Monter sur le ring, découvrir qui on est et ce qu’on vaut

| mar, 29. mar. 2016

Organisé par le BC Châtel-Saint-Denis, le Meeting de Palézieux a permis à 24 boxeurs et boxeuses de parfaire leurs armes samedi soir. Plus encore que dans d’autres sports, le ring est un formidable révélateur de talent et de ressources morales. Trois Châtelois reviennent sur leur soirée, leurs doutes et leurs envies.

PAR KARINE ALLEMANN

Il faut beaucoup de courage pour monter sur un ring. Alors, forcément, on peut avoir la meilleure volonté du monde, une très haute opi­nion de soi-même et une excellente préparation en salle, tant que le gong n’a pas retenti et qu’un adversaire n’a pas bondi vers vous, impossible de savoir ce que l’on vaut vraiment comme boxeur. Samedi soir sur le ring de Palézieux, ils étaient nombreux à venir chercher ces réponses. En tout cas du côté des représentants du BC Châtel-Saint-Denis, organisateur du meeting.
Fanny Mietta voulait savoir si elle pouvait retrouver le niveau qui était le sien avant la naissance de sa fille. Après dix ans d’absence et des combats vécus comme une souffrance dans sa jeunesse, Stéphane Porchet avait besoin de se prouver à lui-même qu’il pouvait assumer un combat de boxe. Quant à Léo Maillard, il a confirmé à son entourage ce qu’il savait être une évidence: le ring est fait pour lui. Les trois athlètes racontent.

 

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«Je n’avais qu’une envie, lui faire la même chose»


Léo Maillard. Une chose est sûre: le jeune homme de 17 ans ne s’est pas laissé démonter. Ni par le fait que son adversaire s’est avéré bien plus dur qu’il n’y paraissait, ni par les coups qu’il a encaissés, ni même par l’arbitre qui l’a compté à plusieurs reprises. A chaque fois, Léo Maillard est retourné boxer plus déterminé qu’avant. «Pour moi, c’était quelque chose de très clair: je n’allais pas abandonner, quoi qu’il arrive. J’ai été un peu déçu que l’arbitre interrompe le combat au troisième round, parce que j’avais vraiment envie d’aller au bout. Et je suis presque sûr que j’aurais pu le finir sans tomber.»


Son oncle François Gilliand
Domicilié à Renens et actuellement en école préparatoire pour entrer au gymnase, le jeune homme a envie d’en découdre. Il a intégré un club de boxe française (pieds et points) à 13 ans à Morges, avant de venir frapper à la porte de son oncle François Gilliand en janvier dernier. Qu’est-ce qu’il aime tellement dans la boxe, française ou anglaise? «Physiquement, c’est un sport très complet. Il faut utiliser toutes les parties de son corps. Et puis, quelque part, on se met en danger. On est obligé de bien faire, de bien se préparer pour tenir le coup. Et le moral joue un rôle très important. Il y a bien plus de challenge que dans les autres sports.»


«Il m’a vraiment énervé»
A voir la détermination et le courage du bonhomme, en effet, il semble taillé pour ce sport. «Je suis très fier de son combat, félicite François Gilliand. Honnêtement, les gens du club de La Chaux-de-Fonds n’ont pas été corrects avec nous. Quand ils présentent un senior face à un junior, ils auraient dû nous avertir qu’il boxait dur comme ça. Mais bon, on a pu voir tout le caractère de Léo. Il a fait front, il n’a pas eu peur. Si je n’avais pas vu cette qualité de boxe chez lui, j’aurais sans doute jeté l’éponge dès le premier round. Mais Léo en voulait tellement qu’il a parfaitement assumé son combat.»
Si le président et entraîneur châtelois va devoir affronter le courroux de sa famille et notamment des parents du boxeur, qui ne goûtent que très peu au noble art, Léo Maillard, lui, est prêt à en découdre à nouveau. «J’ai vraiment adoré ça. Et j’ai beaucoup appris de ce premier combat. Il avait plus d’expérience que moi et, malheureusement, je suis entré dans son jeu. Dès que j’ai reçu ses coups et vu la manière dont il avançait sur moi, je n’avais qu’une seule envie, lui faire la même chose et le frapper. Parce qu’il m’a vraiment énervé. Du coup, je n’ai pas fait la boxe que j’aurais voulue. J’aurais dû rester plus lucide. Mais bravo à lui, il a gagné.»
Et le tonton d’ajouter: «Tout le monde rêverait d’avoir un gamin comme lui, qui s’entraîne à Morges, à Châtel, et qui va encore courir tous les jours. Et puis, il a prouvé toutes ses qualités morales. C’est un gagnant que nous avons là.»

 

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«Pas de coup dur»


Fanny Mietta. La policière de Bottens, 29 ans, restait sur cinq victoires en huit combats quand elle s’est arrêtée pour donner naissance à la petite Salomé, il y a huit mois. L’heureux papa n’est autre que son entraîneur Bertrand Fellay.
Samedi face à la Bernoise Lana Redha (six combats, trois victoires), la Vaudoise du BC Châtel-Saint-Denis a dominé son adversaire quasiment de bout en bout, pour une victoire sans discussion 3-0. Sa détermination, impressionnante, a sans doute fait la différence face à une Bernoise un brin timorée. «J’avais pourtant beaucoup de doutes quant à savoir si j’étais encore dans le coup, avoue Fanny Mietta. Mon adversaire avait encore boxé en fin d’année passée. Pendant que je ne faisais rien, elle, elle s’entraînait. Mais je n’ai pas reçu de coup dur. Alors ça m’a aidée à prendre confiance au fil des rounds. Et puis, une fois qu’on est sur le ring, on ne se pose plus de question: on donne tout et ça passe ou ça casse. Ce soir, ça a passé. Je suis plutôt contente de mon combat.»
Pour remonter sur le ring, la jeune maman a dû retrouver la forme. «J’ai perdu 17 kg depuis l’été dernier. Mais je n’ai vraiment repris l’entraînement que depuis janvier. Désormais, cela demande une autre organisation avec notre fille. Heureusement que je peux compter sur mon entourage.»
Retourner en salle, se faire mal et se dépasser: cela n’a pas été trop dur? «Au contraire! Ça m’avait énormément manqué et je n’attendais que ça!»
Pour Bertrand Fellay, Fanny Mietta est sur le bon chemin. «Le camp d’entraînement en Normandie auprès du professionnel Frédéric Close a porté ses fruits. Bien sûr, il y a tout un travail physique à faire encore. Mais, ce soir, j’ai vu que les outils étaient toujours là.» La Vaudoise boxera à Martigny le 16 avril. Puis son grand objectif sera les championnats de Suisse, fin novembre.

 

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«Prouver que j’en étais capable»


Stéphane Porchet. Face au jeune et inexpérimenté Max Gregory (Martigny), le vigneron d’Epesses a été donné perdant par les trois juges. Mais l’essentiel était vraiment ailleurs pour Stéphane Porchet, 28 ans, qui reprenait les gants après dix ans d’absence. «Pour moi, remonter sur le ring est une grande victoire. Je me suis fait plaisir, je suis fier de moi et c’est tout ce qui compte.»
Qu’est-ce qui a convaincu le Vaudois de revenir à la compétition après une aussi longue pause? «J’avais l’impression de ne pas avoir terminé quelque chose. Je savais que j’avais les capacités pour boxer. Mais j’avais besoin de me surpasser, de me prouver que j’en étais capable pour ne pas rester sur un échec.»


Jambes coupées
Qu’est-ce qui le stressait tant sur un ring il y a dix ans? «Déjà, je saignais beaucoup du nez. Donc ça me coupait le souffle. Je me suis fait ensuite cautériser, ça allait mieux. Mais il y avait toujours trop de nervosité. Ça me coupait les jambes. Quand l’adversaire venait vers moi, je n’arrivais plus à reculer.»
Stéphane Porchet avait donc préféré raccrocher. «Les combats étaient durs pour moi, c’est vrai. Mais, à 18 ans, c’est aussi le temps où on décide de se lancer à fond dans le sport, ou alors de suivre les copains. J’avais décidé de suivre les copains…»
Son entraîneur François Gilliand était lui aussi très heureux samedi soir: «J’ai trouvé Stéphane vraiment libéré, ça faisait plaisir. Malgré le fait qu’il a perdu ses deux lentilles, il a réalisé un bon combat. Il a lâché ses uppercuts et il touchait l’adversaire. C’était une belle boxe.»


Une préparation mentale
Renouer avec la compétition à domicile: était-ce un stress supplémentaire? «Normalement, j’aurais dû boxer à Martigny le 12 mars. Je m’étais préparé mentalement pour ça. Du coup, mon retour a juste été déplacé. J’ai eu le temps de bien me préparer. Et puis, j’ai complètement effacé tous les gens qu’il y avait autour de moi pour me concentrer sur le combat. Pour y arriver, je fais beaucoup de travail sur moi.»
Notamment une démarche de visualisation. «Sur le ring, je ne gérais pas bien toutes les attentes. Désormais, par la visualisation ou même par des souvenirs olfactifs, j’arrive à me mettre en condition d’entraînement. Car, à la salle, ça allait toujours bien pour moi. Il n’y avait donc pas de raison pour que ce soit différent sur le ring.»
S’il souhaite maintenant «digérer ce retour» avant de planifier la suite, il y a de fortes chances pour que Stéphane Porchet remonte sur le ring qui, désormais, n’est plus son ennemi.

 


Résultats
69 kg: Jan Wüthrich (Boxgymbto) bat Mirhel Saciri (Riviera) 3-0; 58 kg: Edilson Zeqiri (Martigny) bat Brieuc Gorin (Lausanne) 2-1; 67 kg: Fanny Mietta (Châtel-Saint-Denis) bat Lana Redha (Boxen zur Bildung) 3-0; 75 kg: Loris Manieri (Monthey) bat Bilel Mdaini (Villars-sur-Glâne) 3-0; 65 kg: Mohamed Dayib (Chaux-de-fond) bat David Piazzetta (Versoix) sur arrêt de l’arbitre au 2e round;
72 kg: Max Grégory (Martigny) bat Stéphane Porchet (Châtel-Saint-Denis) 3-0; 69 kg: Ali Uluçinar (Villars-sur-Glâne) bat Ahmet Aziz (Boxen zur Bildung) 3-0; 76 kg: Léo Tafur (Chaux-de-Fonds) bat Léo Maillard (Châtel-Saint-Denis) sur arrêt de l’arbitre au 3e round; 64 kg: Hemdy Rahal (France) bat Paul Blanc (Martigny) sur arrêt de l’arbitre au 2e round; 62 kg: Nicolas Lescoffit (France) bat Gilles Mildren (Riviera) sur arrêt de l’arbitre au 3e round;
69 kg: Ali Banazli (Pontarlier) bat Fuat Zenuni (Aarau) sur arrêt de l’arbitre au 3e round; 75 kg: Vincent Kees (Yverdon) bat Michael Abadin (Riviera) 3-0.

 

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