PAR VALENTIN CASTELLA
Il y a comme quelque chose de changé, à l’entrée de la forêt de Bouleyres. Depuis quelque temps maintenant, les enfants ont envahi le skatepark. Toutes les fins de journée, par beau temps, les trottinettes ont pris le pouvoir et ce sont des dizaines de jeunes aventureux qui animent désormais un skatepark version cour d’école.
Ce phénomène n’a pas échap-pé aux membres de la Stones Family. Eux, les «anciens» roulant encore en roller et en skateboard, ont mis sur pied un contest de trottinettes freestyle, qu’on appelle scooter ou trott, tout simplement. Samedi dernier avait donc lieu la troisième édition de cette compétition. Un concours qui illustre bien le renouveau de ce milieu. En effet, les enfants, accompagnés de leurs parents, étaient les seuls rois de la fête. Une image bien loin des préjugés concernant le skatepark et des débordements d’antan.
Les débuts à Montreux
Regroupant des participants âgés de 7 à 18 ans, cette compétition a permis de mettre en lumière un sport qui a explosé ces dernières années dans le monde. Et c’est à Montreux qu’il faut chercher l’origine de ce succès. En effet, c’est le Vaudois Eric Rable qui a commencé à développer ce concept. Manager de la chaîne de magasin de trottinettes Whitebox, le Neuchâtelois Benjamin Stocco raconte: «En 2002, il a commencé à faire du freestyle avec une trottinette classique. Au bout d’un certain temps, il en a eu assez de les casser. Il a donc créé, en collaboration avec une entreprise, une trottinette de freestyle, soit un modèle beaucoup plus solide.»
Facilité d’accès
En 2005, le contest de Montreux est créé par Eric Rable et le développement de ce nouvel engin peut commencer. Il a finalement conquis toute la planète, à partir de 2008. La raison? Une accessibilité immédiate: «Ce sport est simplement le plus accessible des sports extrêmes», poursuit Benjamin Stocco. Président de la Stones Family, Steven Ruiz confirme: «J’ai essayé quelques fois et il est vrai que, directement, on prend du plaisir.»
Logiquement, la trottinette a alors frappé à la porte des skateparks. Une cohabitation a dû se mettre en place entre adeptes de roller, skate et trottinette freestyle: «C’est clair que la fréquentation a changé d’un coup, se souvient David Kilchoer, membre du comité de la Stones Family. Nous accueillons maintenant beaucoup d’enfants âgés de 7 à 12 ans. Parfois même, les rampes font office de toboggans (rires). Au départ, nous avons dû nous habituer à ce changement, même si l’esprit freestyle est le même. Les petits n’ont parfois pas la notion du danger. Il ne sont pas toujours attentifs et cela peut créer des accidents.»
Pour contrer ce phénomène, les gérants du skatepark ont dû responsabiliser certains parents: «Nous avons maintenant installé un panneau à l’entrée du skatepark qui incite les parents à surveiller leurs enfants.»
Une nouvelle image
Pour la société locale, la trottinette freestyle est une chance: «Au niveau de l’image, cela démontre que le skatepark n’est pas fréquenté par des voyous, lance David Kilchoer. Et puis, cette nouveauté, qui est apparue il y a environ trois ans à Bulle, nous permet également de renouveler nos membres. C’est très positif.»
Reste à savoir si la trottinette freestyle va définitivement s’installer ou si elle n’est qu’un effet de mode: «Actuellement, cet engouement est en train de se stabiliser, reprend le manager des magasins Whitebox Benjamin Stocco. Je pense que ce phénomène va perdurer. La génération actuelle, âgée de 5 à 15 ans, va continuer à en pratiquer.» David Kilchoer confirme: «ça me fait un peu penser au roller. Certains disaient que ça allait disparaître rapidement. Cela n’a pas été le cas.»
La trottinette va-t-elle alors écraser ses nouvelles disciplines voisines que sont le roller et le skateboard? «Je ne pense pas, car chacune possède son public et ses adeptes, explique le président Steven Ruiz. Et puis, aujourd’hui, les jeunes sont désormais plus polyvalents. Ils arrivent avec leur trott, mais ils ont aussi envie d’essayer le skate et le roller. Ce n’est que du positif pour nous, qui pouvons accueillir de nouveaux membres, le tout dans un bon esprit.»
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«En constante évolution»
Lors d’un contest de trottinettes, le spectacle est permanent. Entre tous les enfants qui tentent des figures, les parents qui les encouragent et les jeunes spectateurs qui piaffent d’impatience de se retrouver sur le skatepark l’année prochaine, les animations ne manquent pas. Mais, lorsque Johan Cajas (ci-contre) s’élance, tout le monde s’arrête et regarde. Car l’homme est connu dans le milieu, que cela soit en Suisse, mais également à l’étranger.
Agé de 20 ans, le Neuchâtelois a commencé la trottinette freestyle en 2006: «J’ai gagné mes premiers contests l’année suivante. Mais je ne suis pas un grand fan des concours. Je préfère m’amuser et tenter de nouvelles figures. Car nous avons la chance de pratiquer un sport en constante évolution. Il n’existe pas depuis longtemps, donc il y a encore des choses à faire et à inventer.»
Lorsqu’il aura terminé son apprentissage, Johan Cajas espère bien pouvoir se lancer entièrement dans son sport. «Actuellement, nous sommes en train de terminer une vidéo. Il nous reste le Japon et les Etats-Unis.»
L’homme est ambitieux, car devenir professionnel n’est pas simple. Ils ne sont, en effet, qu’une petite dizaine dans le monde à vivre entièrement de ce sport.
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