PAR MICHELINE HAEGELI
L’affaire n’est pas dans le sac, mais le Conseil d’Etat a pris ses précautions pour faire passer la pilule. Le paquet de mesures structurelles et d’économies ne devrait pas être trop bousculé au Grand Conseil lors de la session d’octobre.
Les mesures concernant le personnel de l’Etat, soit près des 40% du paquet sur trois ans, ont déjà été négociées avec le personnel. Les communes, très bien représentées au Parlement cantonal, sont caressées dans le sens du poil: au bout du compte, le solde devrait être positif pour elles. Sans oublier que 46% des incidences financières du paquet sont du ressort exclusif du Conseil d’Etat et ne devront pas être soumises au Législatif.
Inventaire à la Prévert
Le paquet a un petit côté d’inventaire à la Prévert. Il y a vraiment de tout sous le signe de l’augmentation: l’impôt sur les chiens (de 70 à 100 francs par chien), le prix d’entrée au Musée d’art et d’histoire, les valeurs locatives (+10%) ou encore les contributions de Groupe E et de la Banque cantonale de Fribourg, ainsi que celles de l’OCN et de l’ECAB. Ces dernières ne se décrètent pas par ordonnance, mais des «discussions constructives» ont pu être menées, note le Gouvernement dans son message au Grand Conseil. Les modalités doivent encore être finalisées.
Côté subventions, l’Etat va serrer la vis. Il va baisser la part cantonale aux coûts des prestations des hôpitaux pour les patients domiciliés dans le canton, soit une économie de 25 millions pour les trois ans du programme. Il va également adapter les modalités d’octroi des réductions de primes d’assurance maladie pour les bénéficiaires de l’aide sociale matérielle, ce qui représente une économie d’un peu plus de 17 millions.
Afin d’améliorer ses revenus, le Gouvernement a renoncé à proposer d’augmenter les impôts de manière générale. Le canton de Fribourg a fait des efforts pour alléger la fiscalité, en particulier des familles, a rappelé le ministre des finances fribourgeois Georges Godel. Fribourg n’est plus en queue de peloton en moyenne suisse, en matière de charge fiscale, mais il est toujours parmi les derniers. Alors pas question de le refaire plonger.
Sacrifices du personnel
Les mesures du ressort du Grand Conseil concernent largement le personnel. Le renoncement à toute indexation avant que l’indice de référence ait atteint 112 points devrait permettre une économie de 74 millions sur trois ans à l’Etat et de 22 millions aux communes. La suppression en 2014, puis la réduction de l’augmentation annuelle devraient alléger la charge de l’Etat de 41,4 millions de francs et de 11 millions aux communes. La contribution de solidarité devrait permettre une économie de 31 millions à l’Etat et 7,6 millions aux communes.
Le Parlement devra aussi se prononcer sur une augmentation de 10% de l’impôt sur les véhicules, sur l’abaissement de
20 à 30% de la part de l’impôt sur les véhicules rétrocédée aux communes ainsi que sur une augmentation de la taxe dans le commerce des boissons alcoolisées.
Les communes gagnantes
Si le Grand Conseil accepte le paquet gouvernemental tel quel, le bilan sera globalement favorable pour les communes. Elles y gagneront en moyenne 10 millions par an, soit 3,6 millions en 2014, 10,1 mio en 2015 et 16,5 mio en 2015. «De manière générale, nous avons veillé à ne pas reporter le coût des mesures sur les communes», a déclaré la présidente du Conseil d’Etat Anne-Claude Demierre.
A l’heure où le canton se prépare au désenchevêtrement des tâches entre Etat et communes, il est préférable de partir d’un bilan positif et ne pas pousser les communes à des augmentations d’impôts, a expliqué en substance la conseillère d’Etat Marie Garnier.
Gouvernement mobilisé
A l’heure d’annoncer ces mesures, dont certaines seront nécessairement douloureuses, le Gouvernemnt s’est mobilisé et est venu en force présenter aux médias son paquet de mesures structurelles et d’économies. Les sept conseillers d’Etat ainsi que la chancelière d’Etat, le vice-chancelier et le trésorier d’Etat étaient présents.
La présidente du Gouvernement a brossé le cadre général rendant le programme nécessaire: une situation économique générale peu florissante avec un ralentissement de la progression des recettes, le financement de la santé, des assurances sociales et des EMS ainsi que la menace sur la péréquation financière intercantonale. Sans oublier la volonté de financer un service public de qualité et la responsabilité envers les générations futures.
Exigences contraires
Le canton est en quelque sorte pris en tenaille entre ces défis et des contraintes légales, la Constitution l’obligeant au respect de l’équilibre budgétaire et la loi fixant à 41% le plafond de la quote-part des subventions par rapport à la fiscalité cantonale.
La détérioration de la situation et des perspectives financières du canton ont rendu un programme d’économies incontournable. Sans mesures, le déficit cumulé sur la période 2013-2016 atteindrait 630 millions de francs et l’insuffisance de financement excéderait le milliard, a dit la présidente.
Ce n’est peut-être qu’une piètre consolation, mais Fribourg n’est de loin pas le seul canton à devoir se serrer la ceinture. Le conseiller d’Etat Georges Godel a cité une étude de l’Administration fédérale des finances selon laquelle des mesures étaient en cours ou en préparation dans 17 cantons. Le plus souvent, une centaine de mesures sont envisagées. Le volume annuel des mesures représente entre 1,5 et 6,4% du total des charges. A Fribourg, cette proportion est de 3,5%.
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Les efforts du personnel
Après la phase de consultation, le Gouvernement a atténué les sacrifices demandés à son personnel. Il a également pris en compte la forte mobilisation de celui-ci en juin dernier. La réduction de l’échelle des traitements de 0,9% se transforme en une contribution de solidarité de 1,3% en 2014 et de 1% en 2015 et 2016. Cette déduction, qui s’applique aux traitements de base dépassant le montant annuel de 39000 francs, a l’avantage de réduire l’impact de la mesure pour les classes de salaires inférieurs à 120000 francs. L’échelle comprenant davantage de paliers est abandonnée pour le moment. En revanche, la mesure consistant à surseoir à l’octroi du palier est maintenue pour 2014. Pour les années 2015 et 2016, le palier complet sera alloué à partir du mois de juillet de chaque année.
Pour mémoire, la Fédération des associations du personnel du service public du canton de Fribourg (FEDE) a accepté le 28 août de valider le plan d’économies sur sa masse salariale. «A contrecœur.» MH
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