Par Jean Godel
Dans l’attente de la présentation des résultats de l’étude de faisabilité pour un centre de soins aigus dans tout le canton, voilà un communiqué de presse de l’HFR qui, pour l’heure en tout cas, pourrait ne pas être porteur que de mauvaises nouvelles pour le sud du canton. En effet, l’Hôpital fribourgeois a annoncé hier la réorganisation de ses blocs opératoires de Fribourg, Riaz et Tavel et la création d’un département des centres opératoires. C’est le Bullois d’origine Dominique Thorin qui le dirigera.
De cette gestion unique et centralisée, l’HFR attend une utilisation plus efficiente de ses plateaux médico-techniques. Il s’agit de mieux coordonner et répartir les activités opératoires en fonction des besoins et des disponibilités des salles d’opération, «l’outil de travail le plus onéreux de l’HFR», précise le communiqué. Bon à prendre au vu des contraintes économiques induites par le nouveau financement hospitalier.
L’HFR rappelle que la création de ce département des centres opératoires s’inscrit «dans une réflexion plus large» sur la réorganisation des départements médicaux et administratifs. En clair, après les blocs opératoires et la gynécologie, suivra la départementalisation de la chirurgie, de la médecine et des services de la logistique médicale (anesthésie, urgences et soins intensifs). Les centres opératoires jouent d’ailleurs le rôle de projet pilote.
Pour l’heure, on se souvient de la fermeture, en septembre, du bloc de Tavel le week-end et la nuit. Une décision souvent dénoncée comme étant les prémices d’une fermeture totale. Pour le Dr Dominique Thorin, la réorganisation annoncée hier est au contraire une opportunité de développer les activités des sites périphériques de Riaz et Tavel. Spécialiste en anesthésiologie, responsable jusque-là des blocs opératoires du site de Fribourg et nommé médecin-chef à cette occasion, il répond aux questions de La Gruyère.
Quel impact cette réorganisation aura-t-elle à Riaz et Tavel?
C’est un changement total de paradigme: nous passons d’une organisation par service et par hôpital à une organisation transversale au sein d’un département unique. Il n’y aura plus qu’un seul service opératoire.
A partir de quand?
Dès le 1er janvier 2013. Mais des transferts ont déjà eu lieu sur Tavel et nous sommes en discussion avec Riaz.
Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire?
L’HFR dispose physiquement de 15 salles d’opération: neuf à Fribourg, quatre à Riaz et deux à Tavel. Or, dans les faits, Fribourg est surchargé alors que les blocs périphériques de Riaz et Tavel sont sous-utilisés. Pour les exploiter au mieux, nous allons y transférer des activités électives.
Activités électives?…
Riaz et Tavel doivent faire ce qui est dans leurs compétences. Idéalement, ce sont des opérations en ambulatoire ou ne nécessitant qu’une nuit d’hospitalisation. Ce peut être aussi des opérations complexes pour autant que le patient soit par ailleurs bien portant. Par exemple on opérera à Riaz l’épaule d’un jeune homme sain, pas un malade qui a subi un infarctus. Pour des opérations bien choisies, avec la collaboration de tout le monde, je suis quasiment certain que Riaz et Tavel seront plus efficients et plus économiques que Fribourg pour ce qui est de l’activité du bloc opératoire.
Pourquoi?
Le gaspillage, c’est la sous-utilisation d’une infrastructure existante et de son personnel. Un bloc, c’est au minimum deux instrumentistes, une aide de salle et une infirmière anesthésiste (sans parler du médecin). Ça coûte entre 20 et 30 francs la minute, qu’on opère ou non. Or, à l’avenir, Riaz et Tavel opéreront plus, plus rapidement, avec des suites postopératoires plus simples. En outre, le personnel déjà formé pratiquera plus souvent et les sites n’auront pas nécessairement à assumer la formation, mission de Fribourg.
Y aura-t-il assez de travail pour Riaz et Tavel?
Aujourd’hui, Fribourg est surchargé: il y a des listes d’attente et des opérations qui, normalement, devraient avoir lieu le jour sont pratiquées la nuit, par du personnel fatigué appartenant à des équipes de garde qui coûtent plus cher, parce que présentes 24 h sur 24. Il faut répar-tir équitablement et intelligemment le travail. A l’heure actuelle, nous avons absolument besoin des infrastructures de Riaz et Tavel.
Faut-il craindre des suppressions de postes à Fribourg?
Non. C’est la charge de travail qui variera. Elle redeviendra normale à Fribourg et augmentera à Riaz et Tavel. Potentiellement, ce sont les opérants et les opérés qui seront déplacés selon les cas, pas le personnel des salles. Pour quel gain d’efficience? Il peut être considérable, entre 15 et 30%. Or, placés au centre de toutes les activités d’un hôpital, les blocs opératoires en sont le premier centre de coûts. Ils représentent 20 à 30% du budget de fonctionnement. Mais la condition, c’est une structure polyvalente et mutualisée, ce qui n’est pas le cas de l’HFR à l’heure actuelle.
Quelles sont les conséquences pour la maternité de Riaz?
La dynamique de l’obstétrique est particulière à cause des difficultés de recrutement. Mais il n’y a pas que l’obstétrique, loin de là! Le bloc opératoire de Riaz touche l’ensemble des soins. Même en cas de fermeture de l’obstétrique, nous avons l’intention d’amener à Riaz bien plus d’opérations que nous n’en perdrions.
Cette réorganisation remet-elle en cause l’idée d’un centre unique de soins aigus?
Là, vous parlez d’une vision à long terme. La question sera alors de savoir si l’on veut un centre de soins aigus réparti sur un, deux ou trois sites. Moi, je vous parle des dix à quinze prochaines années durant lesquelles nous montrerons l’économicité de Tavel et Riaz.
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