PAR JEAN GODEL
Qu’est-ce qui vous motive à lâcher votre poste de conseiller national?
Changer. J’aime le côté législatif, son débat d’idées, mais l’occasion s’offre aujourd’hui de concrétiser ces idées.
Le PS pèse 26% au Grand Conseil, un tiers avec ses alliés: comment peut-il revendiquer la majorité au Conseil d’Etat?
Selon l’approche mathématique, c’est l’UDC qui doit prendre le siège. Je constate simplement que le PDC revendique un troisième siège alors qu’il a la même force électorale que le PS.
Sauf que la droite pèse plus lourd que la gauche au Grand Conseil…
Il n’y a pas de bloc uni de droite au Grand Conseil, pas plus que dans l’élection qui nous attend. D’autre part, il faut bien voir que sur de nombreux dossiers importants, les Fribourgeois votent social, au centre gauche. Avec un représentant de l’aile économique du PDC, le Gouvernement s’éloignerait de ces positions.
Votre stratégie consistera à peindre Jean-Pierre Siggen comme un «PDC d’extrême droite»?
Pas besoin de stratégie! Il suffit de comparer les personnes. Isabelle Chassot est une démocrate-chrétienne pragmatique, centriste, dont la politique familiale et sociale est relativement proche des idées que je défends. En face, il y a un politicien qui a été à la tête des députés ayant estimé que l’on pouvait massivement baisser l’assiette fiscale de ce canton, contre l’avis du ministre radical des finances de l’époque Claude Lässer. Il faut l’assumer.
Il y a trente ans, le PS revendiquait la proportionnelle pour des raisons d’équilibre et d’équité. Ce n’est plus valable aujourd’hui?
Je suis surpris que des opposants à la proportionnelle d’alors viennent nous dire maintenant qu’il faut l’appliquer alors même que le peuple n’en a pas voulu… Il y a un vrai intérêt à avoir au gouvernement des forces un peu différentes de celles au Grand Conseil, des forces plus proches des sensibilités de la population sur des objets importants. Avec trois représentants de la gauche, trois de la droite et, au milieu, la représentante des Verts, on a une composition relativement équilibrée, sans camp qui domine.
Vous ne craignez pas un blocage avec le Grand Conseil?
Ça dépend beaucoup des personnes. Le canton de Vaud a très bien évolué ces dernières années avec un Gouvernement à majorité de gauche, mais des personnalités fortes, visionnaires, orientées solutions face à un Grand Conseil de droite.
Si vous êtes élu, le PS ne se retrouverait-il pas dans une situation délicate au Conseil national avec trois «bleus» dont Andréa Wassmer qui vous succéderait?
Il faut toujours se souvenir de quoi chacun de nous avait l’air en entrant en politique. Je me rappelle de la première participation de Peter Bodenmann à l’émission Arena: il était juste mauvais. Mais il a appris et est devenu l’une des figures emblématiques du PS. Tant Valérie Piller qu’Ursula Schneider Schüttel ont peu à peu trouvé leur place à Berne.
Quel conseiller d’Etat voulez-vous être?
Je suis un homme de dialogue. Dans notre système suisse, il faut trouver des majorités en convainquant des collègues d’autres partis. Or je pratique cela au quotidien, c’est le moteur de mon action: discuter, de manière conflictuelle s’il le faut, dans la mesure où cela apporte de meilleures solutions.
Quelle vision pour le canton?
Pour ne parler que de sa forte croissance démographique, je constate que Fribourg a créé dix fois moins d’emplois qu’il a gagné d’habitants. C’est alarmant! On doit réfléchir à cette démographie: est-elle un avantage ou faut-il la freiner un peu? Il faut surtout développer des emplois qui profitent de nos pôles de formation. Notre canton doit avoir le courage de s’endetter un peu pour miser sur le développement de la formation en le liant à la création d’emplois.
Votre Direction de prédilection?
En cas d’élection, c’est au collège de choisir. Par mon parcours professionnel et politique, je connais bien les dossiers de l’Instruction publique. Par ailleurs, je pense que les changements permanents de département ne sont pas bons pour le fonctionnement de l’Etat car ils décrédibilisent une partie de son action et démotivent les collaborateurs.
Votre principale qualité?
La bonne connaissance des dossiers.
Votre principal défaut?
L’impatience.
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Pour ou contre…
…la fermeture de la maternité de Riaz?
Je ne dispose pas de tous les éléments qui pourraient aujourd'hui me convaincre de cette fermeture, notamment pour ce qui est de l'objectif de qualité qui doit être primordial. Il y a un gros potentiel de collaboration entre l’Hôpital cantonal et l’hôpital Daler, ce qui pourrait favoriser le maintien de certaines prestations à Riaz dans la mesure où cela permettrait une meilleure répartition des patientes. Si je devais être amené à choisir, j’irais donc voir de près avant de prendre une décision définitive.
…les mesures d’économies préconisées par l’Etat?
Quand Urs Schwaller était ministre des Finances il y a une vingtaine d’années et que le canton était déjà dans une situation délicate, il avait posé trois principes: discuter des solutions, équilibrer l’assainissement entre recettes et dépenses, prendre si possible des mesures limitées dans le temps de manière à ne punir personne. Je ne vois pas pourquoi ce qui était envisageable sous Schwaller ne l’est plus aujourd’hui.
… le contournement routier de Guin?
Le tronçon Birch-Luggiwil doit pouvoir être construit rapidement car le branchement vers le nord est la principale cause des engorgements. L’autre tronçon demande réflexion: on ne sait pas encore quels seront les impacts de l’ouverture du pont de la Poya sur la circulation à Guin. Or il est évident qu’une partie de la Basse-Singine ira prendre l’autoroute à Fribourg-Nord et non plus à Guin.
… l’exonération de la solde de sapeurs-pompiers jusqu’à 9000 fr.?
Le plafond actuel à 5000 francs est contre-productif car il punit et démotive ceux qui s’engagent plus alors que l’on a toujours plus de peine à trouver des sapeurs-pompiers. C’est une question de reconnaissance d’un travail dont la rémunération est plus que symbolique.
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