Le Conseil national a récemment débattu sur le bien-fondé de demander au Conseil fédéral de rouvrir les restaurants et ce en dépit des conseils scientifiques de ne pas le faire. On peut dès lors se poser la question si un schisme entre nécessités politique et scientifique n’a pas lieu. Ce n’est évidemment pas la première fois que la politique fait fi de l’expertise au profit d’un calcul tactique ou d’un instinct: clamée si cela résulte en victoire, décriée si la défaite se fait sentir. Malheureusement, face à ce virus, nulle petite victoire symbolique en vue, c’est un combat de longue haleine.
«Le cœur a ses raisons que la raison ignore.» Cet aphorisme de Blaise Pascal ne pourrait sembler plus approprié, aujourd’hui, quand l’affect l’emporte sur la raison. Cependant, les sciences ont à ce jour plus à apporter à nos délibérations que jamais. La méthodologie scientifique se base sur une question à laquelle répondre, faisant abstraction des distractions telles que la popularité d’une décision, mais se concentrant uniquement sur sa pertinence et son efficacité. Ainsi, la raison doit être de mise, nul ne pouvant être expert en tous domaines.
Science et politique se nourrissent mutuellement, la recherche n’existant pas sans le soutien du politique et le politique nécessitant l’analyse experte de la réalité pour prendre les décisions les plus informées possible. Il s’agit là d’un mariage vital, connaissant occasionnellement ses frictions. Comme dans toute union, tout est une question d’équilibre, la science elle-même n’étant pas sans failles: chaque domaine de recherche ayant ses limites et chaque recherche prenant du temps, le monde académique n’est pas celui vers lequel se tourner pour des prises de décisions instantanées, mais vers lequel s’informer pour qu’elles soient justes. J’invite donc tout un chacun à se souvenir que toutes les réalités sont à prendre en considération: politique, sociale, économique, écologique et sanitaire. Aucune ne survivra sans l’assistance de l’autre.
Frédéric Bussard, Gruyères