De retour de Lukla et de Kharikhola, plusieurs membres de la Fondation Nicole Niquille et d'Action Kharikhola témoignent des travaux réalisés sur place ces derniers mois. Un concert de soutien aux hôpitaux de Lukla et de Kharikhola est organisé au CO2 ce samedi.
PAR CHRISTOPHE DUTOIT
Lukla. Douze bénévoles gruériens viennent de passer un mois à Lukla dans le but de poursuivre la reconstruction de l’hôpital parrainé par la Fondation Nicole Niquille (La Gruyère du 8 octobre). Cinq employés mis à disposition par l’entreprise Grisoni-Zaugg étaient notamment du voyage. «Nous avons travaillé les vingt premiers jours non-stop», raconte Marco Vuadens, l’époux de Nicole Niquille, qui se rendait pour la troisième fois de l’année au Népal.
Passé la surprise, les ouvriers qualifiés ont travaillé à l’ancienne. «Ça m’a un peu rappelé l’époque de mon apprentissage, il y a plus de quarante ans», sourit le menuisier Jean-Claude Schuwey, lui aussi du voyage. «Les jeunes maçons ont été un peu surpris en arrivant sur place, mais ils se sont très vite adaptés, poursuit Marco Vuadens. Ils avaient la larme à l’œil en quittant Lukla. Certains reviendront. Même l’aventurière Géraldine Fasnacht est venue donner un coup de main pour poser du carrelage.»
Les sourires et l’Everest
Le soir, l’équipe gruérienne se retrouvait ensemble pour le souper. «C’était chic. Chacun à son tour choisissait le repas pour les autres. Tout le monde était fatigué à la fin, mais nous étions très contents du travail accompli.» Les sourires des jeunes Népalaises et une course de deux jours au pied de l’Everest ont suffi pour toute récompense.
Après avoir déjà rebâti la partie ambulatoire de l’hôpital à la fin du printemps, les Gruériens se sont attelés à reconstruire les fondations de l’autre partie du complexe. «Les 110 ouvriers népalais présents ont démonté les murs en pierres et les femmes les ont cassées pour en faire près de 50 m3 de matériau pour les semelles en béton. Les femmes sont également allées chercher autant de sable à la rivière, en contrebas du village, explique Marco Vuadens. Un vrai travail de bagnard.»
240 tonnes de béton
Pour renforcer la stabilité de l’édifice en cas de nouveau tremblement de terre, quatre tonnes de fers à béton ont été coulées. «Nous avons fait venir 600 sacs de ciment par avion depuis Katmandou et nous avons brassé à la main près de 240 tonnes de béton.» Pour la charpente, l’équipe a fait venir près de 1000 mètres linéaires de carrelets, ainsi que 300 m2 de panneaux préfabriqués (plywood), portés à dos de sherpas.
Aujourd’hui, le gros œuvre est terminé. Reste encore à finir les peintures et la menuiserie fine. «Si tout se passe normalement, les travaux seront achevés d’ici deux à trois mois.» Seule incertitude: le matériel médical du bloc opératoire n’a pas encore pu être testé et nul ne sait s’il fonctionne toujours. «On risque encore d’avoir des surprises, notent en chœur Nicole Niquille et Marco Vuadens. Finalement, le côté positif de ces événements aura été de revoir un certain nombre de choses sur place et de pouvoir désormais compter sur un bâtiment moins menacé par les secousses.»
Côté finances, la Fondation Nicole Niquille a récolté «plusieurs centaines de milliers de francs ces derniers mois. Des chanteurs du 1er mai ont partagé leur argent, des soupers de soutien ont eu lieu, beaucoup de petites actions individuelles nous sont arrivées, note l’ancienne guide de montagne. Même une quête de mariage.» Reste maintenant à la fondation à poursuivre ses actions pour trouver les quelque 350000 francs dont l’hôpital a besoin chaque année.
«Les habitants de Lukla sont très attachés à leur hôpital et ils sont très reconnaissants pour le travail que nous avons effectué», explique Jean-Claude Schuwey, par ailleurs syndic de Bellegarde. «Beaucoup de Népalais sont venus voir comment nous travaillions, note également Marco Vuadens. Malheureusement, ils continuent de reconstruire sans ciment ni ferraille, car ils n’ont pas les moyens de s’en procurer.»
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Kharikhola. A l’instar de ses collègues de la Fondation Nicole Niquille, Serge Currat vient également de rentrer du Népal, où il a passé trois semaines pour le compte d’Action Kharikhola, dont il est l’un des responsa-bles. «Il s’agissait de notre première visite depuis les séismes de ce printemps. Jusqu’ici, notre personne de contact sur place – le sherpa Sher (La Gruyère du 23 juillet) – s’est chargé de la distribution de kits d’urgence financés par l’association et des actions sur place.»
Sous des bâches
Après une journée de jeep et deux autres de marche, Serge Currat a pu constater à quel point l’aide est efficace tant qu’elle peut être acheminée avec des véhicules. «Dès que la route s’arrête, les humanitaires peinent à entrer dans les vallées. J’ai encore vu beaucoup de maisons détruites et beaucoup de familles vivre sous des bâches. De nombreux pères de famille sont morts et la dernière mousson a été très dure. Je pense que beaucoup d’entre eux passeront encore l’hiver dehors.»
L’hôpital bientôt déplacé
Enfin arrivé à Kharikhola, il a vu à quel point l’hôpital «est fendu de partout. Il a bougé sur lui-même. Plusieurs chambres utilisées pour les consultations tiennent grâce à des étais.» En accord avec les autorités locales, décision a donc été prise de reconstruire entièrement l’hôpital. «Ils ont trouvé un terrain en contrebas du village, sur un gros rocher. L’hôpital sera composé de plusieurs petits pavillons, moins sensibles aux tremblements de terre. En outre, nous réserverons une place pour un héliport.»
Durant les travaux, Action Kharikhola va louer trois pavillons dans un lodge pour que puissent travailler le médecin et ses trois infirmiers. «Nous espérons retourner sur place au printemps avec un géologue, pour effectuer les premiers sondages», affirme Serge Currat.
Quoi qu’il en soit, les travaux de reconstruction prendront davantage de temps qu’à Lukla, qui dispose d’un aéroport. «A Kharikhola, nous n’avons pas les moyens de nous faire apporter du matériel par les airs. Nous allons donner du travail aux ouvriers locaux, qui transporteront les matériaux à dos d’hommes ou à dos d’ânes.»
Parmi les autres missions qu’ils se sont assignées, Serge Currat et ses deux collègues de voyage ont poursuivi le recensement des familles de basses castes qui nécessitent un parrainage. «Il s’agit d’un de nos multiples microprojets sur place. Cette fois-ci, nous avons trouvé douze nouvelles familles dans le besoin, qui s’ajoutent aux 52 que nous soute-nons déjà.» En effet, l’association paie des habits et l’écolage pour les enfants de ces familles. Ce qui correspond à un soutien de 30 francs suisses par mois.»
En outre, Serge Currat espère lancer bientôt un projet pour installer des cheminées dans les maisons. «Certains intérieurs sont constamment enfumés et cette situation mène à de nombreux cas de cancer», note le Gruérien. L’association va également aider la nouvelle association dans laquelle est actif Sher, qui promeut un système de latrines qui devrait améliorer grandement leur hygiène. «Ça bouge sur place depuis quelques années, se réjouit Serge Currat. Les gens se prennent en charge.» Dans le même ordre d’idées, la génératrice subventionnée par l’association a bien tenu le coup. «Les Népalais prennent beaucoup soin du matériel. Ils ont décidé de changer leur tableau électrique.»
Musique et kit
Durant ce voyage, les trois Gruériens ont aussi contribué à la création d’une école de musique sur place, avec l’achat d’harmoniums et de tablas. Ils ont également distribué des kits de survie à cinq familles, ce qui leur permettra de subvenir à leurs besoins durant trois mois.
A noter enfin que l’association Action Kharikhola est présente durant l’avent au marché de Noël, dans la cour du château de Bulle.
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Chansons pour la bonne cause
Depuis ce printemps, de très nombreuses actions ont été organisées en Gruyère pour venir en aide aux hôpitaux de Lukla et de Kharikhola, gravement détériorés par les tremblements de terre qui ont ravagé le Népal. Ce samedi, trois personnalités du monde artistique – Olivier Sabin, Claude Currat et Dominique Rime – ont mis sur pied une soirée
de soutien à la salle CO2 de La Tour-de-Trême. Après avoir été l’invité de la 100e Veillée à la maison le week-end dernier, Thierry Romanens sera la tête d’affiche de ce minifestival. A ses côtés, le public retrouvera le Valaisan Marc Aymon en solo, ainsi qu’une pléiade de groupes locaux qui exploreront les styles les plus divers: le punk-tsigane avec Primasch, le piano contemporain avec Fiona Hengartner, la pop ambitieuse avec Season Tree, des reprises des Beatles avec The Bugs, ainsi que Lucille & Mégane et Fougue. L’argent récolté sera reversé à l’association Action Kharikhola et à la Fondation Nicole Niquille – Hôpital Lukla. CD
La Tour-de-Trême, CO2, samedi 5 décembre, dès 20 h. Réservations: www.labilleterie, 026 913 15 46
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