PAR LARA GROSS
Seuls ceux qui lisent dans le marc de café auraient pu prédire une telle nouvelle. Nestlé Nespresso SA a annoncé jeudi son intention de construire son troisième centre de production à Romont. Après Orbe et Avenches, le chef-lieu glânois deviendra aussi une capitale du café en capsule.
Une visibilité bienvenue pour le district qui traîne depuis quelques années l’étiquette de région sinistrée. Les licenciements de Tetra pak – qui s’est néanmoins refait une santé depuis – ou encore l’annonce de la venue de l’entreprise fantôme AGE International avaient laissé des traces dans le chef-lieu. Ses autorités tentaient depuis longtemps de redorer le blason de la région… La mission semble d’ores et déjà accomplie.
Séduit par le ferroutage
Le projet, qui devrait ressembler énormément à celui d’Avenches, prévoit la création de 200 emplois directs dans un premier temps, et de 400 emplois à terme. «Ce troisième centre de production nous permettra de répondre à la demande croissante, a expliqué Patrice Bula, directeur général de Nestlé et président du conseil d’administration de Nespresso. Nous avons été convaincus par ce site de production.»
Nespresso s’implantera dans la zone en Raboud, vis-à-vis de Tetra Pak. Sur le terrain où Michel Cailleau prévoit son projet baptisé Carrédémeraude, pensé en plusieurs phases. La première, baptisée SwissCortex, est prête à être mise à l’enquête (La Gruyère du 10 mars). «Ce projet est maintenu, explique le directeur d’Abadia SA. Les autres phases, soit trois nouveaux bâtiments, dont deux usines 100% écologiques seront bientôt mises à l’enquête.»
Michel Cailleau cède ainsi 60000 m2 de terrain à Nespresso. «La commune est en discussion directe avec Nespresso», précise le syndic Roger Brodard. Les travaux devraient débuter à la fin de cette année. La production démarrera, elle, à la fin 2015.
Concurrence européenne
Le site conserve néanmoins sa vocation éco-industrielle souhaitée par le directeur d’Abadia. L’accès au ferroutage et les infrastructures ont également convaincu la multinationale. «C’est l’achèvement d’un processus qui a permis à la Suisse de l’emporter sur la concurrence internationale pour cette implantation», a dévoilé Eugenio Simioni, directeur général de Nestlé Suisse. L’entreprise veveysanne ne soufflera pas un mot sur les autres concurrents. Ni le Conseil d’Etat ne révélera le deuxième site fribourgeois qui était en concurrence avec Romont.
«Les atouts de Fribourg sont avant tout un bassin de population important, de la main-d’œuvre qualifiée, des liaisons ferroviaires et des accès routiers de qualité, a énuméré le directeur de l’économie, Beat Vonlanthen. Il y a bien un soutien financier et fiscal, mais je vous rappelle que depuis deux ans le canton de Fribourg ne profite plus de l’arrêté Bonny et n’accorde donc plus d’allégements fiscaux.»
Et Patrice Bula de compléter: «Si les seuls critères fiscaux avaient été retenus, alors nous n’aurions certainement pas choisi la Suisse. Les critères qualitatifs ont été déterminants et Nestlé a une présence historique dans le canton de Fribourg. Nous sommes fiers de nos racines suisses, c’est une des forces de notre succès.»
Implantation historique
Le directeur de la Promotion économique, Jean-Luc Mossier est, quant à lui, revenu sur le travail effectué avec beaucoup de célérité et de discrétion par les différents acteurs cantonaux. «Les premiers contacts datent de juin 2011. Nous avons été contactés pour trouver un terrain pour une société dont le nom était alors secret, mais qui se situait dans le top 100 des entreprises mondiales.»
La Promotion économique qui souligne, par la voix de son responsable communication, Christoph Aebischer, que «c’est l’une des plus importantes implantations industrielles dans l’histoire du canton».
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«Romont sinistré, c’en est fini»
Maurice Ropraz, directeur de l’aménagement, de l’environnement et des constructions
«Comme Gruérien, je me réjouis, car plus on boit de café, plus on vend de crème», a rigolé Maurice Ropraz. Le conseiller d’Etat a relevé que l’implantation de Nespresso à Romont était une heureuse nouvelle pour le canton de Fribourg. «La procédure pour la réalisation de ce projet a pu être rapidement définie. Les modifications du PAL et du PAD de la zone en Raboud devront être mises à l’enquête publique, nous souhaiterions pouvoir le faire le 18 mai prochain.»
Beat Vonlanthen, directeur de l’Economie et de l’emploi
«L’histoire d’amour entre Nestlé et le canton de Fribourg est déjà ancienne, 114 ans après l’inauguration de la fabrique Cailler à Broc, mais elle est surtout pleine d’avenir», a annoncé Beat Vonlanthen à la presse. Le conseiller d’Etat a salué le dynamisme du canton, dont l’attractivité est «une réalité bien tangible». Et qui lui a donné l’occasion de lancer un nouveau slogan: «Fribourg, what else?»
Willy Schorderet, préfet de la Glâne
Willy Schorderet n’a été mis dans le secret que très récemment, mais il est «excessivement content» pour son district.
«Si Nespresso vient à Romont, c’est aussi grâce aux entreprises déjà présentes qui font le tissu, mais aussi le caractère de notre district.» Cette implantation demande aussi à la Glâne de suivre en matière d’infrastructures. «Cette venue nous conforte
dans les investissements prévus pour le CO de la Glâne ou les homes. Ça pose néanmoins la question des infrastructures routières. Doit-on songer plus rapidement à un contournement pour Romont?»
Roger Brodard, syndic de Romont
«C’en est fini de l’étiquette de Romont et de la Glâne sinistrés, se réjouit Roger Brodard. L’heure de Romont a sonné. On le sentait, il fallait être prêts à prendre des risques.» L’annonce a créé la surprise dans le chef-lieu. La séance
du Conseil général qui s’est tenue jeudi soir s’est d’ailleurs ouverte par une salve d’applaudissements. LG
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