Vite avant leur départ

| sam, 13. jui. 2013
Il y a des choses qu’on ne fait qu’à la belle saison, comme récolter le tabac ou faire des fouilles archéologiques. Cet été, La Gruyère vous invite à en découvrir quelques-unes. Pour le premier épisode, elle a suivi deux ornithologues.

PAR SOPHIE ROULIN

Un sac à dos, des jumelles, une casquette et… des souliers de ville. C’est qu’aujourd’hui Jérôme Gremaud et Yann Rime font la chasse aux hirondelles de fenêtre. Et pas besoin de gravir des talus, de longer des ruisseaux, ni de grimper dans les arbres, Delichon urbicum – pour les intimes – niche sous les avant-toits des bâtiments. Il suffit donc de lever le nez dans la rue pour repérer les habitations de ces passereaux.
Premier arrêt à Riaz. Il ne faut pas longtemps aux deux ornithologues pour trouver plusieurs nids, accrochés sous l’avant-toit d’un édifice de l’hôpital. «Le chantier de l’agrandissement des urgences n’a pas l’air de déranger les hirondelles», relève Jérôme Gremaud. Sur un plan du village, le biologiste indépendant numérote les bâtisses où les oiseaux à la robe noire et blanche sont présents. Avec ses jumelles, il vérifie si les nids sont occupés. «Mais le plus simple reste encore d’attendre le retour des adultes.»
Si les ornithologues ont patienté jusqu’à maintenant pour recenser les hirondelles de fenêtre, c’est que la période est la plus favorable pour connaître les nids occupés grâce aux allers et venues des parents, en pleine corvée de nourrissage. Pas besoin d’attendre longtemps pour observer le ballet des adultes qui se succèdent pour sustenter les oisillons. «A l’intérieur du nid, les petits tournent comme sur un carrousel pour avoir droit chacun son tour à la becquée.» Pour ce petit monde, le temps presse. A la fin du mois, elles auront pris la direction de leurs quartiers d’hiver, en Afrique subsaharienne.
Plus loin sur la route des Monts, une villa abrite plusieurs nids sur deux de ces faces. «Tous les propriétaires n’acceptent pas que les hirondelles s’établissent ainsi», note Jérôme Gremaud. Et Yann Rime de reprendre: «Ma grand-mère disait qu’à l’époque on laissait les nids d’hirondelle parce que cela portait chance. Aujourd’hui, les gens disent que cela apporte des fientes. La tolérance n’est plus la même.»
Les oisillons nés ici reviendront se reproduire dans la région, mais pas forcément dans le nid qui les a vus éclore. «En revanche, quand un couple a choisi un endroit pour nidifier, il revient toujours. Même si son nid est détruit année après année.»


Sur la liste rouge
Depuis l’année dernière, l’hirondelle de fenêtre figure sur la liste rouge. Hormis la disparition des espaces où elle peut nicher, d’autres explications sont avancées pour la diminution de son effectif. Certains évoquent la raréfaction des flaques d’eau où elle trouve la boue pour fabriquer son nid, à mettre en lien avec le goudronnage des chemins. D’autres mentionnent la diminution des zones naturelles et avec elles de celle des insectes, dont se nourrit l’hirondelle.
Le recensement en cours permettra d’en savoir plus sur leur évolution. Il se fait dans le cadre du renouvellement de l’Atlas des oiseaux nicheurs. «C’est un travail qui se fait tous les vingt ans, explique Jérôme Gremaud. La Suisse est divisée en 500 carrés de 10 km sur 10 km. Pour chaque carré, un volontaire est responsable du recensement.» Tout se fait de manière bénévole. Le biologiste, installé à La Tour-de-Trême, est en charge du carré qui entoure Bulle, ainsi que de la coordination sur l’ensemble du canton de Fribourg. Quant à Yann Rime, il est stagiaire auprès de la Station ornithologique suisse de Sempach.


Grosse colonie au Pré de l’Essert
Se basant sur l’Atlas de 1993-1996, les naturalistes prennent la direction du Pré de l’Essert, à Charmey – non sans avoir avisé le propriétaire. Autour de la ferme, 29 nids étaient alors occupés. «C’est assez rare qu’une colonie s’installe dans un endroit aussi isolé», relève Jérôme Gremaud. Sur place, la ferme présente toujours un nombre impressionnant de nids, 58 au total, répartis entre l’habitation et la grange. «Dix-huit sont occupés. C’est moins qu’il y a vingt ans, mais cela reste une grosse colonie.»
De quoi réjouir les ornithologues. Mais leur attention est ailleurs. Au-dessus des Dents-Vertes tournoient des oiseaux bien plus impressionnants: des vautours. Rarissimes en Suisse jusqu’à il y a dix ans, ils sont depuis régulièrement observés dans les Alpes et les Préalpes. Jérôme Gremaud en a observé une quinzaine au début juillet autour du Kaiseregg. «Leur retour est probablement à mettre en lien avec celui du loup», glisse le biologiste. Mais restons avec nos hirondelles…

Pour signaler la présence de nids: www.delichon.ch

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