PAR ANGELIQUE RIME
Disponible, expérimenté, curieux, mais aussi dévoué ou encore connaisseur du terreau régional. Les qualificatifs élogieux pleuvent pour décrire les retraités assumant une charge de conseiller communal. Dans les districts de la Gruyère, de la Glâne et de la Veveyse, les plus de 65 ans représentent environ 10% du total des édiles. «Nous ne sommes pas face à une gouvernance du troisième âge», relativise Michel Chevalley, préfet de la Veveyse.
Pourtant, les aînés sont de plus en plus nombreux à briguer des postes dans les exécutifs communaux. «A cet âge, leur santé est encore bonne. Ces personnes ont donc un potentiel énorme sur lequel misent les partis politiques. Ils sont aussi très demandés comme bénévoles par nombre d’associations, au point qu’ils en deviennent parfois stressés», avance Patrice Borcard, préfet de la Gruyère.
Le magistrat gruérien met d’ailleurs en avant le problème de gouvernance auquel font face les communes. «L’engagement en temps, la complexité des dossiers et la présence dans diverses commissions deviennent tels qu’il est difficile pour les élus de concilier leurs vies professionnelle, familiale et politique.»
Esprit clair pour les séances
Michel Mauron, syndic de Siviriez depuis 2004, déclare d’ailleurs «qu’il n’aurait jamais accepté ce poste s’il n’avait pas été à la retraite. C’est une telle charge que je comprends que certains ne veulent pas l’assumer. Il suffit d’observer le nombre de conseillers qui démissionnent... De plus, lorsque j’aborde une séance, j’ai l’esprit clair et je ne suis pas happé par des soucis d’ordre professionnel», déclare le Glânois de 70 ans, qui détient la palme du syndic le plus âgé du canton.
Même son de cloche du côté de l’élu charmeysan Yves Page, 65 ans, qui qualifie même «d’impossible» la conciliation entre un mandat de conseiller communal et un travail à temps plein. «Les seules personnes qui peuvent peut-être se le permettre sont les chefs d’entreprise qui maîtrisent eux-mêmes leur agenda», déclare ce dernier, qui a calculé avoir participé à 249 réunions en une année.
Un mandat bienvenu
Pour soulager leurs collègues, les édiles retraités se chargent souvent des représentations relatives à la commune agendées durant la journée. «Je me rends régulièrement au tribunal ou aux séances avec le juge de paix, décrit William Horner, 72 ans, conseiller communal à Broc. Mais je ne travaille pas forcément plus que mes confrères. Chaque dicastère a ses spécificités.»
A 66 ans, Didier Bütikofer, syndic de Crésuz, ajoute que s’il ne s’engage pas davantage que les autres, il prend plus de temps pour effectuer ses tâches, notamment lorsqu’il s’agit de rencontrer des citoyens.
Ces heures passées au service de la collectivité, les retraités les offrent volontiers. «Dans ma vie, je n’ai jamais arrêté de travailler. Heureusement que je remplis ce mandat, sinon je me serais ennuyée!» confie Christiane Houriet, 67 ans, conseillère communale à Granges. Une caractéristique que note également le préfet de la Glâne, Willy Schorderet: «Ces élus se sont souvent beaucoup engagés dans le domaine privé et veulent continuer dans le domaine public.»
Si la majorité des conseillers retraités voient dans leur mandat un moyen de rendre service à la société, certains l’ont accepté presque sous la contrainte. «J’ai déjà siégé au Conseil communal de 1978 à 1993. Je voulais laisser la place aux jeunes, mais on a tellement insisté que j’ai fini par dire oui», déclare Roger Braillard, 65 ans, conseiller communal à Saint-Martin. Comme le Veveysan, il n’est pas rare que les retraités siégeant actuellement au sein d’un exécutif communal aient déjà assumé un mandat alors qu’ils étaient dans la vie active.
Est-ce là le symptôme d’un manque de relève? Michel Chevalley répond par la négative. «Il est certain qu’il est de plus en plus difficile de trouver des citoyens prêts à s’engager. Cependant, lors des dernières élections en Veveyse, nous n’avons pas eu trop de problèmes à remplir les listes.» Les préfets des trois districts du Sud fribourgeois s’accordent pourtant à dire que des adaptations sont nécessaires pour réduire la charge de travail dévolue aux conseillers communaux, notamment par la mise en place de services techniques.
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En chiffres
En Veveyse, six conseillers communaux sur 65 ne sont plus dans la vie active, soit 9,2%. En Gruyère, le pourcentage se monte à 6,3% (11 édiles sur 174), tandis qu’en Glâne, les retraités représentent 9,75% (12 élus sur 123). Notons également que dans ce dernier district, l’âge moyen des conseillers communaux est de 50 ans. La cadette est âgée de 24 ans et les deux plus anciens de 70 ans. AR
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