PAR KARINE ALLEMANN

Les Monts-de-Riaz avaient des allures «sotchiennes», dimanche matin. Le cadre du centre gruérien y est bien plus nordique que les bords de la mer Noire. Mais les températures étaient tout aussi printanières. Dès lors, le Semi-marathon de l’Etoile du Ski-club Grattavache/Le Crêt, qui faisait office de championnats fribourgeois, a causé bien des tourments à certains des participants.
Ou plutôt à certaines. «Il faisait très chaud. Et moi, ça me coupe toute énergie.» La jeune Mélissa Couplan (Romont) visait la deuxiè­­me place. Elle a été devancée par Natacha Mooser (La Villette). Devant, même dans un mauvais jour, Nicole Donzallaz est restée intouchable (un chrono de 40’40, soit 34 secondes d’avance sur Natacha Mooser).
«J’ai vraiment vécu une sale journée, comme Dario», rigole après coup Nicole Donzallaz, en référence au champion Cologna qui, dimanche, alors qu’il était en tête du 50 km classique, a cassé son ski à 1,5 km de l’arrivée… «Je suis tombée deux fois, assez lourdement, et ça m’a fait le coup du lapin à chaque fois. La neige était très difficile à skier, elle ne pardonnait aucun écart.»
L’employée de commerce de 33 ans va s’octroyer quelques jours de repos avant d’attaquer ses grands rendez-vous: la Mara, ce week-end, puis les championnats d’Europe des longues distances en Slovaquie, où elle visera un podium, et une World­-loppet en Russie.
Chez les messieurs, un invité bernois a joué le trouble-fête. A 49 ans – il les a fêtés samedi – Lorenz «Lori» Brunner (54’20) a remporté la course messieurs, devant Beat Trachsel (55’34, Plasselb, champion fribourgeois) et Christian Charrière (56’26, Gumefens). «Par chance, ce n’est pas parti trop vite au début. Ensuite, j’ai pu faire une bonne course», raconte celui qui a fait partie des cadres suisses «il y a une trentaine d’années». Désormais, le Bernois se concen­­tre sur les championnats du monde vétérans. Il y a décroché deux troisièmes places et deux cinquièmes places.
Vainqueur du Semi-marathon en 2013, Christian Charrière a dû se contenter d’un troisième rang. La forme de l’ancien cycliste est-elle bonne? «Comme d’hab!» sourit-il, avant de raconter: «Brunner a accéléré à la fin du premier tour. On s’est retrouvés à trois au sommet. Mais je me faisais lâcher dans les descentes. Avec une neige pareille, il faudrait skier plus fin.»
Dans la région, la saison de ski de fond se terminera les 29 et 30 mars aux Mosses avec le Ski-24, une course de 24 heu­res organisée notamment par le Glânois Frédéric Grandjean. Nicole Donzallaz, Christian Charrière et Pierre Bourquenoud ont déjà convenu de former une équipe.

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Quelles perspectives pour la relève?
Que le vainqueur de la course de dimanche soit âgé de 49 ans – et qu’il revienne en forme après «avoir été malade pendant trois semaines», a-t-il raconté – interpelle forcément. Plus réjouissants sont les résultas des plus jeunes. Début janvier par exemple, le jeune Nicolas Cottier était sacré champion romand chez les garçons U16 (il est aussi champion fribourgeois depuis dimanche). Il faut dire que les jeunes représentants du Ski-club La Villette trustent régulièrement les podiums. «Nous comptons environ 35 jeunes, dont 30 qui participent à des courses», souligne Natacha Mooser (deuxième dame dimanche), qui fait partie de l’équipe d’entraîneurs du club de la vallée de la Jogne.
Y voit-elle un effet Cologna? «Il est une idole, mais je ne pense pas que c’est grâce à lui que les enfants pratiquent le ski de fond. Ils ont surtout besoin d’une structure, et d’être entre copains et copines. Chez nous, il y a beaucoup d’enfants de coureurs. Le ski de fond a l’avantage de pouvoir se pratiquer en famille. Et, au niveau du budget, il est devenu plus accessible.»
Reste l’étape supplémentaire, quand un jeune talent souhaite intégrer un cadre national. A Davos par exemple, principal centre de sport-études pour le ski de fond, ou au NLZ de Brigue. «Davos est très éloigné, rappelle Natacha Mooser. Et Brigue est surtout axé ski alpin. Dommage qu’il n’y ait pas de telle structure dans la région. Car, on voit au niveau des résultats, que nos jeunes peuvent titiller les meilleurs.»
Mélissa Couplan, 17 ans, est justement étudiante à Brigue. En tant que fondeuse, et fille de surcroît, elle se sent bien seule. «L’arrivée d’un nouvel entraîneur a redonné un peu d’entrain à la discipline. Mais nous ne sommes que deux filles, la deuxième étant suisse alémanique. Et, dans le cadre de Ski-romand, je suis seule. C’est dur de garder la motivation.»
La jeune fille n’est d’ailleurs pas certaine de poursuivre. «Cela dépendra de mes prochaines courses: deux Coupes de Suisse à Silvaplana, le week-end prochain, puis les championnats de Suisse à Leysin, dans un mois.»
A 15 ans, Nicolas Cottier est lui aussi à l’heure des choix. «A cet âge, c’est difficile de savoir ce qu’on veut vraiment, souligne toutefois son papa Dominik (4e dimanche). Nicolas n’a pas encore de place d’apprentissage. S’il ne trouve pas, il pourrait tenter Brigue. Mais, le système sport-études ne correspond pas forcément à tout le monde.»
Est-il possible de commencer un apprentissage dans la région de Brigue et de profiter des structures en place? «Oui. Mais, dans ce cas, autant rester à la maison, avance Dominik Cottier. Le ski de fond est différent du ski alpin où, à 16 ans, si tu n’es pas dans le bon wagon, c’est fini pour toi. Dans notre sport, on est moins pressé par le temps. On voit rarement un champion du monde âgé de 20 ans.»
Le fondeur de La Villette voit-il un effet Cologna? «Il ne faut pas se leurrer, beaucoup de jeunes arrêtent vers 16 ans. Alors, Dario, c’est une sacrée motivation pour eux. Pour le ski de fond en général, c’est super. Il y avait sûrement beaucoup de monde devant la télé, dimanche matin. Alors qu’ils ne s’étaient jamais intéressés au fond avant.» KA