Des enfants qui jouent comme des enfants, tout simplement

| mar, 07. mar. 2017

La première Kids Day a réuni dimanche à Bulle dix enfants à mobilité réduite. Le sport comme moyen de se défouler et de travailler son agilité: l’Association suisse des paraplégiques veut développer le concept. Reportage avec les acteurs de cette journée où seuls le plaisir, la joie et les éclats de rire comptaient.

PAR KARINE ALLEMANN

Chacune des quatre équipes engagées peut encore gagner. La tension monte pour cette course de slalom-memory. Alors ça s’encourage, ça se pousse et ça se motive. Au final, l’équipe des trèfles est la première à ramener toutes ses cartes. Cris de joie du côté des vainqueurs, envie de revanche chez les vaincus. Ça se passe comme ça quand des enfants jouent ensemble.
Facilement convaincue d’organiser une nouvelle partie, Tamara Strasser remet tout en place, les équipes peuvent en découdre. La Genevoise est la coordinatrice des sports en fauteuil roulant pour la Suisse romande, un poste créé il y a deux ans par l’Association suisse des paraplégiques. Parmi les onze clubs romands, celui de la Gruyère, présidé par Claude Jaquet. Ce dernier l’a aidée à organiser, dimanche à Bulle, la première Kids Day, qui a réuni dix enfants à mobilité réduite pour une journée de sport et de découverte. Petite particularité sympa: ils étaient accompagnés dans leurs jeux par un frère ou une sœur.
«Il y a une envie de développer le sport chez les jeunes en fauteuil», explique Tamara Strasser, entre deux consignes. «Il existe des groupes d’enfants à Berne, Saint-Gall, Nottwil et Bâle, mais pas encore en Suisse romande. C’est chouette que le Club de la Gruyère soit motivé à participer. Et puis, cette salle (la nouvelle Condémine) est juste incroyable! Le parquet est idéal pour évoluer avec des fauteuils, l’accessibilité, les vestiaires... C’est parfait!»
Dimanche, un infirmier spécialisé était présent comme aide-moniteur pour encadrer les jeunes, «ainsi que trois accompagnants de l’école spécialisée de La Cassagne, à Lausanne, pour les trois enfants en situation de handicap plus sévère».
Tamara Strasser rappelle le but de ces journées: «Ces enfants sont éparpillés en Suisse romande et ils ont souvent de la peine à trouver du monde pour des activités. Ce matin, nous organisons des jeux collectifs de découverte et, cet après-midi, j’ai fait venir une école de cirque de Lausanne, qui organise tous les vendredis après-midi des cours pour les personnes en situation de handicap. Aujourd’hui, les moniteurs vont proposer des activités liées au cirque que les enfants peuvent refaire à la maison.»
Ces journées que compte mettre en place l’Association suisse des paraplégiques sont une réponse à différents camps organisés sur des week-ends. «Durant deux jours, les frères et les sœurs peuvent tester les fauteuils et découvrir les problèmes d’accessibilité, mais aussi ses aspects ludiques, explique la spécialiste. Aujourd’hui, le but n’était pas de tester les fauteuils, mais d’organiser des jeux qu’ils peuvent pratiquer ensemble. Notamment en introduisant la notion de chance, comme dans ce jeu où il faut retrouver la bonne carte. Ainsi, tout le monde est sur un même pied d’égalité.»
Après les slaloms, c’est une déclinaison des jeux de quilles qui occupent les participants. En plus des frères, des sœurs et des accompagnants spécialisés, les enfants ont pu compter sur l’appui de deux jeunes venues prêter mains fortes. Malou Fragnière et Elise Oberson, toutes deux 16 ans, ont adoré passer cette journée avec eux. «J’ai rencontré Claude Jaquet en jouant au tennis à Bulle et il connaît bien mon papa (Philippe Fragnière, coordinateur du sport pour la ville de Bulle), explique Malou. Du coup, il m’a demandé si je voulais venir donner un coup de main. C’est la première fois et j’ai trouvé ça très cool! On voit qu’ils s’amusent et à quel point ça leur fait plaisir d’être là. Ils sont super choux!»
Très actif pour donner des coups de mains aux quatre coins de la salle de sport, avec à chaque fois une petite plaisanterie pour taquiner ou booster les participants, Claude Jaquet affichait un large sourire: «Le fait que ces activités se déroulent sur toute une journée permet aux enfants d’apprendre à se connaître. Certains se connaissent déjà pour avoir participé à des camps, mais ce n’est pas le cas de tous. Surtout, ils ont besoin de se défouler! Le sport permet de travailler son équilibre et de bien maîtriser son fauteuil. Parfois, ce sont de sacrés casse-cou!»
A l’image de la jeune Zoé Müller, de Genève, impressionnante de vitesse et de maîtrise sur ses quatre roues. «Son fauteuil électrique faisait du 11 km/h», sourit son papa Marc-André, venu passer la journée en Gruyère. «Quand il est tombé à panne, ceux qui l’ont réparé ont dit à Zoé qu’ils l’avaient boosté pour qu’il fasse du 14 km/h... J’ai grimacé un peu. Parfois, elle passe une porte à toute vitesse, avec deux centimètres de marge de chaque côté. Mais bon, en tant que parent, il faut parfois lâcher prise...» Et de rigoler franchement en voyant sa fille traverser voll gaz la salle de la Condémine pour rejoindre son copain Romain Bossy, 9 ans, seul Gruérien présent.
Pour Romain c’est bien simple, cette journée est parfaite! Déjà parce qu’elle lui permet de retrouver sa copine – les parents des deux jeunes s’accordent pour dire que Romain aime beaucoup Zoé – et parce que les activités étaient super. Qu’est-ce qu’il a préféré? «Tout!» assure le garçon. Les autres confirment, certains précisent avoir spécialement aimé le slalom-memory. Des copains, des copines, et des jeux: en effet, il ne faut rien de plus à des enfants pour s’amuser.

 

--------------------------

 

«Zoé est davantage dans son élément que son frère»


Le Genevois Marc-André Müller a accompagné sa fille Zoé, 10 ans, atteinte d’une maladie génétique, et son fils Aaron, 7 ans. «Je découvre ce type de journée et c’est franchement génial! J’apprécie que mon autre petit soit là aussi. A Genève, on a dû se battre un peu pour que Zoé puisse aller à l’école publique. Ce qui est sympa, ici, c’est que Zoé est presque davantage dans son élément que son frère.»
Ce papa l’avoue, il apprécie aussi de pouvoir passer la main. Dimanche, il en a profité pour aller faire un footing le matin en forêt de Bouleyres – «magnifique!» – et il s’est réservé l’après-midi pour lire. «Il y a peu d’activités que nos enfants peuvent faire ensemble. Et, d’habitude, les parents doivent se montrer hyper inventifs. Il faut être joueur, arbitre... Là, c’est une belle respiration pour nous. Et ça nous donne des idées de jeux. Par exemple, avec les quilles, on ne savait pas comment faire pour que Zoé puisse y jouer. L’idée de faire rouler la balle sur une planche inclinée est géniale!»
Avec un enfant qui requiert beaucoup d’attention, la famille doit trouver un mode de fonctionnement: «Leurs autres frères et sœurs grandissent beaucoup plus vite. Ils doivent se montrer patients, laisser la place à leur frère ou à leur sœur handicapé, tout en réussissant à trouver la leur. J’admire beaucoup ces enfants, qui sont très souvent extraordinaires.»
Lise-Marie Bossy est la maman de Romain (9 ans). «C’est la première fois que Romain participe à ce type de journée. Car, comme Zoé, il n’a rien à voir avec les paraplégiques. Nous, c’est les maladies génétiques qu’on maîtrise.» Romain a d’ailleurs été ambassadeur du Téléthon suisse de 2012 à 2015. Dimanche, il était accompagné de sa sœur Noémie (11 ans).


«Dévaler les pentes en montagne»
La mère de famille de Marsens a décidé d’être proactive dans les activités de son fils. «Je suis assez encline à faire des folies avec lui, sourit-elle. Et lui, il est toujours au taquet! Alors je me suis formée comme pilote de ski accompagné et comme pilote de Cimgo (n.d.l.r.: sorte de vélo tout terrain aménagé). L’été, on peut dévaler les pentes de montagne!»
Lise-Marie Bossy s’est formée grâce à Défi Sport, en Valais, qui propose ce genre d’activités. Une de ses représentantes, Annick Meystre, était aussi présente à Bulle. «Les skis pilotés et les Cimgo sont équipés pour plus ou moins d’autonomie. Avec les engins qui existent, toutes les variétés sont possibles. De plus en plus de parents se forment pour participer avec leurs enfants. Cela se démocratise un peu.»
Dans le canton de Fribourg, les associations Différence solidaire et Loisirs pour tous proposent ce genre d’activités sportives. «Il y a un large choix possible, apprécie Lise-Marie Bossy. Franchement, on passe de chouettes moments!» KA

Ajouter un commentaire

CAPTCHA
Cette question est pour tester si vous êtes un visiteur humain et pour éviter les soumissions automatisées spam.

Annonces Emploi

Annonces Événements

Annonces Immobilier

Annonces diverses