Aux commandes d’une fusée

| sam, 14. juin. 2014
Newblood by Morand Racing dispute ce week-end la mythique épreuve d’endurance. Le prototype du Gruérien Benoît Morand atteindra plus de 300 km/h. Dans la peau du pilote, La Gruyère prend les commandes du bolide.

PAR THIBAUD GUISAN

Au Mans, c’est le calme avant la tempête dans le box de Newblood by Morand Racing. L’écurie du manager gruérien Benoît Morand règle les derniers détails. Ce samedi à 15 h, sa Morgan au moteur Judd, numéro 43, s’élancera sur la 82e édition des 24 Heures du Mans.
En attendant, La Gruyère a pu prendre place dans le cockpit qu’occuperont à tour de rôle les trois pilotes du team fribourgeois: Christian Klien, Gary Hirsch et Romain Brandela. Le bolide tentera de s’illustrer dans la catégorie LMP2, réunissant avant tout les prototypes des équipes privées.
Le bolide est doté des pédales habituelles: embrayage, frein et accélérateur. «Mais le pilote n’utilise l’embrayage que pour redémarrer des stands où il est obligatoire de couper le moteur», relève Cyrille Dabin, mécanicien en chef du team fribourgeois. Pour le reste, le changement de vitesses – six rapports – s’effectue sans débrayer, en actionnant des clapets situés derrière le volant. «Ça accélère le changement de rapports, qui ne dure que de millisecondes. La technologie repose sur  un compresseur de boîte de vitesses.»
En course, tous les rapports sont utilisés. «Dans une épingle à 180 degrés, il arrive que le pilote se mette en première.»


Un joystick coloré
Le volant ressemble à un joystick coloré. Le bouton bleu (START) sert à démarrer le moteur. La commande peut aussi être effectuée depuis le tableau de bord avec un même bouton bleu. A l’inverse, le bouton blanc sert à couper le moteur (KILL drink). Notamment lors de chaque arrêt au stand. La pause dure en général une trentaine de secondes: le temps de faire le plein (75 litres d’essence, capacité réglementée) et de changer les roues.
Le pilote presse sur le bouton rouge (PIT LIMIT) lors de l’entrée dans la zone des stands. «Il bloque la vitesse à 60 km/h, allure maximale autorisée dans ce secteur.» S’il veut communiquer par radio avec son stand, le conducteur appuie sur le bouton vert, situé au-dessus de sa main gauche. «Tant qu’il parle, il doit garder le bouton enfoncé.» Quant au bouton jaune, situé au-dessus de sa main droite, il sert aux appels de phare. «Il est utilisé lors des dépassements, explique Cyrille Dabin. Le pilote avertit la voiture plus lente, d’une autre catégorie, qu’il veut la doubler. L’appel de phare est aussi utilisé pour dépasser une voiture de même catégorie. Ça met la pression.»
Le volant comprend encore trois boutons noirs, à tourner. Le premier, à gauche (TC GAIN), permet de limiter le patinage en sortie de courbe: une fonction particulièrement utilisée sous la pluie. Le deuxième, à droite (TC SLIP) gère l’agressivité du pilotage, alors que le troisième bouton règle la quantité d’essence injectée dans le moteur. «L’ingénieur et le chef motoriste donnent les consignes. Plus on injecte d’essence, plus on utilise de chevaux (n.d.l.r.: limités à 495).»


Le bon vieux truc
Sur son tableau de bord digital, le pilote fait défiler les données grâce au bouton violet du volant (MARKER). «Le plus important pour lui est de connaître sa vitesse, son temps au tour et sa consommation d’essence au tour.»
Un miniplan du circuit est collé sur le volant (sur la photo, celui de Silverstone). Une bonne vieille méthode dans un bolide à la pointe de la technologie. «A son retour au stand, le pilote peut pointer du doigt le virage où il sent un problème. Ce schéma sert beaucoup. Sans lui, les pilotes seraient perdus», glisse Cyrille Dabin.

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Le Mans, du baquet aux antennes
 

Le siège
Les LMP2 ont deux places pour un seul pilote. «Il y a très longtemps, le mécanicien de l’équipe était assis à côté du pilote, raconte Benoît Morand. C’est resté une philosophie.» Les prototypes engagés au Mans ne sont donc pas des monoplaces – comme en formule 1 – où le pilote est assis au centre de la voiture. «On ne peut donc pas prendre des coques de F1 pour bâtir un prototype.»
On ne conduit pas assis, mais presque couché. Lors du relais, le pilote s’installe avec son baquet: un élément en polystyrène expansé – une matière aussi utilisée pour l’isolation de bâtiments – moulé avec la forme de son dos, qu’il place comme dossier. «Sauf Romain Brandela, chez nous, qui est très grand, et qui n’utilise pas de baquet.»

Les rétroviseurs
Etonnant: cela ne fait que depuis trois ans que les rétroviseurs sont mobiles et qu’ils peuvent être réglés par le pilote lui-même. «Avant, ils étaient fixes et il y avait forcément un ou deux pilotes qui voyaient moins bien.»
Les rétroviseurs, c’est l’assurance vie des pilotes. Ils servent notamment à évaluer les différences de vitesse entre les voitures de différentes catégories. «C’est dans les courbes que les écarts sont le plus importants, expli-que Benoît Morand. Ils vont jusqu’à
30 km/h. Les prototypes freinent beaucoup plus tard que les GTE (n.d.l.r.: voitures de tourisme d’endurance).
Cela peut aller jusqu’à 100 mètres plus tard. C’est notamment lié au poids de la voiture. Une GTE pèse 1200 kg, contre 900 kg pour une LMP2.» En ligne droite, les voitures de tourisme vont presque aussi vite que les LMP2, avec des pointes à 296-297 km/h, contre 305-306 km/h. En revanche, les LMP1 vont encore 30 à 40 km/h plus vite sur une rectiligne.

Les arceaux
Les arceaux sont les deux bosses situées derrière le pilote (1). Leur fonction: éviter que l’homme ne soit écrasé en cas de tonneaux. «On parle aussi d’antitonneaux. Deux arceaux offrent plus de sécurité qu’un seul. Et c’est mieux pour l’aérodynamisme.» Sous l’un des arceaux apparaît un gros orifice: la bride d’admission d’air (2). Avec la vitesse, l’air est propulsé dans ce trou. Il est conduit au moteur, situé à l’arrière du véhicule, qu’il a pour mission d’oxygéner. «Le diamètre est réglementé. Il limite l’entrée d’air et, par conséquent, la puissance du moteur.» Car plus un moteur est oxygéné, plus il a de puissance.

Les antennes
Trois antennes se dressent sur le bolide. La première est fixée à l’avant, sur le numéro: c’est l’antenne de télémétrie (3a). Elle transmet, en temps réel, toutes les données de la voiture au box. «Par contre, aucune information ne va du box à la voiture. Contrairement à la F1, on ne peut pas effectuer de réglages à distance. Tout se fait aux stands.»
La deuxième antenne, plus petite, se cache entre les arceaux antitonneaux (3b). Elle récolte les données liées aux pneus: pression et température de l’air à l’intérieur des gommes. Les informations, obtenues grâce à des capteurs placés sur les valves, sont transmises à l’antenne de télémétrie qui les fait suivre au box. La dernière antenne est située à la gauche du pilote: c’est la radio (3c), qui permet le contact réciproque entre le pilote et le box. TG

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