«En Coupe du monde, tu redescends sur terre»

| mar, 21. Jan. 2014
La Coupe du monde de ski-alpinisme vivait sa première étape de la saison dans le val de Bagnes. Dimanche, les Gruériens Vincent Mabboux, Steven Girard et Rémi Bonnet se sont illustrés sur la vertical race.

PAR THIBAUD GUISAN

«Parfois, tu te crois le roi du monde dans ta région, parce tu grimpes vite au sommet de la Berra. Mais la Coupe du monde, c’est une autre histoire. Tu redescends sur terre.» Voilà comment Steven Girard décrit le circuit mondial de ski-alpinisme.
L’athlète d’Estavannens a pourtant réussi son dimanche dans le val de Bagnes. Lors de la première étape de Coupe du monde 2014, il a fêté son premier podium à ce niveau: une deuxième place en vertical race chez les espoirs. Troisième en juniors, le Charmeysan Rémi Bonnet a lui aussi décroché son premier podium en Coupe du monde, alors que Vincent Mabboux a réussi, dans l’absolu, la plus grosse perf de la matinée: meilleur Suisse, le Charmeysan s’est classé 6e de la vertical des seniors. Touts ces résultats ont été salués par une bonne délégation de supporters gruériens, venus avec cloches et drapeaux.


«Je n’en reviens pas»
Champion de Suisse de la spécialité, Vincent Mabboux, 25 ans, est précédé de cinq professionnels et il en a laissé quelques-uns derrière lui. Mieux, sur une course de 5,2 km (pour 755 mètres de dénivelé), le Gruérien a concédé moins de trente secondes au vainqueur français Mathéo Jacquemoud. «Je n’en reviens pas», confiait le Gruérien dans l’aire d’arrivée des Ruinettes, sur les hauts de Verbier. «Devant, ces gars évoluent sur une autre planète. C’est l’élite mondiale. Je ne me suis pas trop affolé. J’étais d’abord dans les quinze premiers, puis dans les dix. Dans les derniers virages, je suis revenu sur des petits groupes.»


Pas du vélo
L’art de la vertical race, c’est donc de gérer son effort. «Pour le reste, c’est chacun pour soi. Contrairement au vélo, l’aspiration ne joue pas de rôle.» Vincent Mabboux avoue qu’il était un peu tendu au départ. «Après mon titre de champion de Suisse, je ne voulais pas décevoir.» Humble, le Charmeysan ajoute qu’il était plus frais que ses adversaires, puisqu’il ne s’était pas aligné la veille sur la course individuelle.
Cette course individuelle (avec 4 montées, 4 descentes et 3 portages), disputée samedi sur les hauts de Bruson, a donné une envie de revanche à ses compères gruériens. En espoirs, Steven Girard (22 ans) a terminé 4e à vingt-huit secondes du podium – «je suis parti un peu trop vite, je l’ai payé» – alors que Rémi Bonnet (18 ans) s’est classé 6e en juniors: «J’ai trop farté mes peaux», regrette-t-il.


Girard dans son élément
En signant le lendemain leur premier podium en Coupe du monde, les deux Gruériens du Swiss Team ont fait le plein de confiance. «Au départ, le podium, c’était plus un rêve qu’un objectif, souffle Steven Girard. Les courses verticales avec des montées sèches, c’est ma discipline. Il faut de la puissance et un bon moteur. Mais en Coupe du monde, le niveau est très relevé. Sur une course verticale, il peut y avoir un coureur à l’arrivée toutes les cinq à dix secondes. Un coup de mou coûte vite cinq places. Alors que, au niveau suisse, tu perds juste dix secondes.» Contre l’Allemand Anton Palzer, il n’y avait rien à faire. «Ça fait quatre ans qu’il gagne tout», note Steven Girard.
Médaillé de bronze l’an dernier sur la vertical race des championnats du monde en juniors, Rémi Bonnet s’affirme aussi comme un spécialiste de montée verticale. «En Coupe du monde, on a plus de pression. C’est un circuit indispensable pour son apprentissage: on emmagasine beaucoup d’expérience.»


«Je le surveille»
Entraîneur du Swiss Team, Tony Sbalbi salue la performance des trois régionaux. En particulier celle de Vincent Mabboux, qui n’est pas membre de l’équipe de Suisse. «Un top 10 en Coupe du monde, c’est fort, applaudit le Français. Je surveille Vincent. La sélection nationale n’est pas arrêtée au début de l’hiver. Il est très bon descendeur et il a l’air calme et posé.»
Le sélectionneur a retenu Vincent Mabboux pour la deuxième étape de la Coupe du monde, ce week-end à Courchevel. Steven Girard et Rémi Bonnet seront aussi de la partie.

 

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«Intégrer les jeux Olympiques en 2022»
Créée en 2004, la Coupe du monde de ski-alpinisme vit sa 11e édition. Le circuit a toujours lieu en Europe. Les courses les plus au sud ont été organisées sur l’Etna, en Sicile. L’épreuve la plus au nord s’est courue à Tromsø en Norvège, à 300 km au-dessus du cercle polaire.
Le circuit – qui compte cinq étapes et dix courses cette saison – est géré par la Fédération internationale de ski-alpinisme, fondée en 2006. Une structure peu professionnalisée, puisqu’elle ne compte qu’un employé à 100%. Interview de son président, l’Italien Armando Mariotta.

Armando Mariotta, le ski-alpinisme est-il un sport mondial?
Oui, notre fédération regroupe 31 associations nationales, du Chili à la Corée du Sud. En 2014, trois nouveaux pays devraient nous rejoindre: l’Azerbaïdjan, les Pays-Bas et la Finlande. Un sport d’hiver ne peut pas viser 50 membres. Mais d’autres nations de l’ancienne URSS pourraient encore nous rejoindre.

Dans les faits, on voit très peu d’athlètes d’autres pays que les Alpes et la Scandinavie en Coupe du monde. Pourquoi?
Le problème est financier. Mais ce week-end à Verbier, il y avait quand même 16 nationalités représentées. Aux championnats du monde 2015, nous espérons des athlètes de 25 à 30 pays. Notre objectif est d’organiser une étape de Coupe du monde sur le continent américain et une autre en Asie. Mais des compétitions ont déjà lieu aux Etats-Unis et en Russie sous notre égide. La saison dernière, il y en a aussi eu en Grèce et Corée du Sud.

L’intégration du ski-alpinisme aux jeux Olympiques est-elle un objectif?
Oui, c’est même une de nos priorités. Une présence aux Jeux renforcerait notre attractivité, auprès des médias et des sponsors. Avec plus de moyens, nous pourrions par exemple encore mieux aider les jeunes. En février prochain, nous saurons si nous sommes reconnus comme une fédération olympique. Après, l’objectif serait d’être aux Jeux de 2022. Pour cela, il faudra un accord sept ans avant, soit en 2015. Le temps est court.

Quels sont vos atouts pour convaincre le Comité international olympique?
Notre sport est spectaculaire: aux Jeux d’hiver, ce serait le seul capable de montrer à la fois des montées et des descentes à skis et de l’alpinisme. En plus, il n’y a pas besoin de construire de grosses infrastructures. Il faut juste des stations de ski avec des remontées mécaniques qui permettent au public d’assister aux courses.

Les vertical races qui ont lieu le long des pistes ou juste à côté, et les épreuves de sprint avec éliminatoires sont-elles encore dans l’esprit montagnard?
Les épreuves individuelles et par équipes sont évidemment davantage dans l’esprit du ski-alpinisme. Mais, quand une discipline devient un sport de compétition, il faut aussi songer à varier les types de courses. Le ski de fond l’a fait. Les épreuves de vertical et de sprint sont formidables pour le public: elles sont courtes et nerveuses. Sur le sprint, en trois à quatre minutes, on a un concentré du ski-alpinisme: montée, descente à skis et portage.

Le ski-alpinisme connaît un boom. N’êtes-vous pas inquiet du manque de connaissance de la montagne de certains pratiquants?
C’est le rôle des fédérations nationales de former leurs athlètes. Et c’est très important. Dans notre sport, on est skieur, mais aussi alpiniste. Il est essentiel de savoir se comporter en montagne et d’en connaître les risques et dangers.

La Fédération internationale de ski-alpinisme pourrait-elle se rapprocher de la Fédération internationale de ski, voire l’intégrer?
Pourquoi pas, mais il n’y a pas de discussion dans ce sens actuellement. Une chose est sûre: nous travaillons sur le même terrain, la neige. TG
 

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