PAR VALENTIN CASTELLA
«C’est comme si un chat noir était passé devant ma moto pendant que je roulais. Durant la préparation, j’ai connu tous les embêtements possibles. Heureusement, ça a quelque peu tourné durant la course.» Tout juste rentré du premier Grand Prix de la saison Moto2 au Qatar, une épreuve durant laquelle il a terminé 20e, Robin Mulhauser (23 ans) a retrouvé le sourire après plusieurs mois de malchance qui l’ont vu manquer sa préparation.
Le Fribourgeois, qui a travaillé à Bulle durant plusieurs années en tant que mécanicien sur motos, revient sur ces quelques mois compliqués. Il parle également de la saison à venir en championnat du monde et de sa cohabitation avec les deux meilleurs pilotes du pays: Thomas Lüthi et Dominique Aegerter.
Robin Mulhauser, racontez-nous votre course au Qatar?
C’était compliqué. Je comptais sur les essais libres pour parfaire ma préparation, qui n’avait pas été bonne. Malheureusement, j’ai connu des problèmes techniques et je n’ai finalement roulé que trois tours, puis quinze minutes avant que la pluie ne fasse son apparition. J’avais perdu plus d’une heure de roulage par rapport aux autres. C’est pour cette raison que j’ai été en retard tout le week-end.
Une situation qui a dû être frustrante…
Bien sûr. Car c’était la première de la saison. En course, j’étais énervé. Je roulais de manière agressive, car tout s’était mal passé jusque-là.
En effet, vous enchaînez les événements malheureux depuis le début de l’année…
Je me suis fait opérer de l’épaule au mois de novembre. Normalement, il faut six mois pour récupérer à 100%. J’ai commencé les tests deux mois et demi après l’opération. Je manquais logiquement de force et de mobilité. En plus, nous avons découvert une nouvelle moto. Il a fallu s’adapter. Ce qui n’a pas été évident puisque nous n’avons roulé que quatre jours cet hiver sur les dix-sept au programme. La neige, la pluie, le froid: nous avons tout connu. Comme je n’avais pas pu régler ma moto au début en raison de mon épaule, je suis arrivé au Qatar dans des conditions difficiles. Les autres pilotes aussi ont vécu une préparation délicate. Mais eux ont pu rouler au Qatar lors des essais libres. Pas moi. Heureusement, j’ai réalisé une bonne course et j’ai terminé sur une note positive.
Quels sont vos objectifs cette année?
Terminer dans les points, soit parmi les quinze premiers. Il n’y a pas eu beaucoup de changements à l’intersaison. Pratiquement tout le monde est resté. Le niveau est donc monté d’un cran. Mais je sens que j’ai les capacités de franchir ce cap.
Vous n’êtes plus le petit nouveau cette saison. On attend davantage de vous?
Bien sûr. Cette première saison était une découverte. Maintenant, j’ai des objectifs plus élevés. Je dois faire des résultats, pour les sponsors, mais aussi pour justifier ma place dans cette équipe.
Comment gérez-vous cette pression?
Je me sens bien, car j’ai davantage confiance en moi que l’année dernière. Je sais à quoi m’attendre. Cette pression me motive. Mais elle peut aussi se retourner contre moi. Comme jeudi par exemple, lorsque je ne pouvais pas rouler lors des essais. Je me disais que des gens comptaient sur moi et que j’étais dernier. Heureusement, je peux m’appuyer sur un coach mental. Il m’aide beaucoup à rester positif. On se voit une ou deux fois par mois. Il me donne des conseils pour rester positif lorsque ça ne va pas en course.
Et la pression médiatique?
Je m’y suis habitué. L’année dernière, j’avais l’impression que tout m’arrivait dessus en même temps. La découverte des circuits, les médias, les réseaux sociaux. Maintenant, ça va mieux. J’arrive plus ou moins à gérer.
Plus ou moins?
J’ai parfois encore du mal avec certains commentaires, qu’ils soient dans la presse ou sur internet. Certains ne se gênent pas pour dire des choses négatives. Je sais que je ne dois pas en tenir compte. Mais c’est parfois difficile de ne pas répondre pour leur expliquer quelle est la réalité du circuit.
Le prochain Grand Prix, c’est au Texas du 10 au 12 avril…
Oui. C’est un circuit technique et difficile que j’apprécie beaucoup. J’espère pouvoir continuer sur la lancée de ma course au Qatar.
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Avec les deux meilleurs du pays
Cette saison, ils sont cinq pilotes suisses à être engagés dans la catégorie Moto2. Robin Mulhauser fait, lui, partie d’une formation 100% helvétique en côtoyant Thomas Lüthi et Dominique Aegerter. Soit les deux meilleurs pilotes du pays, qui se battent depuis plusieurs saisons maintenant pour la suprématie nationale. De quoi créer quelques tensions? «On s’entend bien les trois. Il n’y a pas de soucis. Certains croient que les deux sont ennemis. Mais ce n’est pas vrai. D’ailleurs, plusieurs observateurs disent que Thomas s’est ouvert depuis qu’il est avec nous.»
Le Fribourgeois poursuit: «Personnellement, j’ai découvert un mec super simple, qui ne se prend pas la tête. J’ai été surpris, car je ne m’attendais pas à découvrir une personne aussi sympathique. Au milieu de ces deux pilotes, je suis toujours le débutant. J’essaie d’apprendre le plus possible à leurs côtés. Thomas vient d’ailleurs souvent me donner des conseils.»
Ce trio a permis à l’équipe de Fred Corminboeuf de prendre une nouvelle envergure: «Nous avons participé au Salon de la moto en février à Zurich. C’était de la folie, je n’avais jamais vu ça. Les Suisses alémaniques sont beaucoup plus intéressés par la moto. Personnellement, c’est positif pour moi. Je peux ainsi me faire connaître là-bas. Mais, ce que je veux avant tout, c’est être reconnu grâce à mes résultats. Pas grâce à mes coéquipiers.» VAC
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