La majorité à l’exécutif au cœur du duel PDC/PS

| mar, 13. aoû. 2013
Depuis lundi à 12 h, c’est officiel, ils sont trois à briguer la succession d’Isabelle Chassot qui part diriger à Berne, dès le 1er novembre, l’Office fédéral de la culture sous le haut patronage du conseiller fédéral Alain Berset.


PAR MICHELINE HAEGELI


Les trois hommes sont Jean-Pierre Siggen, 51 ans, député PDC et directeur de l’Union patronale fribourgeoise, Jean-François Steiert, 52 ans, conseiller national PS, délégué aux affaires intercantonales du Département vaudois de la formation et de la jeunesse, ainsi qu’Alfons Gratwohl, 62 ans, conseiller communal à Surpierre et président du Mouvement citoyen indépendant (MCI).
Ils ont six semaines pour convaincre les citoyens que leur projet et leur personnalité les rendent incontournables au Gouvernement cantonal. Sauf tout le respect que l’on doit à la candidature d’Alfons Gratwohl, ce dernier n’a aucune chance dans ce scrutin.


Mouche du coche
Certes sa combativité politique est bien connue: il est à l’origine du référendum lancé avec succès en 2000 contre la révision de la Loi scolaire prévoyant l’apprentissage de l’allemand par immersion. Le troisième candidat n’est pas dupe et évalue ses chances à leur juste aune. Il entend surtout donner le choix aux Fribourgeois de dépasser les étiquettes et la politique politicienne et, surtout, le clivage droite-gauche.


Droite contre gauche
C’est pourtant très exactement en ces termes de droite contre gauche que la question se pose aux citoyens: s’ils veulent un Gouvernement cantonal à majorité de droite, ils voteront Jean-Pierre Siggen. Si au contraire, ils veulent mettre le curseur à gauche, ils opteront pour Jean-François Steiert.
L’influence d’Alfons Gratwohl se portera plutôt sur l’éventualité d’un second tour: à savoir s’il grapille suffisamment de voix pour empêcher une majorité de se concrétiser au premier tour déjà. Il pourrait aussi attirer des électeurs PDC que le psychodrame autour de l’alliance de droite a excédé. Pour ceux-ci, ce serait une façon de dire «zut» à ce parti au premier tour, sans pour autant les empêcher de retourner au bercail au second. Il faudrait une très grosse colère de certains PDC pour faire la courte échelle à un socialiste. Les décisions de deux assemblées des délégués (AD) très clairement en faveur de la personne ou des choix de Jean-Pierre Siggen ne parlent pas en faveur d’un tel scénario.


Majorité d’emblée
Rappelons-nous, le 20 juin, les 338 délégués démocrates-chrétiens au premier tour: Jean-Pierre Siggen obtient d’emblée la majorité absolue avec 174 voix. Il distance ainsi la chancelière d’Etat Danielle Gagnaux, qui engrange 111 bulletins, et Jean-Luc Vez, directeur de l’Office fédéral de la police et ses 53 voix.
Certains avaient pronostiqué une foire d’empoigne à cette assemblée, pourtant, la majorité s’est faite très rapidement sur le nom de Jean-Pierre Siggen, sans grandes palabres. Le manque de charisme reproché à leur poulain ne les a pas ébranlés, à lui non plus. Ce dernier reconnaît ne pas être bling-bling, mais plutôt discret. Cependant, il se soigne et apprend à aller au contact de la population.


Les pieds dans le plat
Les grandes subtilités politiques et les affres de la langue de bois ne sont pas son genre: l’homme annonce clairement la couleur au risque de mettre les pieds dans le plat. L’alliance avec l’UDC ne lui fait pas peur, il le dit, alors que ses coreligionnaires se déchirent. Avec le président du parti Eric Menoud, il n’a pas varié de sa ligne et la base du parti lui a donné raison lors de l’AD du 26 juillet.
Par 205 voix contre 35, les délégués votent en faveur de l’alliance avec le PLR et l’UDC pour l’élection complémentaire du 22 septembre et les élections cantonales de 2016. Ils mettent fin sans état d’âme à ce que le conseiller d’Etat Beat Vonlanthen a appelé des valses-hésitations. Les Jeunes démocrates-chrétiens émettent des réserves, comme ils l’avaient déjà fait il y a des années alors qu’il n’était question que d’alliance avec le PLR, privilégiant la défense des valeurs propres au parti.
Reste à savoir tout de même, en dépit de ce rabibochage général de dernière minute, si la droite ne pâtira pas des nombreux rebondissements qui ont précédé une naissance aux forceps de l’alliance des trois partis de droite. Car les atermoiements n’ont pas manqué.
Fin juin, la présidence du PDC concoctait une convention avec le PLR et l’UDC portant sur les échéances électorales de 2013, 2015 et 2016. Soit en vue des élections cantonales et fédérales. A charge des différentes assemblées de parti de les avaliser. Le 5 juillet, le comité directeur du PDC refusait net la convention, au motif que les divergences avec l’UDC étaient trop importantes pour les fédérales.


Grogne de la base
Il annulait dans la foulée l’assemblée des délégués du 11 juillet. Une véritable bronca, appuyée par des demandes formelles, réintroduisait une assemblée le 26 juillet avec les suites que l’on sait. Non sans avoir sérieusement énervé le PLR et l’UDC avec ses «je t’aime moi non plus».


Un certain petchi
L’annonce le 7 mai par la conseillère d’Etat Isabelle Chassot de son retrait fin octobre a semé une certaine pagaille à droite. Aussi bien le PDC que le PLR ne s’y attendaient pas et mettre en place une stratégie commune à droite en si peu de temps n’était pas chose facile. Le besoin de serrer les rangs face à un Parti socialiste ayant le vent en poupe se faisait sentir, mais sans urgence au niveau du calendrier.
Non seulement le PS disposait au lendemain des élections cantonales de 2011 de quasi autant de députés au Grand conseil que le PDC, mais en outre il plaçait Christian Levrat dans un fauteuil au Conseil des Etats.
Le conseiller national sortant ratissait large, bien au-delà de son parti, et de la gauche en général. Enfin, le PS voyait un des siens brillamment élu au Conseil fédéral, de quoi revigorer plus d’un militant. Au point de ne pas juger irréaliste de briguer la majorité au Gouvernement alors que la droite dans son ensemble est majoritaire à quasi trois contre un au Grand Conseil.
Car mathématiquement, l’élection est pliée, la droite étant clairement majoritaire dans le canton de Fribourg. Mais, il n’y a pas que les mathématiques. La personnalité, l’image, les idées et surtout la manière de les défendre ont leur place. Et là, le PS a joué finement.


Union et discipline
Sans se presser, le 26 juin, son comité directeur annonçait avoir choisi à l’unanimité Jean-François Steiert. Il ne cachait pas qu’il y avait eu d’autres candidats et qu’il avait contacté d’autres prétendants potentiels, démontrant gentiment au passage que la relève ne manquait pas.
Le congrès se prononçait comme un seul homme par applaudissement pour le candidat officiel. Le tout dans la joie et la bonne humeur et la plus parfaite Realpolitik: soutenir le candidat ayant le plus de chances de battre l’adversaire de droite quitte pour certains à faire peut-être le poing dans la poche. Même ceux qui avaient eu, selon la rumeur, des envies de défendre une candidature au congrès jouaient la carte de l’union faisant la force.

 
 

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