… Je pose mon oreille…

sur une cardère qui penche dans le sens du vent. La fusion est immédiate, la plante, du haut de ses longues tiges, me livre sa mémoire, je reçois son temps: de sa minuscule graine qui la contient tout entière, en passant par son enracinement à la frontière de la forêt, son soleil, ses soifs, ses pluies, ses fleurs d’été, son pollen, jusqu’à ses graines distribuées au gré des airs.

Je reçois en un éclair les pages de sa vie. La cardère prend l’ordre des choses sans aucun commentaire: les assauts des vents d’ouest sur ce coin de terre avec vue ouverte sur Romont et les Préalpes, les Alpes qui se pavanent à l’arrière, les lumières, l’hiver, la fin du cycle. Comme ça, sans déranger personne, dans sa jachère. A quelques pas du lieu-dit Fin du Signal. Je craignais de me…