La playstation n’a pas tué les jeux de société

| mar, 22. déc. 2015

Les sapins de l’ère 2.0 ne cachent pas que des jouets électroniques à leur pied. C’est peut-être même grâce à leur influence que les jeux de société comptent toujours parmi les cadeaux prisés cette année. Outre les jeux cultes, le public trouve en rayons de quoi répondre à ses centres d’intérêt spécifiques.

PAR SOPHIE ROULIN

Les jeux de société n’ont pas dit leur dernier mot. A l’heure du tout numérique, on aurait pu croire cette branche à l’article de la mort, mais elle est au contraire en plein développement. Pour preuve, il y a bientôt trente ans, alors que naissait le Festival international des jeux à Cannes, entre 20 et 30 nouveaux jeux y étaient présentés. A chacune des dernières éditions, ce sont plus de 1000 nouveautés qui ont été dévoilées.
«En observant ce marché et cette créativité, on se dit qu’ils témoignent forcément d’un engouement, note Pascal Loutan, membre fondateur du club de jeux Ludivers, à Fribourg. Mais le jeu est quelque chose de peu visible, parce qu’on joue au sein d’un réseau d’amis ou en famille.»
Ce que ne contredit pas Evelyne Perone, propriétaire de la boutique spécialisée Dzuyi, à Bulle: «C’est l’essor de certains jeux, comme Dobble ou Time’s up, qui fait que, tout à coup, on parle de ce loisir un peu partout.»


Evolution de la clientèle
Pour Rita Schyrr, responsable de la communication auprès du Musée suisse du jeu, à La Tour-de-Peilz, une palette plus large de jeux de société contribue à faire vivre le marché. «Le visuel, qui se rapproche désormais de celui de la BD ou même des jeux vidéo, joue aussi un rôle pour séduire un nouveau public.»
Un public en partie constitué de jeunes parents, qui ont eux-mêmes été joueurs de jeux vidéo, mais qui se tournent vers les jeux de société pour interagir avec leurs enfants ou avec des amis.
Dans les ludothèques de la région, aucune tendance particulière n’est relevée dans le domaine des jeux de société. «S’il existe, le regain d’intérêt se situe probablement au niveau des adultes, note Chantal Pasche, présidente de la Trappe à jeu, à Bulle. Or, notre clientèle est surtout constituée de familles avec des jeunes enfants.»
Corine Mottaz, responsable de La Trottinette, à Châtel-Saint-Denis, fait le même constat et observe, en revanche, une baisse dans les locations de console de jeux. La faute probablement aux smartphones et aux offres qui y sont liées.


Influence réciproque
«Les jeux vidéo n’ont pas tué les jeux de société, bien au contraire, relève Pascal Loutan. L’un inspire l’autre et vice-versa.» Et de citer en exemple Civilization, qui était à la base un jeu de société avant d’apparaître en version électronique: «Il a ensuite été réédité en jeu de plateau à partir des versions vidéo.»
Et il n’y a pas que le graphisme pour rester tendance. Le cinéma s’en mêle également: si le Monopoly trouve une place sous les sapins cette année, les joueurs achèteront des propriétés galactiques plutôt qu’un hôtel à la Zurich Paradeplatz grâce à la version Star wars. On trouve d’autres plateaux sur les thèmes de Game of thrones, de la Reine des neiges ou d’Harry Potter.


Jeux cultes et à succès
«Il existe quelques jeux cultes, qui restent parmi les plus vendus malgré leur âge», remarque Pascal Loutan. Monopoly a été édité pour la première fois en 1935, Scrabble, en 1948, Cluedo, en 1949… «D’autres se sont récemment répandus comme des traînées de poudre: Dobble, Time’s up ou Les loups garous. On sait que le succès est au rendez-vous lorsqu’on n’a plus besoin d’aller en magasin spécialisé pour les trouver.»
Reste que les jeux à succès ne transforment pas forcément le simple quidam en joueur invétéré. «Ce n’est pas parce que l’on passe une bonne soirée entre amis qu’on va devenir accro», analyse Pascal Loutan. S’il existe des clubs de joueurs – Ludivers, à Fribourg, la Bulle de Crystal, à Bulle, La Vache qui Joue, à Estévenens, notamment – ils regroupent «des mordus» et non un large public. «Mais le jeu touche à quelque chose d’universel.» Il n’est donc pas prêt de disparaître.

 

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A chaque public son jeu

Si elle propose quelques jeux à succès dans sa boutique bulloise, Evelyne Perone offre plus volontiers des alternatives moins connues. «Il existe d’autres jeux de négoce que le Monopoly, par exemple, et on peut trouver des jeux qui correspondent à presque tous les centres d’intérêt.» Enquête, expression, casse-tête, en groupe, en solo, les déclinaisons sont quasi infinies.
«Les jeux d’expression qui font appel à l’imaginaire, comme Dixit, où l’on doit mimer des situations, tel Mim too, séduisent volontiers un public familial.» Et cette joueuse invétérée de se remémorer des parties hilarantes avec Le Monde est fou: «Un des joueurs tient le rôle du psychiatre et doit trouver ce dont souffrent ses patients.»
Et de préciser que les jeux ne sont pas forcément basés sur la compétition. «Dans Pandémie, les joueurs collaborent pour lutter contre une épidémie. Dans L’Ile interdite, ils doivent ensemble sauver quatre trésors sur une île vouée à être inondée.» Pour les accros aux jeux vidéo, il existe des jeux basés sur les mêmes principes, avec des niveaux et des étapes à passer: «Comme Andor ou Les Chevaliers de la table ronde, relève Evelyne Perone. Mais ce sont des jeux qu’on n’improvise pas et qui demandent de bien lire les règles avant de se lancer.»
Enseignante à la retraite, elle dispose également d’une palette de jeux pour professionnels – enseignants, ergothérapeutes, psychologues. «Les jeux permettent d’occuper les élèves qui ont plus de facilité en attendant les autres. Mais ils peuvent aussi proposer d’autres méthodes aux écoliers en difficulté, qui ont ainsi moins l’impression de faire de l’école.» En classe, mieux vaut éviter les jeux qui agitent et favoriser ceux qui incitent à la collaboration. «Les notions d’espace, l’anticipation, la mémoire, la gestion du stress sont des domaines que l’on peut aborder par le jeu. Autant en famille qu’à l’école.» SR

 

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