La pluie et le froid mettent les armaillis en retard

| sam, 25. mai. 2013
La plupart des exploitants ont du retard pour leur montée à l’alpage. Cette saison étant celle de la plus forte production, les quantités seront en baisse. Météosuisse n’annonce pas d’amélioration avant le 2 juin.

Par Sophie Roulin

Après un hiver interminable, un printemps pourri. De mi-avril à mi-mai, la période a été l’une des plus arrosées et l’une des moins ensoleillées des trente dernières années, selon MétéoSuisse. Et, pour ne rien arranger, la neige va s’en mêler ce week-end. La situation sape le moral de tout le monde – il n’y a qu’à écouter les conversations dans la rue. Mais surtout, elle n’est pas sans conséquence pour certaines activités. Parmi elles, l’exploitation des alpages, qui accuse déjà dix jours de retard sur le calendrier habituel.


«C’est l’horreur!» Responsable du service des alpages auprès de l’Institut agricole de Grangeneuve, Céline Vial-Magnin vit la situation d’autant plus près que son mari, agriculteur à Châtel-Saint-Denis, a pris le risque de monter. «Il a finalement décidé de ramener une partie des vaches à la maison parce que ça n’allait plus.» En cause, le manque d’herbe et les dégâts importants provoqués par le piétinement des bêtes.


Repousser au maximum
«On devait monter aujourd’hui, mais on a encore repoussé à demain», témoigne, quant à lui, Jean-Louis Roch. Agriculteur au Châtelard, il passe l’été sur les hauts d’Albeuve. «Après, on n’aura plus le choix.» Ceux qui l’ont retardent encore la date de leur montée. «J’ai reçu plusieurs SMS allant dans ce sens, indique Jean-Pierre Häni», conseiller en fromagerie et responsable de CASEi.

«Les alpagistes vivent au jour le jour, ajoute-t-il. Mais la semaine prochaine sera décisive.» Parmi les rares qui sont montés, certains envisagent en effet de redescendre. «Les exploitants des alpages de basse altitude sont montés parce qu’il y avait du fourrage. Mais maintenant que la première herbe est mangée, la situation devient critique.» Avec ces conditions météorologiques, la seconde ne grandit pas.


Quelles seront les conséquences sur la fabrication du fromage d’alpage? «Une semaine de retard, c’est une semaine de moins sur la saison, commente Jean-Louis Roch. Il est rare qu’on puisse récupérer en automne. Et, de toute façon, c’est au printemps qu’on fabrique le plus.» La quantité produite s’en ressentira. D’autant que les dix jours à venir ne laissent rien présager de bon. «Il faut voir comment se passe le reste de la saison. Mais s’il fait froid jusqu’à fin juin, ce sera dramatique», commente André Remy, président la Coopérative fribourgeoise des producteurs de fromages d’alpage.


Philippe Dupasquier, président de la Société fribourgeoise d’économie alpestre, et Jean-Pierre Häni estiment eux aussi que la quantité sera plus faible. Avec ce que cela implique comme conséquence sur les revenus des armaillis. Et le conseiller en fromagerie d’ajouter: «Avec ces conditions, la vigilance doit être d’autant plus grande pour garder la qualité.» Les bêtes rentrent avec plus de terre et la traite
devient plus difficile. «Mais les alpagistes y sont sensibles et ils connaissent les enjeux.»


Fondue versus grillades
Cette baisse de quantité inquiète-t-elle déjà l’Interprofession du gruyère? «Si la situation se maintient, on risque d’avoir des soucis pour le gruyère d’alpage, reconnaît Philippe Bardet, directeur. Mais, actuellement, ceux qui doivent planter des patates sont plus à plaindre que les producteurs de lait.»


Quant au marché du fromage, il bénéficie de cette météo maussade. «Cette grisaille est plus favorable à la fondue qu’aux grillades», glisse Philippe Bardet. Et ce n’est pas Christian Duc, directeur de Vacherin fribourgeois SA, qui dira le contraire. Alors que la saison s’étend habituellement de septembre à mars, les mois d’avril et mai 2013 dépassent largement les moyennes. «Nos stocks sont tout en bas, indique Christian Duc. Mais nous avons pu alimenter tous nos clients, tout en mettant un frein à certaines actions.»


Encore les foins à faire
Reste un autre souci: la pluie empêche les agriculteurs de faire les foins en plaine. «S’ils ne peuvent être faits dans les temps, la situation deviendra inquiétante», note Philippe Bardet. Une chose est sûre, les premiers jours de beau promettent d’être encore plus stressants que d’habitude pour les agriculteurs: «Là, on tourne en rond, relève Philippe Dupasquier. Et, dès qu’il y aura du soleil, on aura du boulot jour et nuit.»

 

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Pas d’amélioration avant le 2 juin
Une «dépression régénérescente», c’est ainsi que les prévisionnistes de MétéoSuisse décrivent la basse pression qui influence notre ciel depuis le mois de mars. Et ce n’est pas près de s’arrêter.
«Pour les prochains dix jours, il y a peu de changement en vue, indique Isabelle Fath, prévisionniste. On reste dans une situation de nord-ouest qui engendre des températures froides pour la saison.» La masse nuageuse sera elle aussi bien présente, avec une accalmie lundi et mardi matin. Selon Pierre Eckert, chef du bureau romand de MétéoSuisse, il n’y a pas lieu de lier cette dépression stagnante avec un phénomène climatique. «C’est conjoncturel.» SR

 

 

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