Crésuz s’apprête, courant mai, à mettre à l’enquête la révision générale de son Plan d’aménagement local. La commune va dézoner 45 000 m2 de ter-
rains à bâtir, soit un peu moins de la moitié de la surface estimée en 2014. Les citoyens et les membres du Conseil communal en ont discuté lors d'une séance d'information publique.
Par CHRISTOPHE DUTOIT
Aménagement. Faut-il voir le verre à moitié vide ou à moitié plein? Mercredi soir, la quarantaine de personnes présentes à Crésuz pour la séance d’information sur la révision générale du Plan d’aménagement local (PAL) étaient pour le moins partagées. Certaines étaient visiblement soulagées à la lecture des plans affichés dans l’abri de Protection civile. D’autres cachaient mal leur déception face à l’ampleur du dézonage envisagé.
Elaborée depuis trois ans, la révision du PAL de 2003 s’est faite dans la douleur. Selon les critères de la législation fédérale acceptée en 2014, Crésuz avait alors calculé le surdimensionnement de ses zones à bâtir à environ 80000 m2. Ce constat avait abouti à une mesure d’urgence, la mise en zone réservée de quelque 55000 m2, assortie d’une suspension provisoire de cinq ans du droit de construire. Une mesure approuvée en mars 2016.
Or, au terme des travaux de révision, la commune propose désormais le déclassement de 45 000 m2 de zones à bâtir. «La différence s’explique d’une part par le démarrage, entre-temps, d’un certain nombre de chantiers et, de l’autre, par le fait que certains propriétaires ont accepté volontairement le dézonage de leur parcelle», explique Nicolas Roschi, vice-syndic et responsable communal de l’aménagement du territoire.
Pour le reste, la commission a déterminé son choix selon cinq critères: l’équipement de la parcelle en question, son éloignement par rapport au centre du village et aux transports publics, le fait qu’elle soit en bordure de zone à bâtir, la difficulté de construction (forte pente, accès, etc.) et la proximité du périmètre de protection du patrimoine.
Au final, dix-neuf propriétaires sont impactés par le dézonage de leur parcelle, notamment en bas et en haut de la route des Planches, ainsi qu’au bout de la route de Longchamp. «C’est quand même un peu ridicule de remettre ces terrains en zone agricole, a tonné un citoyen. Quel paysan va venir exploiter un terrain en pente de 500 m2 en plein milieu du village?» Un ange passe…
Mais, c’est surtout le haut du quartier de L’Essertex (environ 20000 m2) qui se retrouve dorénavant en zone agricole. Ce qui n’a pas manqué de provoquer quelques réactions courroucées dans l’auditoire. «Les Conseils communaux précédents ont mis les bâtons dans les roues à mes clients par le passé. Mais nous nous battrons jusqu’au bout», a plaidé ce représentant de propriétaires. «On ne peut pas tenir le Conseil communal, passé ou présent, pour responsable», lui a rétorqué le syndic Jean-Claude Reymond-Joubin, sans mettre de l’huile sur le feu à propos de cette histoire ancienne. «C’est aussi aux promoteurs de faire leur travail, a ajouté une troisième voix. Ce n’est pas aux citoyens d’indemniser les gens qui spéculent.» Un second ange passe…
Conventions signées
En parallèle à ce dézonage jugé «violent» par un auditeur, quelque 25000 m2 en zone réservée sont maintenus en zone à bâtir à la condition que les propriétaires signent une convention de construction dans un délai de dix ans maximum, sans quoi leur terrain tomberait irrémédiablement en zone agricole, sans indemnités. «Nous sommes passés d’un système de droit de construire à une forme d’obligation de faire construire, souligne le syndic, en référence aux législations en vigueur. Nous nous attendons certainement à dix-neuf oppositions.»
«Juste juste»
«En faisant de la sorte, nous n’avons pas de marge, nous sommes juste juste, mais l’objectif est atteint, explique l’urbaniste Heinz Müller, du bureau Archam et Partenaires SA. Mais la réserve est considérable et représente un potentiel d’une centaine d’habitants dans les dix ans.»
Sans parler de la disponibilité à l’intérieur des parcelles déjà construites, qui pourraient être densifiées ou accueillir de l’habitat principal (en conformité avec la Lex Weber). A ce propos, le règlement communal d’urbanisme a également subi un toilettage. L’indice brut d’utilisation du sol maximal passe, par exemple, à 0,7 pour les habitations individuelles en zone résidentielle à faible densité. «On donne ainsi davantage de possibilités de construire dans ces zones», explique Nicolas Roschi.
Sinon, quatre terrains ont fait l’objet d’un changement d’affectation: une partie du parking de l’église (400 m2), la place de jeu (400 m2) et le virage en épingle de la route des Planches (700 m2) en zone d’intérêt général, ainsi que la première parcelle de La Savignière (1300 m2) en zone village.
Future zone à bâtir?
Non sans une certaine dose d’ironie, Crésuz a également présenté son Plan directeur communal, qui prévoit «l’éventuelle future extension de la zone à bâtir», notamment le long de la route de la Cure et… la remise en zone à bâtir de certaines parcelles aujourd’hui dézonées. «De cette manière, nous anticipons le durcissement des conditions que d’aucuns entrevoient avec le nouveau Plan directeur cantonal, prévu pour 2019», affirme le syndic Jean-Claude Reymond-Joubin.
Au terme de la présentation, une quinzaine d’interventions ont émané du public, principalement des propriétaires en grande majorité non-citoyens de la commune. La plupart des requêtes ont tourné autour de la question des indemnisations. «C’est un peu compliqué, a averti le syndic. Les propriétaires touchés ont d’abord la possibilité de s’opposer à la révision générale. Ensuite seulement, lorsque le PAL sera entré en force, ils pourront lancer une procédure d’indemnisation dans les trente jours.» Chaque cas sera étudié individuellement par la commission d’expropriation. «Mais, depuis 2014, aucune commune n’a eu besoin d’indemniser des propriétaires…»
Le vice-syndic a également précisé que des démarches avaient été entamées en vue d’un échange de droits de bâtir avec d’autres communes, mais que le processus n’avait pas abouti.
La mise à l’enquête de cette révision générale du PAL de Crésuz est attendue dans le courant du mois de mai. ■
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