont révélées inquiétantes, en particulier dans les jardins potagers. Deux campagnes de prélèvements ont été menées en 2011 et en 2012. Les résultats ont été présentés hier. «Nous avons été surpris», admet Marc Chardonnens, chef du Service de l’environnement.
Jusque-là, l’observation des sols urbains dans l’ensemble du canton avait toujours débouché sur des conclusions rassurantes. Quelque 53 sites ont été analysés depuis 2004. Tous les résultats se situent en dessous du seuil, à partir duquel l’ordonnance sur les atteintes portées aux sols préconise des investigations.

Risques pour la santé
Les campagnes de 2011 et 2012 ont été menées dans le périmètre de diffusion des fumées de l’ancienne usine. Sur les 27 sites examinés, deux dépassent les valeurs supérieures admises et nécessitent un assainissement. Ces parcelles, dont une est privée et l’autre abrite une institution publique, souffrent d’une pollution au plomb, considérée comme dangereuse pour la santé.
«Des analyses complémentaires sont en cours», rapporte Barbara Gfeller Laban, responsable de la protection des sols au SEn. Si la teneur en plomb est confirmée, ces surfaces ne pourront plus être utilisées comme jardin potager ou espace de jeu. Si les propriétaires désirent continuer à cultiver leurs légumes, ils devront assainir et donc remplacer la terre polluée. Une opération entièrement à leurs frais.
Dans neuf autres jardins, les teneurs en métaux lourds présentent un risque possible pour la santé. La pollution est moins importante. Elle nécessite toutefois des mesures. Du plomb, du cadmium, du mercure, du zinc et également des hydrocarbures aromatiques polycycliques (matériaux issus du processus de combustion) ont été découverts.
Les propriétaires ont été informés. «Des recommandations ont été formulées spécifiquement pour chaque parcelle», explique Barbara Gfeller Laban. Certains légumes peuvent être cultivés, comme les choux de Bruxelles, les haricots ou les petits pois. Il faut par contre éviter les salades, les choux, les brocolis ou les carottes. Les propriétaires doivent aussi éviter que des enfants entrent régulièrement en contact avec la terre.
Finalement, sur 16 sites, aucun risque sanitaire n’a été révélé. Huit d’entre eux sont légèrement pollués, mais ne nécessitent aucune mesure. Aucune place de jeu ne présente de valeurs problématiques, précise encore Barbara Gfeller Laban.

Différentes sources
«Il n’y a pas une cause évidente», rapporte Marc Chardonnens. Deux types de sources potentielles ont été répertoriés. Il y a d’abord une pollution de fond, faite de poussières atmosphériques. L’ancienne usine des Neigles n’y est pas totalement étrangère. Si les PCB incinérés n’ont pas laissé trop de traces, les métaux lourds provenant des déchets traités par l’établissement auraient été davantage nuisibles. Les émissions dues au trafic, aux chauffages, aux activités industrielles et artisanales contribuent aussi à cette pollution des sols.
Les propriétaires de ces jardins potagers, en employant des produits phytosanitaires, des engrais ou en brûlant des déchets, ont une part de responsabilité. Cette problématique, qui concerne l’ensemble du canton, avait déjà été évoquée (La Gruyère du 21 juin 2007). A cette date toutefois, aucune situation à risque n’avait été diagnostiquée.
Le SEn va poursuivre ses prélèvements dans certains quartiers de Fribourg et dans le reste du canton. «Plus on cherche, plus on trouve», reconnaît Marc Chardonnens, sans toutefois présumer des résultats futurs.