PAR THIBAUD GUISAN
C’est l’histoire de deux entreprises. La première, Laurastar SA, à Châtel-Saint-Denis, est spécialisée dans l’électroménager de luxe. La seconde, Milco SA, à Sorens et à Vuisternens-en-Ogoz, transforme 20 millions de litres de lait par an. Leur point commun: elles ont un pied en Russie. Un pays de 143 millions d’habitants avec autant de consommateurs potentiels.
La présence de Laurastar en Russie date d’une dizaine d’années. L’entreprise réalise un chiffre d’affaires de plus de
60 millions de francs, dont 70% à l’exportation (dans une quarantaine de pays). «Les ventes en Russie représentent 4 à 5% de notre chiffre d’affaires et 15% du chiffre d’affaires à l’exportation, calcule Jean Monney, directeur général. C’est un marché à fort potentiel.»
Laurastar, qui emploie environ 230 personnes – dont 130 en Veveyse – a conclu un partenariat avec un distributeur russe. «Il est important de travailler avec des gens bien introduits. Notre partenaire possède environ 20 points de vente propres et un réseau de distribution qu’il continue à développer.»
Les systèmes de repassage – conçus à Châtel-Saint-Denis, mais produits en Europe – sont disponibles à Moscou et dans sa périphérie, à Saint-Pétersbourg, à Ekaterinbourg dans l’Oural et «dans cinq ou six autres villes principales de Russie». Laurastar vend chaque année «quelques milliers de pièces», auprès d’un public plutôt aisé.
Avec M. l’ambassadeur
En octobre dernier, Jean Monney a organisé un grand événement à Moscou. Objectif: lancer un nouveau développement de la marque en Russie. «L’ambassadeur de Suisse en Russie, M. Helg, était présent, raconte avec fierté le directeur général. Il y avait une cinquantaine de personnes, dont un bon nombre de journalistes. Les retours ont été très bons.»
Depuis Vuisternens-en-Ogoz – où est réunie sa production – Milco (environ 25 employés) expédie chaque mois fromages et yogourts (de sa marque Spasseff) en Russie. L’aventure a démarré en 2010, en travaillant avec un grossiste. «La progression est positive, note Jacques Ropraz, directeur général. Nos produits sont vendus à Moscou et à Saint-Pétersbourg, dans des supermarchés plutôt haut de gamme.»
L’export représente toutefois moins de 5% des activités de la société. «La Russie, la France et l’Allemagne sont nos principaux marchés étrangers. Leur importance est comparable.»
Les spécialités de Milco ne sont pas les seules à s’exporter en Russie. Le gruyère AOP tente aussi de jouer placé. «En 2012, 168 tonnes ont été exportées en Russie», dévoile Philippe Bardet, directeur de l’interprofession basée à Pringy. «Malgré un contexte politico-économique pas toujours évident, il n’est pas utopique d’espérer doubler cette proportion dans les cinq ans à venir.»
Le gruyère à Sotchi
L’exportation vers la Russie ne représente, pour l’heure, que 1,5% du gruyère vendu à l’étranger en 2012. En comparaison, 280 tonnes ont été écoulées en Italie et 2500 en Allemagne. «Mais chaque kilo est important, note Philippe Bardet. Les Russes voyagent dans la région. Ils découvrent le produit et semblent l’apprécier.» Depuis septembre 2011, l’appellation gruyère est protégée en Russie. «Un préalable important pour une croissance.» A ce jour, seules deux entreprises – non fribourgeoises – exportent du gruyère en Russie.
Le fromage profitera des jeux Olympiques pour sa promotion. Des dégustations de fondues seront organisées autour de Sotchi, en partenariat avec l’Interprofession du gruyère. «Cinquante caquelons sont partis de Pringy pour Sotchi», glisse Philippe Bardet.
Bientôt des macarons
Après les fromages, La Gruyère a appris que les macarons Ladurée, produits à Enney, seront bientôt exportés en Russie. «Dans les dix-huit mois à venir, nous allons ouvrir trois enseignes à Moscou, boutiques et salon de thé, dévoile David Hodler, directeur général. La Russie est un marché très important. Ça fait longtemps que nous nous y intéressons. Il fallait juste trouver le bon partenaire.»
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Dans le top 5 pour Liebherr
Le symbole est fort. Devant le bâtiment administratif de Liebherr à Bulle, le drapeau russe côtoie les étendards suisse et gruérien. C’est dire si le pays compte pour Liebherr International. «C’est un des cinq marchés les plus importants, confie Kristian Küppers, porte-parole du groupe bullois. Le marché russe devient année après année plus important et sa croissance est continue.» Une contribution appréciable à un chiffre d’affaires global estimé à près de 11 milliards de francs pour 2013.
L’histoire d’amour ne date pas d’hier. Liebherr est actif en Russie depuis le début des années 1960. En 2000, le groupe a créé une société de distribution à Moscou, avant d’ouvrir dès 2006 un site de production à Nijni Novgorod.
En janvier dernier, Liebherr International communiquait avoir signé un contrat avec Kamaz pour développer et fabriquer une série de moteurs. Ce producteur de camions, détenu majoritairement par le gouvernement russe, utilisera les moteurs Liebherr pour ses camions et «des véhicules spéciaux pour l’industrie du pétrole et du gaz». En tant qu’unique producteur de moteurs du groupe, la filiale gruérienne Liebherr Machines Bulle est logiquement concernée. Le directeur du site Claude Ambrosini confirme, sans en dire plus.
Moins de 2% des exportations suisses
La Russie pèse lourd dans les affaires du groupe Liebherr. Mais, au niveau des exportations de marchandises suisses, la part russe reste encore discrète, avec 1,5% en 2012 (en termes de valeur). La Chine est devant avec près de 4%. La tendance est similaire dans le canton de Fribourg. TG
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